Le fonds de pension québécois CDPQ va sortir du pétrole d'ici fin 2022

Le fonds canadien vient s'ajouter à la liste des acteurs de la finance qui s'engagent à réaliser des investissements en lien avec la lutte contre le réchauffement climatique. Entre quête de rentabilité et effet de communication, les fruits de ces nouveaux positionnements sont toutefois plus complexes à identifier.
Les actifs de la CDPQ dans ce secteur d'activité représentent à ce jour 1% de son portefeuille, soit 4 milliards de dollars canadiens.

La finance dite à impact, celle qui s'engage à ne plus financer les énergies fossiles tels le charbon ou le pétrole, continue de tracer son sillon. Dernier acteur de la finance traditionnelle à vouloir s'engager dans les enjeux environnementaux, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), le deuxième plus important fonds de pension canadien, qui a annoncé mardi sa décision de cesser les investissements dans le secteur pétrolier d'ici fin 2022. Autre promesse faite à la finance verte, celle de tripler son portefeuille d'actifs verts et de réduire de plus de moitié l'intensité carbone de son portefeuille d'ici 2030

"On ne pense pas que le secteur pétrolier a un futur durable, donc on a décidé de limiter notre exposition seulement aux pipelines existants", a commenté le PDG de la Caisse lors de la présentation de la nouvelle statégie climatique confirmant des informations révélées par le quotidien La Presse samedi.

Cette décision est motivée par un désir de ne pas "hausser l'offre de pétrole dans le monde", a-t-il ajouté. Les actifs de la CDPQ dans ce secteur d'activité représentent à ce jour 1% de son portefeuille, soit 4 milliards de dollars canadiens.

Des actifs dans les compagnies pétrolières

En outre, pour le monde de la finance le chemin de la transition est encore long. En 2020, les banques internationales ont ainsi accordé près de 2.700 milliards de dollars de financements aux énergies fossiles depuis l'adoption de l'Accord de Paris, avec un volume en hausse chaque année depuis 2016, selon le rapport "Banking on climate change, fossil fuel finance report 2020" réalisé par cinq ONG dont Reclaim Finance.

Aussi, dans son dernier rapport annuel disponible en ligne, la CDPQ détenait au 31 décembre 2020 des actions dans plusieurs compagnies pétrolières, dont les grands noms canadiens Enbridge, CNRL, Suncor et TC Énergie (anciennement TransCanada).

Outre la fin des investissements dans le pétrole, l'organisation a aussi annoncé la mise en place d'une "enveloppe de transition" de 10 milliards de dollars canadiens pour aider les compagnies des grands secteurs industriels à décarboner leur activités.

BlackRock, Calpers, Axa en France...

Le fonds canadien emboîte le pas à certains de ses homologues. Patron communiquant sur ces nouveaux engagements, Larry Fink, le directeur général du fonds BlackRock (9.000 milliards de dollars d'actifs sous gestion) qui se présente comme un financier progressiste et soucieux du climat. En juillet, il appelait ainsi à une réforme du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale pour les rendre plus aptes à relever le défi du changement climatique. Et de donner pour exemple le rôle de BlackRock dans la création d'une stratégie de financement climatique public-privé de 250 millions de dollars destinée aux infrastructures durables, dans laquelle le gouvernement et des philanthropes fournissent des capitaux subordonnés pour protéger les rendements des investisseurs privés.

Mais, selon plusieurs ONG environnementalistes, les votes de BlackRock lors des assemblées générales (AG) d'entreprises dans lesquelles elle investit mettent à mal sa promesse "green".

L'intérêt est aussi financier sur des actifs qui ont tendance à se déprécier. BlackRock aurait ainsi fait perdre 90 milliards de dollars de plus-values potentielles à ses clients en dix ans à cause de ses investissements dans les énergies fossiles. Tout l'enjeu est donc de prouver qu'un investissement respectant les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est rentable et n'affecte pas la performance financière à long terme, au contraire.

Autre fonds de pension à s'engager, le californien Calpers qui a crée en 2017 le Climate Action 100+, un groupe d'investisseurs qui détient 54 milliards de dollars d'actifs et fait pression sur les industriels émetteurs de gaz à effet de serre (GES) pour qu'ils améliorent leurs pratiques. Une initiative toutefois perçue comme du "greenwashing" par certaines ONG qui constatent des mouvements financiers inverses.

En France, depuis 2010, Axa, investisseur institutionnel a mis en place une politique d'investissement responsable qui repose sur l'intégration de facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). « Nous avons pris l'engagement d'investir 25 milliards d'euros pour le climat et nous finançons des projets de transition » expliquait en mai à La Tribune Bertrand Poupart-Lafarge, Directeur Finance, Stratégie et Juridique d'AXA France, lors du Forum Partageons l'Économie.

La banque BNP Paribas s'est, elle, engagée à sortir totalement du charbon d'ici à 2040.

Côté pétrolier, TotalEnergies assume de financer encore pour l'instant sa transition avec les revenus du pétrole et du gaz. "C'est l'argent du pétrole qui finance la transition énergétique", a affirmé le PDG Patrick Pouyanné à La Tribune.

Outre les entreprises, il reste enfin les Etats à emmener sur le chemin de la transition écologique. Les plans de relance post-Covid ont accordé six fois plus d'investissements aux fossiles qu'aux renouvelables, selon le groupe de réflexion international sur les énergies renouvelables REN21 dans un rapport publié en juin.

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