Spatial : un sommet où tous les grands pays sont gagnants (France, Allemagne, Italie)

Les 22 États membres de l'Agence spatiale européenne (ESA) ont trouvé un accord pour soutenir financièrement Ariane 6 et Vega-C afin d'assurer la compétitivité des deux seuls lanceurs disponibles à partir de 2024 (en principe). L'Allemagne arrache l'ouverture à la concurrence dans le domaine des lanceurs avec déjà en ligne de mire dans une dizaine d'années la succession d'Ariane 6.
Michel Cabirol
L'accord tripartite (France, Allemagne, Italie) va permettre à l'ESA de passer une commande à Arianegroup pour un lot de 27 lanceurs supplémentaires, au-delà des 15 déjà commandés (42 au total).
L'accord tripartite (France, Allemagne, Italie) va permettre à l'ESA de passer une commande à Arianegroup pour un lot de 27 lanceurs supplémentaires, au-delà des 15 déjà commandés (42 au total). (Crédits : CNES)

Six mois de négociations pour parvenir à un bel « happy end » à l'américaine au sommet spatial de Séville (6 et 7 novembre). Six mois de psychodrames et de crises de nerfs entre l'Allemagne, la France et l'Italie pour repartir vers Paris, Berlin et Rome en se réjouissant d'avoir protéger au mieux les intérêts de leur industrie spatiale nationale dans le domaine des lanceurs. Les trois pays partenaires (un peu) mais rivaux (beaucoup) repartent tous avec « la banane » de Séville.

Lire aussiSommet spatial européen : ces quatre bombes à désamorcer

« Il sort toujours quelque chose de neuf et de positif de la crise que nous avons connue au cours des derniers mois, des échanges parfois difficiles, longs, que nous avons eus avec nos partenaires, sort aujourd'hui une nouvelle ambition spatiale européenne pour le XXIᵉ siècle, avec un lanceur lourd dont le financement et les technologies sont validés », s'est réjoui lundi soir le ministre de l'Économie Bruno Le Maire en charge de l'espace.

Lanceurs : une pluie de bonnes nouvelles

Pour résumer, la France a obtenu une somme significative pour couvrir les frais fixes de l'exploitation d'Ariane 6 à partir de 2026 (340 millions d'euros par an pour financer les lancements entre le 16e et le 42e vol) à la grande satisfaction mais aussi soulagement d'ArianeGroup ; l'Allemagne a décroché son Graal en arrachant à Rome et Paris l'ouverture à la concurrence dans le domaine des lanceurs avec déjà en ligne de mire dans une dizaine d'année la succession d'Ariane 6 ; et l'Italie a réussi à désarrimer son champion Avio, qui conçoit les lanceurs de la famille Vega, de l'orbite commerciale d'Arianespace. Et, tout comme ArianeGroup, Avio obtient également une aide publique pour l'exploitation de Vega-C mais beaucoup moins significative (21 millions d'euros par an entre le 26e et le 42e vol).

Par ailleurs, le conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne (ESA) a réaffirmé que l'accès indépendant et autonome de l'Europe à l'espace dépendra fortement durant les dix prochaines années des lanceurs Ariane 6 et de Vega-C, puis de Vega-E. Dans ce cadre, Ariane 6 se verra confier un minimum de quatre lancements institutionnels européens par an tandis que Vega C en aura au moins trois par an. L'accord tripartite prévoit également que les trois pays s'engagent à contribuer au financement d'Ariane 6 au-delà des trois ans actés par l'ESA pour au moins 18 mois supplémentaires au-delà du 42e vol.

Cet accord va permettre à l'ESA de passer une commande à ArianeGroup pour un lot de 27 lanceurs supplémentaires, au-delà des 15 déjà commandés (42 au total). Soit au-delà du carnet de commandes d'Arianespace qui n'a « que » pour le moment 28 lancements d'Ariane 6. Ce qui est une bonne nouvelle, car l'Europe croit à un marché pour le futur lanceur lourd européen, notamment avec la constellation européenne IRIS². En contrepartie de toutes ces bonnes nouvelles, les industriels qui conçoivent Ariane 6 (ArianeGroup ainsi que ses sous-traitants) se sont engagés à réduire les coûts du futur lanceur lourd de l'Europe de 11% pour garantir la compétitivité du programme.

Europe, l'exploration spatiale au rabais

En revanche, en dépit des déclarations en faveur d'une politique européenne ambitieuse dans l'exploration spatiale (en mode, paroles, paroles de Dalida), elle va bien rester le parent pauvre de l'Europe, où de très nombreux pays n'en font pas du tout leur priorité. Aussi, les 22 membres de l'ESA (la plupart des pays de l'UE, le Royaume-Uni, la Suisse et la Norvège) s'en sont tenus très modestement à la proposition du directeur général de l'ESA Josef Aschbacher, d'un concours entre au moins trois industriels pour fournir un service de vaisseau-cargo réutilisable en orbite basse d'ici à 2028. Et comme c'est une « priorité », l'ESA a sécurisé un investissement... de 75 millions d'euros, à condition que ce nouveau projet n'ait pas d'incidence sur les priorités définies au sein du Programme-enveloppe européen d'exploration (E3P) ou sur la couverture des risques programmatiques.

D'une manière générale, ce concours préfigure la nouvelle approche qu'entend adopter l'ESA, sur le modèle de la NASA, en achetant des services à des industriels plutôt qu'en développant elle-même des programmes. Mais pour quel marché en Europe dans le domaine du transport spatial de fret ?

Michel Cabirol

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 18
à écrit le 08/11/2023 à 11:01
Signaler
@Adieu BCE 😂Vous êtes incroyable comme Libertarien. 1. Le tournant néolibéral n’a pas réduit l’intervention de l’État dans le système économique, mais a permis aux pouvoirs forts dans ce système de contrôler les institutions publiques afin d’utiliser...

à écrit le 07/11/2023 à 11:19
Signaler
Soutenir la compétitivé, à coup de subventions, prouve simplement que nous savons ne plus être compétitif, au moins pendant une dizaine d'années ( avec beaucoup de retard) avant d'avoir des lanceurs réutilisables. Nous espérons et attendons tranquill...

le 07/11/2023 à 12:13
Signaler
@Azerty. Au-delà de la schizophrénie bureaucratique, n'est-ce pas la France de Georges Pompidou qui, par un autre biais, devait ouvrir le réceptacle néolibéral en laissant s'échapper le "génie de la financiarisation" en 1970? En effet, la France fut ...

le 07/11/2023 à 18:24
Signaler
@raymond 3 janvier 1973, article 25, un point de bascule de l'histoire de la finance avec à la manœuvre un ancien banquier de la banque Rothschild, si j'ai tout suivi raymond. !

le 07/11/2023 à 18:47
Signaler
@Raymond & Azerty Interdire à la Banque de France de financer directement le déficit public ne fut pas la cause principale de l'augmentation de la dette française. C'est le choix politique depuis 1981 (confirmé par tous les gouvernements suivants) d...

le 07/11/2023 à 18:48
Signaler
@Raymond & Azerty Interdire à la Banque de France de financer directement le déficit public ne fut pas la cause principale de l'augmentation de la dette française. C'est le choix politique depuis 1981 (confirmé par tous les gouvernements suivants) d...

le 07/11/2023 à 18:49
Signaler
@Raymond & Azerty Interdire à la Banque de France de financer directement le déficit public ne fut pas la cause principale de l'augmentation de la dette française. C'est le choix politique depuis 1981 (confirmé par tous les gouvernements suivants) d...

le 08/11/2023 à 9:51
Signaler
@bce merci pour l'intervention. A cette époque il y avait encore un capitaine qui tenait la "Barre" ce qui n'aurait pas déplu à "Raymond". La question : Qui a insufflé aux marionnettes qui ont suivi de vivre à crédit sans jamais rembourser ? Comment...

à écrit le 07/11/2023 à 11:09
Signaler
Avec une belle faute de français en prime "en se réjouissant d'avoir protéger" à corriger : "en se réjouissant d'avoir protégé".

à écrit le 07/11/2023 à 10:16
Signaler
Encore une fois la France a pensé au court terme et l'Allemagne au long terme.

le 07/11/2023 à 10:36
Signaler
@Adieu BCE. Encore une fois, l'Allemagne a pensé au long terme?🤣 Soit-il s'agit là d'une plaisanterie ou alors d'une totale méconnaissance du rôle (hégémonique et économique) de l'Allemagne au sein de l'UE durant la crise des dettes souveraines (2009...

à écrit le 07/11/2023 à 10:10
Signaler
"repartir vers Paris, Berlin et Rome en se réjouissant d'avoir protéger au mieux les intérêts de son industrie spatiale nationale" en une phrase (avec une belle faute d'orthographe) tout est dit du pourquoi ça fonctionne pas comme ça devrait (on aura...

à écrit le 07/11/2023 à 9:46
Signaler
Dans le titre déjà une imprécision la réalité technologique voudrait: FRANCE, ITALIE, Allemagne et NON France, Allemagne, Italie

à écrit le 07/11/2023 à 8:53
Signaler
Non l'Allemagne n'est pas un grand pays, son oligarchie la prend pour un grand pays oui le plus grand pays du monde même certainement et les chimères allemandes sont enracinées dans les livres d'histoires.

le 07/11/2023 à 11:54
Signaler
Halte à larrogance francaise !!! Pour le moment l'Allemagne vient de dépasser le Japon et se hisse en 3 position derriers les USA et la Chine en terme de PIB: et la france décroche au 9 eme rang. Même si l'Allemagne n'est pas parfaite, elle surclass...

le 08/11/2023 à 9:04
Signaler
La France repose sur une histoire, l'Allemagne sur des légendes douteuses, cela ne peut pas $être un grand pays, l'arrogance n'a rien à voir avec cela, si Apollon est plus attractif que Quasimodo ce n'est pas sa faute à lui.

à écrit le 07/11/2023 à 8:31
Signaler
En filigrane toujours cette arrogance occidentale. " tous ces grands pays" qui sont en realite une mosaique de nations incapables seules de realisations concretes. Cette europe prend eau de toute part.

le 07/11/2023 à 11:06
Signaler
@matins calmes. En effet, l'"Europe des marchands" prend l'eau de toute part alors même qu'à sa conception, les plans (économique et monétaire) étaient déjà des concepts déficients. Et surtout, il ne fallait rien venir bouleverser dans cet ordre étab...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.