« Les enjeux économiques et sociétaux de l’espace sont énormes » (Général Michel Friedling)

INTERVIEW. Le Commandement de l'espace a organisé pour la première fois en Europe un premier hackaton sur le thème du spatial de défense. La France reste la nation pionnière en Europe sur tous ces dossiers. Pour le commandant du Commandement de l’Espace, le général Michel Friedling, la France travaille "collectivement pour assurer un usage pacifique et responsable de l'espace par tous".
Michel Cabirol
Même si nous avons renforcé l'attractivité et la notoriété du commandement de l'espace et du ministère avec ce Hackaton, et donc aussi de susciter des vocations, notre objectif était avant tout de faire parler des sujets qui concernent le spatial militaire et d'intéresser une population qui, a priori, en est assez éloignée (Général Michel Friedling)
"Même si nous avons renforcé l'attractivité et la notoriété du commandement de l'espace et du ministère avec ce Hackaton, et donc aussi de susciter des vocations, notre objectif était avant tout de faire parler des sujets qui concernent le spatial militaire et d'intéresser une population qui, a priori, en est assez éloignée" (Général Michel Friedling) (Crédits : Ministère des Armées)

LA TRIBUNE - Le commandement de l'espace a organisé vendredi son premier Hackaton. Quel bilan tirez-vous de cette opération ?
GENERAL MICHEL FRIEDLING : Le hackaton DefinSpace, que le commandement de l'espace a organisé avec onze sponsors et en partenariat avec la DGA, le CNES et l'Agence Innovation de Défense (AID) est le premier organisé en Europe. Et c'est la France, qui est le premier pays européen à s'être saisi du sujet de la défense de nos intérêts dans l'espace à avoir lancé une telle initiative, après avoir orchestré là aussi le premier exercice spatial militaire, baptisé AxterX. En dépit du Covid-19 et donc des incertitudes, qui portaient sur l'organisation de ce premier hackaton, 174 jeunes étudiants et diplômés s'y sont inscrits, originaires de plusieurs écoles, soit une cinquantaine d'équipes. Les sélections ont été réalisées début juin, en virtuel ou en présentiel avec des écoles partenaires (SupAero, l'Ecole de l'air et de l'espace et l'Enseirb Matmeca de Bordeaux). La finale s'est tenue à la Station F qui est dans un lieu emblématique avec un message fort vis-à-vis de la jeunesse et de l'innovation. Au bilan, nous sommes particulièrement satisfaits de cette première édition qui est un vrai succès. Nos compétiteurs, nos partenaires et nos sponsors sont également tous enchantés de cette première édition. Nous allons maintenant travailler à donner davantage d'ambition à la prochaine édition et nous voulons notamment lui donner une dimension européenne.

Quel était l'objectif de ce hackaton pour le commandement de l'espace ?
Même si nous avons renforcé l'attractivité et la notoriété du commandement de l'espace et du ministère avec ce hackaton, et donc aussi de susciter des vocations, notre objectif était avant tout de faire parler des sujets qui concernent le spatial militaire et d'intéresser une population qui, a priori, en est assez éloignée. Mais l'espace reste un sujet, qui suscite l'imagination et le rêve avec des projets comme Perseverance, ou encore la mission de Thomas Pesquet dans la Station spatiale internationale (ISS). Car il y a des enjeux extrêmement importants de défense et de sécurité dans l'espace.

Quels sont ces enjeux ?
Nous n'expliquons pas encore suffisamment les enjeux économiques et sociétaux de l'espace, qui irrigue tous les champs de l'activité humaine : environnement, santé, énergie, finance, agriculture, aide au développement, lutte contre le réchauffement climatique, etc... Il faut donc le dire et le redire encore et encore. Une étude de la Commission européenne de 2019 révèle que plus de 10% de son PIB estimé à 14.500 milliards d'euros, dépend de l'espace. L'impact est énorme. Selon un rapport de l'OCDE, l'économie de l'espace représentait en 2019 dans le monde un peu moins de 400 milliards de dollars, ce qui comprend le secteur amont, c'est-à-dire la fabrication des lanceurs et des satellites ainsi que leur mise en orbite, mais aussi le secteur aval qui comprend l'exploitation des données spatiales. Diverses études récentes estiment que cette économie pourrait représenter entre 1.000 et 3.000 milliards de dollars en 2040. Et cela ne comprend pas les impacts indirects, c'est-à-dire toute l'économie qui se développe grâce aux services spatiaux. Par exemple, sans les services de géolocalisation spatiaux, la société Uber, qui réalise aujourd'hui environ 15 milliards de dollars de chiffre d'affaires, n'existerait pas. C'est également vrai pour des milliers d'autres entreprises.

En quoi le commandement de l'espace est-il concerné par ces enjeux économiques ?
Le commandement de l'espace est en première ligne pour expliquer et mettre en œuvre la stratégie spatiale de défense. Expliquer ces enjeux fait donc partie de nos missions. Et nous devons également travailler collectivement pour assurer un usage pacifique et responsable de l'espace par tous, en toute transparence comme le montre la stratégie spatiale de défense. C'est ce que nous faisons quotidiennement avec les autres acteurs du ministère mais également avec d'autres ministères.

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ENCADRE

Deux hackatons pour DefinSpace

DefinSpace 2021, première édition du hackaton organisé par le commandement de l'espace avec l'appui d'Aerospace Valley, proposait deux défis aux 174 étudiants inscrits (dont 16 militaires) répartis en 40 équipes. Pour une première participation, ce chiffre est excellent.. Le premier portait sur une problématique généraliste et demandait aux compétiteurs de plancher sur le rôle de l'Union Européenne en matière de sécurité et de défense dans l'espace au profit de ses États Membres. Le second défi portait sur une problématique technologique. Les compétiteurs devaient s'interroger sur l'opportunité pour le ministère des Armées d'investir dans un cloud spatial militaire et quels moyens mettre en œuvre pour le mettre en place rapidement.

Une finale nationale rassemblant 12 équipes finalistes (six sur chaque sujet) a eu lieu vendredi à Paris à la Station F. Le vainqueur du sujet « politique » est une équipe (Daft Space) composée de quatre étudiants de l'IEP Paris et un jeune salarié de Sopra Steria. L'équipe vainqueur du challenge technique (Satellix) était composée de cinq étudiants de l'école polytechnique. Les deux équipes gagnantes ont gagné un voyage à Kourou afin d'assister au décollage d'un satellite militaire à l'automne.

Michel Cabirol

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Commentaires 4
à écrit le 12/07/2021 à 16:12
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La blanche coûte moins chère pour se mettre en apesanteur... mais apparemment ce n'est pas suffisant pour la pseudo-élite corrompue.

à écrit le 12/07/2021 à 10:57
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Le commun des mortels se fout de l'espace. Pour lui, même pas un rêve. La réalité est plus terre à terre. Il s'agit pour lui de satisfaire à des besoins primaires, et il pense avec raison que beaucoup de milliards et d'énergie dont dépensés, alors q...

à écrit le 12/07/2021 à 9:08
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Que ne dit on pas quand il s'agit d'utiliser de l'argent public! Que cela soit pour une cause sociétale et collective on peut l'admettre, mais économique... on ressent un petit malaise!

à écrit le 12/07/2021 à 7:35
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Sur le fond, le Général a raison. Apres, concrètement dans la vraie vie, c'est autre chose. Avec le recul, depuis maintenant une trentaine d'années, et à de très rares exceptions près qui ne vont plus durer longtemps, les industries françaises de l'...

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