French Bee mise sur les Etats-Unis pour achever son développement

Avec l'ouverture de Los Angeles ce printemps et de Miami cet hiver, French Bee continue de se développer sur les Etats-Unis et semble en passe d'atteindre les objectifs fixés lors de son lancement en 2016. Cet hiver, la compagnie low cost long-courrier disposera d'un réseau de six destinations, dont quatre américaines, au départ de Paris desservi par une flotte de six A350. Pourtant, ce mouvement de croissance rapide pourrait bien en rester là pour le moment.
Léo Barnier
La flotte de French Bee va atteindre sa taille critique avec un 6e Airbus A350 en décembre.
La flotte de French Bee va atteindre sa taille critique avec un 6e Airbus A350 en décembre. (Crédits : Dylan Agbagni (CC0)/ via Wikipedia)

"Nous avions écrit un scénario où French Bee aurait six avions". Etabli par l'actionnaire Jean-Paul Dubreuil, président du Groupe Dubreuil Aéro, et Marc Rochet, président de la compagnie, lors du lancement de la compagnie low cost long-courrier en 2016, cet objectif est désormais en passe d'être atteint. Le sixième Airbus A350 arrivera cet hiver. Et pour le remplir, French Bee mise à nouveau sur les Etats-Unis. Alors que le premier vol à destination de Los Angeles s'apprête à décoller le 30 avril, la compagnie vient d'annoncer l'ouverture de Miami en décembre. French Bee devrait alors avoir atteint un palier dans son développement.

En ouvrant coup sur coup Los Angeles et Miami, Jean-Paul Dubreuil estime "être en train de rattraper le retard" pris pendant deux ans avec la crise du Covid-19. Avec San Francisco, lancé en 2017, essentiellement pour toucher Papeete en Polynésie française, puis New York l'an dernier, French Bee commence à disposer d'un réseau américain développé. Cet été, elle desservira New York en quotidien, Los Angeles jusqu'à six fois par semaine et San Francisco trois fois. Et cet hiver, dès la réception de son dernier A350 le 15 décembre, la compagnie ajoutera Miami avec trois vols hebdomadaires.

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Un marché de taille

Un choix justifié d'abord par la taille du marché américain. French Bee s'est ainsi positionnée sur des villes offrant un gros volume de passagers et capables de soutenir des vols à l'année. Ce qui n'est pas le cas pour les villes canadiennes par exemple, si ce n'est Montréal. Selon Jean-Paul Dubreuil, cet accent mis sur les Etats-Unis s'imposait aussi par la nécessité de disposer "d'un bouquet de destinations, sous peine de ne pas être crédible".

Comme le rappelle Marc Rochet, ce développement sur le marché américain est largement facilité par les outils numériques qui permettent de commercialiser sur place avec des équipes réduites. D'ailleurs la ligne sur New York, lancée à l'été 2021 alors que l'entrée de ressortissants étrangers aux Etats-Unis était quasiment impossible, n'a fonctionné qu'avec des passagers américains jusqu'à la levée des restrictions en novembre. Et plus de la moitié des ventes se fait encore aux Etats-Unis aujourd'hui.

French Bee n'entend pas pour autant délaisser son cœur de cible, à savoir la desserte des territoires d'Outre-mer avec Papeete en Polynésie française et surtout Saint-Denis de la Réunion. Jean-Paul Dubreuil a d'ailleurs vanté la solidité de ce marché en dépit de la crise. Avec un potentiel de 1,3 ou 1,4 million de passagers, la ligne vers La Réunion est ainsi la plus grosse du réseau. French Bee y a logiquement affecté son A350-1000 - le plus gros appareil de sa flotte avec 480 sièges, les 4 autres étant des A350-900 de 411 sièges. Et le deuxième "1000" sera également déployé vers l'île australe.

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La taille critique atteinte cette année

Après cette phase de développement, French Bee pourrait bien ne pas chercher à aller plus haut et se mettre en palier pour chercher sa vitesse de croisière. "Nous n'avons pas écrit la suite, car cela fait déjà beaucoup d'objectifs avec l'utilisation à fond de nos six avions avec une moyenne de 5.200 heures de vol par an", explique Jean-Paul Dubreuil. Il poursuit : "Nous avons montré que nous étions capables d'aller jusqu'au bout de notre démarche, mais nous estimons aussi que nous n'irons pas plus loin. Le périmètre de notre flotte nous paraît être déjà grandement suffisant dans le cadre de notre compagnie familiale. Est-ce que big is beautiful? Je n'en suis pas sûr." Il estime ainsi que French Bee atteint sa taille critique.

Questionné sur la nécessité de l'arrivée d'un nouvel investisseur pour se projeter à nouveau sur des développements, Jean-Paul Dubreuil évoque le rapprochement raté avec CMA-CGM l'an dernier : "Cela aurait pu être une solution, mais je me félicite aujourd'hui de ne pas être allé plus loin car nous n'avons pas du tout le modèle même si nous sommes des groupes familiaux. Ce n'est pas facile. Notre réussite vient aussi de notre réactivité et de l'agilité de l'actionnariat." Et il ne semble pas mécontent non plus "à une époque d'avoir raté le mariage avec Corsair".

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Pas de retour dans le vert en 2022

French Bee, comme sa grande sœur Air Caraïbes, doit déjà se concentrer sur le retour aux bénéfices. Après avoir été dans le vert pendant des années, le groupe Dubreuil Aéro a été durement touché par la crise sanitaire. Face aux pertes, il a dû recapitaliser ses deux compagnies à hauteur de 15 millions d'euros chacune fin 2021. Cela devait permettre un retour à l'équilibre cette année, mais il faudra vraisemblablement attendre un exercice de plus.

Le premier trimestre, marqué par le variant Omicron puis la guerre en Ukraine, a en effet été très compliqué. Le niveau de réservations sur les premières semaines a été assez faible, tandis que le prix du carburant a explosé. Même si les ventes s'accélèrent fortement depuis quelques semaines, cela ne devrait pas suffire pour basculer dans le vert sur l'ensemble de l'année.

Cela n'empêche pas Marc Rochet de saluer une "vraie reprise de la demande". Selon lui, les niveaux d'engagement sur la plupart de ses routes rejoignent, voire dépassent ceux de 2019. Tous les segments semblent sur la même dynamique, même s'il y a une différence de quelques semaines en raison de délais de réservation plus courts sur les Etats-Unis. Le patron de French Bee précise que cela impose à ses équipes d'avoir une grande agilité dans la gestion des capacités. Ainsi, ne sont confirmés que les vols où la marge sur les coûts variables est positive.

Des coûts variables qui augmentent avec l'envolée des prix du kérosène. Le poste carburant a ainsi doublé en un an pour atteindre 28 % des coûts. D'autant que French Bee avait décidé de réduire son niveau de couverture sur ses achats de carburant, après avoir été pris au dépourvu par la chute des prix et l'arrêt des vols en 2020. Elle a donc dû se résoudre à augmenter les prix d'environ 10 % chez Air Caraïbes pour absorber le surcoût sans tuer la reprise dans l'œuf et rester compétitive face à la concurrence, notamment les compagnies américaines qui ont reporté les hausses sur les vols domestiques mais pas sur les internationaux. Toutefois, Marc Rochet concède qu'il faudra aller plus loin, peut-être jusqu'à 14 ou 15 % : "Jusqu'à présent, le marché a répondu, mais il faudra bien que l'on s'adapte à ces prix de carburant extrêmement élevés".

Léo Barnier

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Commentaire 1
à écrit le 29/04/2022 à 20:05
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Ce n'est ni le covid ni les écologistes qui nuisent au transport aérien ! Il était déjà mal en point en 2019, le covid l'a achevé en 2020. Les raisons ? Un modèle économique imbécile, le «bas-coût/bas-prix» (low-cost). Les prix des billets étant infé...

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