La crise du logement a des répercussions sur toutes les sociétés, y compris les majors du BTP cotées au CAC 40. Vinci n'échappe pas à la règle. Lors de la présentation de ses résultats annuels ce jeudi, le géant de la construction et des concessions a annoncé, pour sa filiale dédiée, un chiffre d'affaires en recul de 19% à 1,2 milliard d'euros, contre 1,5 milliard en 2022.
« Dans un environnement de taux d'intérêt élevés », Vinci Immobilier a ainsi communiqué sur une baisse de 30% de la réservation de ses logements neufs : 4.214 logements en 2023, contre 6.059 l'année précédente. Une baisse « limitée par la conclusion de ventes en blocs de logements à des organismes sociaux », type CDC Habitat, la filiale logement de la Caisse, et Action Logement. A la demande de l'Etat, ces derniers ont racheté près de 50.000 logements neufs aux promoteurs immobiliers.
Un plan de départs volontaires et un PSE en cours
Malgré cette aide, l'entité immobilière de Vinci n'a pu échapper à un plan de départs volontaires, ainsi qu'à un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE). Le président-directeur général du groupe, Xavier Huillard, n'en a pas reparlé ce matin. En revanche, il avait confirmé la rumeur à la presse, lors d'un déjeuner de vœux le 12 janvier dernier.
« Un peu tous les métiers et à tous les étages du groupe sont concernés. Nous essayons de faire cela proprement, avec du recyclage dans les autres entités du groupe », avait précisé le patron de la multinationale.
Et de faire son autocritique, ainsi que celle de l'ensemble de la profession : « La promotion a fini par croire en son propre génie en achetant du foncier avant même d'obtenir un permis de construire. Collectivement, nous avons juste eu la chance d'en vivre correctement pendant vingt ans ».
Des déclarations « assez fortes » d'Attal
C'est sans doute la raison pour laquelle Xavier Huillard a salué des « déclarations assez fortes du Premier ministre, Gabriel Attal » pour le logement. Une position qui tranche avec la filière, qui regrette une réponse politique qui ne soit pas à la hauteur des enjeux.
« C'est la première fois qu'on entend un discours de politique générale qui en parle aussi largement. C'est la preuve que la prise de conscience est là. Nous devrions avoir un ministre dans 24 à 48 heures », a rétorqué le PDG de Vinci à La Tribune.
D'ici là, il « espère » néanmoins que « les actes vont suivre », à commencer pour libérer le foncier. « Pourquoi ne mettrait-on pas de la fiscalité incitative ? », s'est interrogé Xavier Huillard, sans rappeler qu'un terrain prend de la valeur avec le temps, d'autant plus à l'heure de la politique de zéro artificialisation nette (ZAN) des sols, synonyme de raréfaction et donc de cherté des derniers fonciers disponibles.
Huillard a enfin été entendu, y compris par Macron
Autre levier selon le patron du groupe de BTP : inciter les maires. « La suppression de la taxe d'habitation [quoique compensée par de la TVA, ndlr] n'a pas été un bon signal », a-t-il souligné. Un message qu'il a déjà eu l'occasion de faire passer ces dernières années.
Xavier Huillard a aussi parié sur l'accélération des procédures, telle que promise par le locataire de Matignon, tout en insistant sur la solvabilisation des ménages. « La France a été dopée à l'avantage fiscal, mais supprimer le Pinel au milieu de la crise est un accélérateur de crise », a estimé le PDG de Vinci.
Une chose est sûre : il a enfin été entendu, et ce, même par le président Macron qui a évoqué de lui-même cette crise de l'immobilier lors de sa dernière conférence de presse. Dès juillet 2022, le patron de la société cotée avait été l'un des premiers à juger « indispensable que le logement attire l'attention rapidement du gouvernement ».
« La demande reste forte, mais nous ne produisons pas assez, entre le prix du foncier, les réticences de certains élus, les délais d'obtention des permis de construire, la purge des recours, la hausse des intérêts et l'augmentation du coût des travaux. Le fait est que la production de logements est plus difficile à un moment où le besoin reste extraordinairement fort », avait-il insisté il y a un an et demi.
Reste à savoir désormais les marges de manœuvre du futur ministre de... l'Equipement ? Bercy n'est jamais bien loin à la table du Conseil des ministres lorsqu'il s'agit de surveiller les dépenses publiques.
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