Transition énergétique : le patron de l'AIE enjoint l’industrie nucléaire de « respecter les délais et les coûts »

Fatih Birol, le directeur exécutif de l’Agence internationale de l'énergie (AIE), appelle les industriels du nucléaire à tenir leurs calendriers. Selon le scénario « Net Zero » de l'agence, le rythme de déploiement de nouvelles capacités nucléaires doit être multiplié par quatre d'ici à 2030 pour tenir les objectifs de lutte contre le changement climatique.
Juliette Raynal
Fatih Birol, le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie, au parlement européen en mars 2023.
Fatih Birol, le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie, au parlement européen en mars 2023. (Crédits : Reuters)

« De nombreux acteurs de l'industrie nucléaire ont la réputation de ne pas livrer leurs projets à temps et de coûter plus cher que ce qui était prévu. Il s'agit donc, à mon avis, d'un moment historique pour l'industrie nucléaire (...). La balle est dans leur camp », a lancé Fatih Birol, le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), ce lundi 18 septembre, lors d'une rencontre organisée par l'Association des journalistes de l'énergie.

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« L'industrie nucléaire doit désormais respecter les délais et les coûts », a-t-il martelé, après avoir constaté le retour du nucléaire partout dans le monde, soutenu par l'urgence climatique (l'atome civil étant une des énergies les plus décarbonées) et les questions de souveraineté énergétique.

« Il y a deux ans, je me souviens très bien, il y avait une conférence mondiale sur le nucléaire. Lors de l'inauguration de cette conférence, j'ai déclaré que nous voyions des signes de retour du nucléaire. Aujourd'hui, je peux vous dire que le nucléaire revient et qu'il revient en force », a-t-il affirmé.

La Chine, bientôt devant les Etats-Unis

Le patron de l'AIE a notamment fait référence à l'engouement pour le nucléaire de la France, de certains pays d'Europe centrale, mais aussi de la Suède, de la Finlande, du Royaume-Uni, des Etats-Unis et du Canada. Il a également cité le cas du Japon et de la Chine.

« Le Japon redémarre ses centrales nucléaires les unes après les autres. La Chine est en train d'augmenter considérablement son parc nucléaire. Et, il est surprenant de constater que dans cinq ans environ, la Chine dépassera les États-Unis en tant que première puissance nucléaire du monde », a souligné Fatih Birol, qui entame son troisième mandat à la tête de l'AIE.

« L'année dernière, les nouvelles capacités nucléaires installées ont augmenté de 40% par rapport à l'année précédente. Ce qui représente une très forte augmentation. Et nous nous attendons à ce que cela continue », a-t-il fait valoir.

Multiplier par quatre le rythme de déploiement

Dans le détail, 7,9 gigawatts (GW) de nouvelles capacités nucléaires ont été mis en service en 2022, contre 5,6 GW en 2021. L'année dernière, six réacteurs ont ainsi été achevés et raccordés au réseau électrique : 2 en Chine, 1 en Finlande, 1 en Corée, 1 au Pakistan et 1 au Emirats arabes unis.

Toutefois, dans son scénario « Net Zero », l'AIE prévoit un rythme de nouvelles constructions beaucoup plus soutenu, avec un déploiement annuel quatre fois plus important d'ici à 2030, explique l'agence sur son site. Autrement dit, le monde devrait construire 32 GW de capacités nucléaires supplémentaires chaque année jusqu'à la prochaine décennie.

Dans cette optique, l'AIE mise sur les grands réacteurs de puissance, à l'image des six réacteurs de type EPR2 qu'entend construire la France, mais aussi sur les petits réacteurs ou SMR pour Small modular reactors.

Prudence sur les petits réacteurs nucléaires

Sur ce point, Fatih Birol affiche toutefois une certaine prudence, affirmant que ce serait une « grande surprise » si les nombreuses entreprises engagées dans cette course parvenaient à proposer une offre aboutie, à la fois sur le plan technologique et économique, « avant 2030 ». « Certains sont beaucoup plus optimistes, mais je pense que 2030 est déjà une bonne échéance », a-t-il précisé.

Plus largement, l'AIE estime qu'un triplement des investissements dans l'énergie nucléaire est nécessaire d'ici à 2030. En 2022, les capacités de production nucléaire s'élevaient à 414 GW. Elles ont assuré environ 10 % de la production mondiale d'électricité.

Juliette Raynal

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Commentaire 1
à écrit le 18/09/2023 à 19:30
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Les objectifs de "lutte contre le changement" climatique est un faux prétexte car il s'agit de s'adapter au changement pour plus de sobriété et résilience.

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