Logement : un rapport propose d'affaiblir le droit de propriété pour contenir les prix

Le député Lagleize (Modem) a remis au gouvernement son rapport sur la maîtrise du foncier. Il y défend un "changement fondamental de paradigme sur le droit de propriété".
(Crédits : © Benoit Tessier / Reuters)

Renforcer le pouvoir des élus locaux pour limiter les prix du logement, moyennant certains affaiblissements du droit de propriété: c'est la philosophie d'ensemble d'un rapport d'un député de la majorité, dont plusieurs mesures ont des chances d'être traduites dans la loi.

En son coeur, figure une proposition qui modifierait profondément la notion de propriété: elle permettrait, dans certaines zones, de distinguer la possession d'un terrain, qui serait publique, et celle du logement bâti dessus, laissée au propriétaire.

"Nous ne devons plus laisser la seule loi de l'offre et de la demande, conjuguée à la cupidité humaine traditionnelle, créer une bulle d'enrichissement de quelques-uns", a affirmé le député centriste Jean-Luc Lagleize (Modem), dans ce rapport qu'il a remis mercredi au gouvernement.

Il défend un "changement fondamental de paradigme sur le droit de propriété", pilier des droits de l'Homme de 1789 et sujet par essence sensible dans un pays dont plus de la moitié des ménages sont propriétaires.

M. Lagleize était chargé par le Premier ministre, Edouard Philippe, d'étudier comment endiguer la hausse des prix du foncier, c'est-à-dire les terrains sur lesquels sont ensuite construits les logements.

Cette composante se traduit mécaniquement dans le prix d'ensemble: les promoteurs immobiliers répercutent dans leurs tarifs le montant auquel ils ont acheté le terrain.

Lire aussi : Maîtriser le foncier ? Les pistes de réflexion explosives du député Lagleize

Contenir la flambée de l'immobilier

Quel poids joue le foncier dans la hausse générale des prix de l'immobilier français, qui perdure depuis des années et touche d'abord de grandes villes comme Paris ? Les études existantes n'ont qu'un champ limité. M. Lagleize suggère d'ailleurs la création d'observatoires publics pour dresser un diagnostic fiable.

Mais les professionnels, tels les promoteurs, s'accordent à en faire l'un des principaux coupables de la flambée de l'immobilier.

Faut-il directement chercher à limiter la hausse des prix des terrains, ou bien partir du principe que cette flambée a des causes de fond, en premier lieu un manque d'offre, auxquelles il faut aussi remédier ?

Ces deux approches figurent inégalement parmi la cinquantaine de mesures suggérées par M. Lagleize: du côté de l'offre, il propose d'encourager à réhabiliter les terrains vagues, via un fonds dédié.

C'est néanmoins la lutte directe contre la hausse des prix qui concentre les mesures les plus saillantes: le rapport évoque une "surenchère", que les terrains soient vendus par des institutions publiques ou par des propriétaires privés.

Redonner la main aux collectivités

Une mesure, déjà suggérée par Matignon dans sa lettre de mission, vise ainsi à mettre fin à la vente aux enchères de terrains publics, jugée inflationniste. Mais, pour le reste, le rapport penche plutôt pour renforcer les pouvoirs locaux face aux prérogatives des propriétaires privés.

C'est dans cette démarche que s'inscrit la proposition qui permettrait aux collectivités locales de conserver la propriété de terrains, en ne laissant au propriétaire que celle des murs. Là encore, la piste avait été donnée par Matignon.

La disposition, qui vise à sortir le prix des terrains du marché immobilier, passerait par la création d'organismes "fonciers" publics. Ils seraient obligatoires dans les zones dites "tendues", où l'offre de logements est jugée insuffisante par rapport à la demande.

Ce principe existe déjà, notamment à Lille où il est expérimenté depuis deux ans, mais il est limité aux dispositifs d'accession sociale à la propriété, c'est-à-dire sous conditions de ressources. Il s'agirait de l'étendre à tous types d'opérations.

Une loi Modem proposée le 28 novembre à l'Assemblée

Peut-on encore parler de propriété, quand il s'agit de fait d'être locataire d'un terrain public et de détenir un droit d'usage dont le prix serait, de plus, encadré ? Le rapport consacre plusieurs pages à argumenter juridiquement que la mesure n'enfreindrait pas la Constitution si elle se concentre sur les zones tendues, au motif de "l'intérêt général".

D'autres mesures sont de nature à faciliter les procédures donnant lieu à des expropriations ou à limiter l'indemnisation que peut demander le propriétaire dans ce cas de figure.

Reste à évaluer l'avenir législatif du rapport. Les principales mesures feront l'objet d'une proposition de loi le 28 novembre par les députés Modem.

Son sort dépendra logiquement des élus du parti présidentiel, La République en Marche (LREM), bien plus gros partenaire au sein de la majorité: en orientant ses principales mesures autour de suggestions données par Matignon, son auteur s'est ouvert la voie à un accord bienveillant.

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Commentaires 30
à écrit le 07/11/2019 à 16:34
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Grande banlieue. 60km du périphérique. 800m2 vendu à 100.000 euros. Quel budget reste-t-il pour la maison pour des classes moyennes ? C'est l'un des sujets pour le logement.

à écrit le 07/11/2019 à 13:24
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C'est effarant de groupthink. Ler problème ce sont les mairies qui bloquent le foncier, via le POS/PLU... C'est le même problème en califormie et Micheal shellenberger l'explique bien. Un exemple à suivre c'est celui du japon qui a dégonflé sa b...

le 08/11/2019 à 8:51
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Dans le système actuel ,seul les promoteurs créent leur marché en laissant croire aux acquéreurs qu'ils sont soumis à la loi du marché....et les prendre pour des gloglos..!

à écrit le 07/11/2019 à 11:17
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Il est inévitable que le droit de propriété soit progressivement remis en question.Pour une simple raison:le gouvernement fait du déficit avec l'accord tacite des français qui en profitent largement.Il est donc logique que l'état récupère une partie...

à écrit le 07/11/2019 à 10:51
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Il faut voir une chose : en Europe de l'Est on peut construire sur un terrain agricole, et les normes pour la construction sont moins strictes. Pour cette raison le prix du foncier est de l'ordre de 2€/m2 à 35 minutes de TER des capitales. Et comme l...

à écrit le 07/11/2019 à 10:08
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Encore un pas de plus vers la soviétisation de la France déjà bien avancée! Les leçons de l'histoire sont rarement retenues. Le découplage entre l'efficacité économique et les revenus est de plus en plus flagrant et explique nos déséquilibres comme c...

à écrit le 07/11/2019 à 9:50
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Et maintenant ils s'attaquent au seul droit qui nous restait encore vraiment de la Révolution Française : le droit de propriété ! Les Marquis qui nous gouvernent rêvent de l'ancien régime où les nobles détenaient la terre et acceptaient contre gabel...

à écrit le 07/11/2019 à 7:46
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A lyon une bonne part du foncier est en fit détenu par l'église et les hospices civils loué en bail emphytéotique et les prix ont quand même suivis. En plus on a déjà vu la formation des prix avec la loi egalim (ah ah ah), les grands projets en zones...

à écrit le 07/11/2019 à 7:23
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La France est devenu,compte tenu du nouveau de pression fiscale,une république socialiste. Des lors rien de surprenant de lire dans les rapports parlementaires que le coupable est le droit de priorité. « La propriété c’est le vol » écrivait un funest...

à écrit le 07/11/2019 à 3:54
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Il y a differents marchés en France: Paris, Les grandes villes et les petites villes. Ce qui faut contenir c'est Paris et les grandes villes. Pourquoi les taxes foncieres et habitation sont moins cher a Paris!? Arretons de tapez sur les proprietair...

à écrit le 07/11/2019 à 1:53
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Les Jacobins dans toute leur splendeur ! Comme si les 52% de propriétaires étaient des spéculateurs ! Réduire tous les jours un [peu plus les droits, c'est s'acheminer vers la dictature. Même les Russes en sont revenus en privatisant les logements da...

à écrit le 07/11/2019 à 0:07
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Ce sont bien sûr les maires et les services techniques de l’état qui bloquent les permis de construire. Trop de nouveaux habitants fragilisent la réélection du maire. Donner plus de pouvoir aux élus (la mafia de l'immobilier selon certains commenta...

à écrit le 06/11/2019 à 22:02
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C’est peut-être une solution Pour lutter contre les mafias de l immobilier C est une idée déjà appliquée à rennes La ville garde le terrain et donc le droit de refuser la revente Vous construisez dessus et lors de la revente vous ne pouvez pas ...

à écrit le 06/11/2019 à 20:50
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et vous pensez vraiment que les gens vont dépenser des centaines de milliers d€ pour bâtir un logement sur un terrain qu'ils ne possèdent pas et dont ils pourraient être expropriés sans raison et quasiment sans indemnité? Il y en a qui rèvent... ...

le 07/11/2019 à 1:58
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Ce n'est pas une solution jacobine. Pour les Jacobins, il faut tout prendre et soviétiser.

à écrit le 06/11/2019 à 19:08
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C'est la croissance économique qui en dépend au pire on peut se passer d'une hausse des salaires mais l'immobilier est beaucoup trop cher du fait de la seule spéculation, en le réduisant de 50% nous faisons exploser la croissance. Mais bon faut e...

à écrit le 06/11/2019 à 19:00
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Cette proposition est clairement faite pour faciliter la vente des logements HLM qui sont de très mauvais investissements... Ils n'ont même pas le courage de l'avouer, pitoyable!

à écrit le 06/11/2019 à 18:03
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pourquoi faire simple alors qu on peut faire compliqué ? Si on veut vraiment faire baisser les prix de l immobilier (pas evident vu que l envol des prix a beneficie a certains, notamment les boomers qui vendent au prix fort) il suffit de limiter le ...

à écrit le 06/11/2019 à 17:47
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Que des locataires égale la fin de la taxe d'habitation (il faut l'espérer pour les 20% qui la payent encore intégralement) l'année prochaine. D'un côté on fait semblant de privatiser la Française Des Jeux, de l'autre on envisage de nationaliser le s...

à écrit le 06/11/2019 à 17:41
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Cette proposition revient à transformer l'état français en landlord anglais. Cela n'endiguera pas plus la spéculation en France qu'en Angleterre. De plus l'état, personne publique, n'a jamais été vertueux et ne le sera jamais.

à écrit le 06/11/2019 à 17:38
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ah, le vil tour de passe passe sovietique bon, sur le fond, ca existe deja, pas besoin d'un rapport idiot fait par des idiots ( certainement grassement payes quand meme) ca s'appelle bail emphyteotique personne n'empeche l'etat de faire un tas de ...

à écrit le 06/11/2019 à 17:02
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Ubériser le logement par exemple..

à écrit le 06/11/2019 à 16:51
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Bonjour, Si l’état reste propriétaire du terrain et le propriétaire - location ne sera jamais propriétaire à 100% : En fait c’est déjà le cas maintenant avec la taxe foncière que les propriétaires payent à vie même après la «  mort » sauf à partir ...

à écrit le 06/11/2019 à 16:29
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La baisse de spéculation immobilière, ne nous "TRUMP-PONDS" plus, ne peut commencer que par la baisse des surpopulations urbaines pour ramener ce monde à des villes de pas plus d'un million d'habitants. Donc d'un contrôle rigoureux des naissances en ...

à écrit le 06/11/2019 à 16:08
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La fin de la féodalité

à écrit le 06/11/2019 à 16:05
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Bail emphytéotique pour les terrains publics, c'est un peu le système de propriété a l'anglaise freehold leasehold, qui soit dit en passant n'a absolument pas évité l'explosion des prix a londres. Reste toujours ce petit gout de loyer fictif si cher...

le 06/11/2019 à 16:36
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Il y aurai pourtant une solution simple, mettre une part étatique sur la taxe foncière du foncier bâti. Pas besoin de créer un nouvel impôt, une nouvelle taxe, juste rajouter une ligne a une taxe pré existante. J'vous l'dis, j'aurai pas fait lapin...

à écrit le 06/11/2019 à 16:02
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Après quoi ce sera aussi le logement qui deviendra public. Si c'est fait de façon assez tordue et opaque, si possible en y injectant de l'écologie et de l'anti-terrorisme, il y a des chances pour que ça plaise au gouvernement. D'autant plus que ca...

à écrit le 06/11/2019 à 15:43
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Le retour du communisme

le 06/11/2019 à 16:09
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Au constat de ce qui se passe économique, a mon avis il y a pas 36 solutions. A ceux qui pensaient que la rente pourrait se faire sans aucune forme de variation, dans tout les cas les chiffres actuels n'ont plus rien a voir avec l'économie. Auc...

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