Immobilier : comment le gouvernement compte utiliser les logements locatifs intermédiaires pour résoudre la crise

L'Etat, la Caisse des Dépôts et quatorze compagnies d'assurance viennent de s'engager à débloquer près d'un milliard d'euros pour la construction de 10.000 logements locatifs intermédiaires (LLI). Pourquoi maintenant? Qui est à l'origine de cette promesse politique ? Combien vont investir chacune des parties prenantes ? Eléments de réponse.
César Armand
Selon l'Union sociale pour l'habitat, seuls 3% des résidents HLM sont éligibles aux logements intermédiaires.
Selon l'Union sociale pour l'habitat, seuls 3% des résidents HLM sont éligibles aux logements intermédiaires. (Crédits : Unsplash/Hernan Lucio)

C'est l'une des priorités d'Emmanuel Macron depuis le 10 mai 2023. Dans une interview accordée à Challenges ce jour-là, le président de la République invite à « regarder comment développer beaucoup plus de logements locatifs intermédiaires (LLI) pour baisser les prix, parce que la crise du logement se situe là ». Dix mois plus tard, l'Etat vient d'accoucher d'un milliard d'euros avec la Caisse des Dépôts et quatorze assureurs pour financer la construction de 10.000 LLI, ces logements pour les classes moyennes trop riches pour les habitations à loyer modéré (HLM) et trop pauvres pour le parc privé. Sauf que les professionnels de l'immobilier n'ont pas attendu les ministres de l'Economie Bruno Le Maire et du Logement Guillaume Kasbarian pour se lancer.

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Signature d'un pacte la semaine prochaine

Dès le lendemain de la déclaration présidentielle, CDC Habitat, la filiale logement de la Caisse des Dépôts, avait annoncé un chèque de 3,5 milliards d'euros pour commander 17.000 logements neufs aux promoteurs immobiliers, dont 12.000 logements intermédiaires (LLI). Quinze jours après, c'était au tour du premier bailleur et producteur de logement social français, Action Logement, de communiquer sur l'acquisition de 30.000 logements neufs, dont 15.000 LLI.

Selon nos informations, à présent, CDC Habitat a racheté, comme prévu, 12.000 logements intermédiaires et produit 23.000 LLI supplémentaires. De son côté, Action Logement est bien en train d'acquérir 15.000 logements intermédiaires sur la période 2023-2024, sachant qu'en parallèle, l'organisme paritaire a obtenu, l'an dernier, près de 17.000 agréments pour du LLI. CDC Habitat et Action Logement doivent aussi se retrouver le 20 mars au ministère de la Transition écologique pour la signature d'un pacte.

« Le document que nous allons signer mercredi vise à donner une feuille de route pour développer le segment du logement locatif intermédiaire en complémentarité avec le logement social. C'est une union sacrée d'acteurs publics et privés avec l'ambition de multiplier par deux la production de LLI au cours des trois prochaines années »confirme, à La Tribune, Kosta Kastrinidis, directeur des prêts de la Banque des Territoires (groupe Caisse des Dépôts).

Des engagements de Borne repris par Attal et la Caisse des Dépôts

Dès novembre 2023, en déplacement à Dunkerque (Nord), la Première ministre Elisabeth Borne avait en effet annoncé l'engagement par l'Etat et la Caisse des dépôts de 500 millions d'euros et compte sur un engagement similaire par des investisseurs institutionnels pour « doubler » d'ici à 2026 la construction de logements locatifs intermédiaires (LLI). Autrement dit, passer de 15.000 LLI chaque année à 30.000 d'ici à 2026.

Un objectif repris par son successeur à Matignon, Gabriel Attal, lors de son discours de politique générale du 30 janvier 2024. Devant l'Assemblée nationale, le nouveau Premier ministre a déclaré faire entrer du logement intermédiaire dans les communes soumises à la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU). Ce texte impose à certains maires de détenir 25% de logements sociaux sur leur territoire. Selon toute vraisemblance, un projet de loi sera présenté « avant l'été » en ce sens.

Le gouvernement compte aussi sur la Caisse des Dépôts qui s'est d'ailleurs engagée, dès la fin de l'année dernière, à apporter 250 millions d'euros dans un fonds dédié à la production de logements intermédiaires baptisé FLI3, opéré par CDC Habitat et géré par Ampère Gestion. « Le fonds lèvera de la dette et les fonds propres permettront d'augmenter la capacité d'investissement pour produire et mettre en gestion locative et ainsi répondre au besoin des classes moyennes »poursuit Kosta Kastrinidis, le directeur des prêts de la BDT.

Financer les bailleurs sociaux

Surtout, le gouvernement veut actionner le levier du financement public en pleine période de crise des crédits, freiné par la hausse des taux d'intérêts. Dans cette optique, la Banque des territoires a déjà débloqué 5 milliards d'euros pour la période 2023-2024 après y avoir été autorisée par Bercy. « Nous sommes ainsi devenus le principal financeur de logement intermédiaire auprès des bailleurs sociaux soit pour leur patrimoine direct soit pour leurs filiales. Quel que soit l'emprunteur, nous prêtons au taux de livret A + 140 points », explique Kosta Kastrinidis, son directeur des prêts.

Avec un montant moyen de 5,85 millions d'euros, les prêts bénéficient d'un différé d'amortissement jusqu'à 20 ans. « Cela laisse le temps de construire le logement, de percevoir les loyers avant de rembourser le capital »justifie Kosta Kastrinidis de la Banque des territoires.

Les assureurs autour de la table

De leur côté, une dizaine d'assureurs s'est également engagée à investir directement ou indirectement dans le LLI.

« La présence des assureurs (dans le plan du gouvernement annoncé jeudi, NDLR) est une bonne nouvelle. Ils pourront soit investir dans le FLI3, soit choisir un autre véhicule, soit investir en direct. Ampère ne fait pas de prêts mais réalisera une levée de fonds, complémentaire aux 250 millions de la Caisse des Dépôts, auprès des assureurs qui le souhaitent »souligne Kosta Kastrinidis de la Banque des territoires.

Tout est donc désormais presque prêt pour relancer les LLI, pilier du plan des macronistes pour résoudre la crise du logement. D'autant que le projet de loi de finances 2024 a permis d'étendre le régime du logement locatif intermédiaire à de nouveaux territoires, à la rénovation de l'habitat ancien, et aux résidences gérées à destination des étudiants, des jeunes actifs ou des seniors, mais le gouvernement doit en préciser le détail mercredi prochain.

Reste que ce produit ne fait pas l'unanimité. Selon l'Union sociale pour l'habitat, seuls 3% des résidents HLM sont éligibles aux logements locatifs intermédiaires.

César Armand

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Commentaires 5
à écrit le 16/03/2024 à 8:26
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si le gouvernement avait protégé les propriétaires contre les mauvais locataires nous n'aurions pas de problèmes .

à écrit le 16/03/2024 à 7:18
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d'un autre cote il existe un parc immobilier certe ancien mais disponible que l'on a flingué et sur le quel on s'archarne en ne permettant pas le financement a des couts raisonnables de la renovation et pour lesquels les loyers sont au meme n...

à écrit le 15/03/2024 à 20:06
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Actuellement on est tombé a environ 200000 logements neufs par an. Le besoin que tout le monde estime (sauf les truffes du gouvernement) c'est 400000 par an sur des dizaines d'années. Et eux il nous sortent 30000 logements fier comme Artaban. On n'es...

à écrit le 15/03/2024 à 19:43
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bon, 10.000 logements, qu'on va etaler, allez, sur 3 ans, entre les formalites, les declarations, le financement et les mises en chantier, bon, ben ca fait 3000 logements par an........wow, de l'efficacite a la francaise.......remarquez, ca repousse ...

le 16/03/2024 à 10:01
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Macron est un banquier : il nous couvre de dettes et nous fait payer des agios.

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