La transformation de bureaux en logements en voie d’accélération ?

Trois ans après la signature d'une première charte entre le gouvernement et dix acteurs de l'immobilier, 417.000 mètres carrés de logements issus de bureaux ont fait l'objet de permis de construire. De son côté, la ville de Paris vient de lancer un appel à projets portant sur 60.000 mètres carrés.
César Armand
Cet ancien garage Citroën PSA de 6.500 m² situé 62, avenue de la République (Paris XIè), devrait accueillir, à terme, au moins 60% de logements sociaux et 20% de logements libres.
Cet ancien garage Citroën PSA de 6.500 m² situé 62, avenue de la République (Paris XIè), devrait accueillir, à terme, au moins 60% de logements sociaux et 20% de logements libres. (Crédits : Ville de Paris)

Hasard ou coïncidence, le gouvernement comme la ville de Paris ont communiqué, ce 9 février, sur le souhait d'« accélérer » la transformation de bureaux en logements. Deux heures avant la visioconférence de presse du premier adjoint d'Anne Hidalgo, Emmanuel Grégoire, et de son collègue chargé du Logement, Ian Brossat, c'est Emmanuelle Wargon qui a envoyé la première son communiqué.

« Alors que l'essor significatif du télétravail incite à changer d'échelle, la ministre déléguée au Logement a réuni des professionnels de l'immobilier pour faire un bilan des actions menées et accélérer la transformation en logements des bureaux vacants », est-il écrit dans une déclaration transmise aux journalistes.

417.000 m² ont fait l'objet de permis de construire

En mars 2018, son prédécesseur Julien Denormandie avait en effet signé une charte avec les foncières, investisseurs et promoteurs Bouygues Immobilier, Vinci Immobilier, Compagnie de Phalsbourg, La Française, Emerige, Gecina, Spie Batignolles, Icade, Kaufman & Broad et Novaxia, afin de trouver 500.000 mètres carrés de bureaux d'ici à 2020 et d'en faire 5.000 à 10.000 logements d'ici à 2022.

Suite à une réunion vendredi dernier avec ces dix acteurs, l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF), l'Union sociale pour l'Habitat (USH), le groupe Action Logement, la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), il en ressort que 417.000 m² de logements issus de bureaux ont fait l'objet de permis de construire.

Dans le détail : 190.000 m² dans les agglomérations régionales (46%) et 110.000 m² dans le Grand Paris (26%). Les foncières, investisseurs, promoteurs signataires de la charte en 2018 ont, elles, engagé 85.000 m² de logements.

Quant à la foncière de transformation immobilière lancée par Action Logement, elle est en négociation pour la création de 101.000 m² de logements, dont 42.000 m² contractualisés. Selon nos informations, 31 opérations sont en cours pour un potentiel de 2.700 habitats, sachant que cette entité dispose d'une enveloppe de 1,2 milliard d'euros d'ici à 2024.

Vers la mise en place de mesures de simplification ?

« Emmanuelle Wargon a insisté sur la nécessité d'accélérer considérablement cette dynamique. En effet, d'une part, produire davantage de logements est un impératif pour soutenir une offre suffisante et, d'autre part, transformer les constructions existantes est un moyen de limiter l'étalement urbain, de prévenir la crise climatique et de préparer la résilience des villes », dit encore le ministère du Logement.

Ce rendez-vous en appellera d'autres. Les pouvoirs publics et les acteurs privés se sont mis d'accord sur une feuille de route pour améliorer la connaissance du parc de bureaux, mettre en place des mesures de simplification - « qui pourront faire l'objet de propositions législatives » - et renforcer la mobilisation des élus des territoires concernés. D'autant que le plan de relance national comporte 350 millions d'euros pour les « maires densificateurs » et 300 millions d'euros pour le recyclage des friches.

6 sites parisiens d'un total de 60.000 m²

Anne Hidalgo avait, elle, annoncé, lors de ses vœux 2021 du 13 janvier, son intention d'accélérer la cadence. La Ville « transformera des espaces de bureau en logements accessibles pour les Parisiennes et les Parisiens, parce que c'est leur première préoccupation, c'est là que naissent les difficultés », avait déclaré la maire (PS) de Paris.

Trois semaines plus tard, son premier adjoint (PS) chargé de l'architecture et de l'urbanisme Emmanuel Grégoire et son adjoint (PCF) au logement Ian Brossat viennent de dévoiler un nouvel appel à projets dédié. Dans un premier temps, six sites, dont deux appartenant à la Ville, vont être transformés en logements, notamment sociaux. Au total, il s'agit de près de 60.000 m² de surfaces de plancher, « mais d'autres sites vont entrer au fur et à mesure », assurent les maires-adjoints.

L'un d'entre eux est l'ancienne boutique Tati, située au pied du métro aérien Barbès-Rochechouart à l'angle des Xè et XVIIIème arrondissements. « Le futur rez-de-chaussée a vocation à garder une ouverture sur la Ville », a d'ores et déjà prévenu le premier adjoint (PS) d'Anne Hidalgo. Les autres lieux sont une partie du siège de l'AP-HP, en face de l'Hôtel de Ville, ainsi que deux garages automobiles propriétés de Renault (Paris XVè) et de PSA (Paris XIè).

Les élus parisiens se refusent néanmoins à évoquer la quantité de logements prévus - « ça dépend des typologies » - ou même un calendrier, même si Emmanuel Grégoire et Ian Brossat témoignent de « [leur] ambition d'aller le plus vite possible ».

350.000 m² déjà transformés depuis 2014

Pour autant, la capitale ne part pas de rien, comme aime à le répéter l'adjoint (PCF) au Logement d'Anne Hidalgo. Entre 2014 et 2020, ont été transformés 350.000 mètres carrés, dont un tiers pour les bailleurs sociaux, au lieu des 200.000 m² prévus. La Ville a notamment été aidée par l'Etat qui lui a cédé, moyennant décote, des biens immobiliers comme le siège historique du ministère de la Défense dans le VIIè arrondissement, celui de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) ou celui de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO).

« Nous sommes convaincus que cette filière peut être productive dans un contexte de raréfaction du foncier et d'une tolérance à la construction neuve qui diminue », affirme Ian Brossat.

L'assurance-vie à la rescousse

En réalité, depuis qu'ils ont tous deux participé au lancement du premier fonds d'assurance-vie dédié, la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, comme le premier adjoint d'Anne Hidalgo, Emmanuel Grégoire, affichent cette ambition. Avec AG2R La Mondiale, Generali, Suravenir (Crédit Mutuel Arkéa) et Spirica (Crédit Agricole Assurances), le groupe Novaxia, spécialisé dans le recyclage des actifs et friches obsolètes, y a annoncé vouloir investir 1 milliard d'euros d'ici à 2024.

Le potentiel s'avère énorme, à en croire une étude de l'Institut de l'épargne immobilière et foncière (IEIF) selon laquelle 41% des entreprises devraient poursuivre le télétravail au moins deux jours par semaine et donc réduire leur surface globale de 27%. Rien qu'en Île-de-France, cela libérerait 3,3 millions de mètres carrés. Soit quatre fois plus que les 900.000 m² de bureaux vacants actuellement.

A quelques heures de la présentation en Conseil des ministres du projet de loi Climat et Résilience, qui découle de la Convention citoyenne pour le Climat, l'exécutif comme la Ville de Paris veulent également montrer qu'il est possible de reconstruire la ville sur la ville, tant cela permet d'éviter de laisser des bâtiments à l'abandon que de lutter contre l'artificialisation des sols. Cela est 100% écologique et n'a rien de politique.

Lire aussi : La Covid-19 va-t-elle accélérer la transformation de bureaux en logements ?

César Armand

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 10/02/2021 à 13:01
Signaler
quand le teletravail aura pris suffisamment d'importance, on se rendra compte que c'est inutile d'etre au centre de villes interdites a la circulation les gens auront bouge partiellement en restant chez eux, les centres decisionnels suivront; un peu...

à écrit le 10/02/2021 à 8:58
Signaler
Mais c'était quoi cette mode débile de foutre des bureaux partout à la base ? -_-

le 10/02/2021 à 13:15
Signaler
C'est tout simple, c'est parce que c'est qui rapporte le plus pour les méchants capitalistes. Les bureaux c' est : 1) des revenus réguliers avec les locataires qui payent et qu'on peut virer plus facilement, 2) moins d' obligation vis à vis des lo...

le 11/02/2021 à 15:37
Signaler
"c'est parce que c'est qui rapporte le plus pour les méchants capitalistes" Heu... vous auriez pas des problèmes vous ? Un solide sentiment de persécution peut-être non ? Bref, yaurait pas quelqu'un de normal pour me répondre svp ? Merci.

à écrit le 09/02/2021 à 20:58
Signaler
Quand on sait que Paris est une des villes les plus denses au monde, on peut s'interroger sur la nécessité de ces opérations, sauf a vouloir y placer des personnes redevables qui voteront comme il faut aux prochaines élections.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.