Voiture électrique : Rivian, Fisker, Lucid, ces nouveaux noms de l’automobile américaine qui cherchent leur salut en Europe

Rivian, Fisker, Lucid Motors : plusieurs constructeurs américains tentent de se faire une place sur le marché de la voiture électrique, comme Tesla avant eux. Mais c'est loin d'être une mince affaire tant les coûts de production grignotent dangereusement leur trésorerie et les menacent de disparition. Pour s'en sortir, ils misent sur la technologie et le haut de gamme.
Le SUV Ocean de Fisker est disponible sur le marché européen depuis début 2023.
Le SUV Ocean de Fisker est disponible sur le marché européen depuis début 2023. (Crédits : Reuters)

Si la plupart des constructeurs automobiles traditionnels ont boudé le Salon de Genève cette semaine, il y en a un qui, à l'inverse, a surpris par sa présence. Lucid Motors, un constructeur américain qui produit des véhicules depuis 2021, s'est retrouvé coincé entre les Chinois MG et BYD et le groupe Renault.

À titre de comparaison, il a vendu 6.000 exemplaires de ses véhicules dans le monde en 2023, contre 840.000 pour MG, plus d'1,5 million pour BYD et plus de 2,2 millions pour Renault. Un petit poucet donc, en quête de notoriété. Lucid Motors a présenté ses trois voitures électriques disponibles sur le marché européen, dont le nouveau Gravity, un SUV de 7 places prévu pour fin 2024 censé séduire l'Europe, l'un de ses principaux marchés.

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Malgré cette présence à Genève, Lucid Motors frôle la faillite. En cause : près d'un demi-million de dollars perdu par véhicule, une baisse de la trésorerie de 365 millions de dollars l'an passé, à quelque 1,4 milliard de dollars obligeant à baisser la production. Un cercle vicieux qui a coûté cher à Lordstown Motors, un autre jeune constructeur américain. En juin dernier, l'entreprise a été déclarée en faillite, après l'échec de la commercialisation de ses pick-up électriques.

Des coûts de production colossaux

Son concurrent, Rivian, également spécialisé dans les pick-up électriques, a perdu presque 4 milliards de dollars de trésorerie en 2023 d'après le Wall Street Journal.

Car produire une voiture demande des investissements colossaux notamment pour la construction d'usines qu'il faut faire monter en puissance et mettre aux normes. Pour limiter ces investissements, ces constructeurs américains, arrivés il y a quelques années seulement, récupèrent souvent des usines d'anciens constructeurs traditionnels, comme Rivian avec l'entreprise Mitsubishi dans l'Illinois. De son côté, Fisker, autre nouvel entrant américain sur le marché des véhicules électriques, a préféré prendre une usine indépendante en Autriche pour produire son SUV baptisé Ocean. « Une façon de limiter le risque financier », confie Emmanuel Bret, son directeur général en France, pointant l'exemple d'Apple qui conçoit aux Etats-Unis, mais ne détient pas ses propres usines.

Malgré cela, le constructeur n'a livré que 80 véhicules cette année. Résultat : l'action du groupe, située autour de 6 dollars en 2023, s'est effondrée en dessous du dollar depuis le début de l'année. Annonçant des prévisions de ventes plus faibles que prévu pour cette année, Rivian a également vu son titre chuter de 30% la semaine dernière, à 11 dollars l'action.

Ces jeunes entreprises américaines continuent pourtant de brûler de la trésorerie pour augmenter les cadences de production afin de faire des économies d'échelle à terme, avec en tête l'espoir de réaliser la même trajectoire que Tesla

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Le premium comme arme pour se développer

Car l'entreprise d'Elon Musk n'a pas toujours connu la santé financière d'aujourd'hui. Le premier constructeur mondial de voitures électriques n'est devenu rentable qu'en 2018, soit dix ans après son premier roadster sorti en 2008. Et ce, grâce à la production de la Model 3 et un passage à plus de 100.000 véhicules produits par an. Avant ça, le groupe vivait essentiellement sur les crédits carbone alloués à l'entreprise. Pour ces nouveaux entrants sur le marché de l'électrique, l'argent provient également des aides des Etats-Unis grâce à l'Inflation réduction act, mais aussi d'investisseurs comme Amazon dans Rivian ou encore l'Arabie saoudite, premier actionnaire de Lucid Motors.

En outre, tout comme Tesla avant eux, Fisker, Rivian ou Lucid Motors misent sur le marché des voitures premium pour se développer. Ce secteur, générant davantage de marges, leur permet de répercuter leur prix de production sur un petit volume de véhicules. Ainsi, le modèle le moins cher de Lucid Motors est à 85.000 euros. Pour Rivian, les prix tournent autour de 65.000 euros actuellement et son premier SUV électrique, lancé sur le marché européen la semaine prochaine, se situera autour des 50.000 euros. Fisker, de son côté, commercialise son SUV Ocean à partir de 44.000 euros et jusqu'à 65.000 euros. Tous ces acteurs planifient cependant de produire des véhicules moins chers dans quelques années, à un prix autour des 25.000 euros, à l'instar de celui de la voiture électrique qui va être produite par Tesla dans son usine de Berlin. Et si l'information révélée en novembre n'a pas été commentée par l'entreprise, cette dernière ne l'a pas démentie pour autant.

Se différencier par la technologie

Ces nouveaux constructeurs doivent également construire leur réseau de distribution, car la vente en ligne ne suffit pas à écouler leur production. Fisker a ainsi ouvert un point de vente à Toulouse il y a quelques semaines après celui situé à Versailles actuellement. La présence de Lucid Motors au Salon de Genève est également une vitrine intéressante pour le constructeur, dans un salon quasi-vide.

« Il y a encore beaucoup de potentiel dans le marché des voitures électriques car l'environnement est en pleine mutation. Tout le monde a une carte à jouer », insiste Alexandre Marian, directeur associé chez AlixPartners.

Pour se différencier dans la jungle des nouveaux entrants de l'électrique, notamment des constructeurs chinois, de Tesla ou des voitures premium allemandes, les nouveaux constructeurs américains doivent donc présenter de nouvelles fonctionnalités à leurs modèles.

Fisker a ainsi misé sur un toit solaire, « permettant de récupérer 2.300 kilomètres d'autonomie par an », assure la marque. Son SUV peut également se transformer instantanément en cabriolet en appuyant sur un simple bouton. Lucid Motors, de son côté, se focalise sur de nouvelles technologies de moteurs, qu'elle fournit à Aston Martin. Les nouveaux constructeurs américains parient également sur des designs plus audacieux qui, ils l'espèrent, séduiront les riches clients en quête d'exclusivité.

Mais au-delà de ces nouvelles technologies, il faudra encore convaincre sur l'électrique. Dernièrement, les voitures électriques étaient à la peine en Europe et aux Etats-Unis, et cette tendance devrait s'accentuer en 2024 suite à l'arrêt des subventions dans plusieurs pays.

Dernier échec qui pourrait refroidir les investisseurs dans ces jeunes constructeurs américains : l'arrêt de l'Apple Car cette semaine, une voiture électrique autonome annoncée en 2014. Après 10 ans et plusieurs milliards de dollars envolés, Apple souhaite plutôt se concentrer sur l'intelligence artificielle. Un choix judicieux, selon les analystes de Bloomberg Intelligence, « étant donné la rentabilité potentielle de l'IA par rapport à celle de l'automobile sur le long terme ».

Cadillac lance un SUV électrique en Europe

La marque du géant Américain General Motors (GM) a décidé de revenir en Europe le 23 mars prochain avec un SUV électrique luxueux baptisé Lyriq. Cette voiture, lancée en 2022, s'est vendue à une dizaine de milliers d'exemplaires aux États-Unis et à 5.000 unités en Chine, où elle est aussi fabriquée. Cachant un énorme moteur de 528 chevaux, la Lyriq doit embarquer une très grosse batterie pour afficher une autonomie de 530 kilomètres. Résultat : ce SUV affichera un poids de 2,7 tonnes. Ce mastodonte de 5 mètres de long est affiché à 916 .000 couronnes en Suède (environ 82.000 euros).

Parti en 2017 après la vente d'Opel à Stellantis, GM compte sur l'électrique pour faire son grand retour sur le Vieux Continent. Il a également assuré fin janvier que la production de plusieurs modèles allait augmenter et que de nouvelles versions seraient présentées courant 2024.

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Commentaire 1
à écrit le 02/03/2024 à 10:02
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Aux USA c'est compliqué vu que le carburant est peu cher car peu taxé (aux yoyos près du cours du pétrole), il faut être motivé pour passer à l'électrique, ça n'aide pas les néo-constructeurs. Sauf si ça fait geek, une 'watture' c'est une sorte de sm...

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