RER métropolitains : des gouvernances et des financements à préciser

Jean-Marc Zulesi, rapporteur de la loi sur les services express régionaux métropolitains (Serm) promulguée le 27 décembre 2023, laisse aux territoires le soin d'organiser les structures locales de gouvernance des futurs RER métropolitains. Malgré ses difficultés au démarrage, le RER de Strasbourg est érigé en exemple.
Le Réseau express métropolitain européen (Reme) de Strasbourg offre entre 640 et 650 trains supplémentaires chaque semaine. L'ambition initiale de 1.000 trains a été revue à la baisse.
Le Réseau express métropolitain européen (Reme) de Strasbourg offre entre 640 et 650 trains supplémentaires chaque semaine. L'ambition initiale de 1.000 trains a été revue à la baisse. (Crédits : Olivier Mirguet)

La promesse portée par Emmanuel Macron, fin 2022, de créer des RER métropolitains dans un large rayon autour de dix agglomérations françaises a provoqué une onde de choc dans les territoires. Un an après l'annonce présidentielle, la loi sur les services express régionaux métropolitains (Serm) a été promulguée le 27 décembre 2023. Dans la foulée de Strasbourg, où un tel projet se trouvait déjà dans les cartons, une trentaine de territoires en France ont fait état de leur volonté de créer ce type d'offre de transports collectifs publics.

Sur le modèle du RER en Ile-de-France, les Serm qui entreront en service au cours de la prochaine décennie s'appuieront prioritairement sur un renforcement de la desserte ferroviaire. Ils intégreront « des services de transport routier à haut niveau de service, des réseaux cyclables et, le cas échéant, des services de transport fluvial, de covoiturage, d'autopartage et de transports guidés ». Ils pourront aussi nécessiter « la création ou l'adaptation de gares ou de pôles d'échanges multimodaux ».

L'association Objectif RER métropolitains, qui milite en faveur d'une telle offre de service public, a organisé son premier congrès à Strasbourg les 8 et 9 février. Elle a invité Jean-Marc Zulesi, auteur du projet de loi sur les Serm, à échanger avec 200 représentants (élus, associations) des territoires porteurs de tels projets.

Préciser les contours de la conférence de financement

Le député (Renaissance) des Bouches-du-Rhône, président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire à l'Assemblée nationale, a proposé d'apporter son « service après-vote », six semaines après la promulgation de la loi par Emmanuel Macron. Les congressistes, dont la plupart seront candidats à la labellisation de leur Serm, ont constaté que les modalités de financement et de gouvernance demeuraient floues.

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L'article 10 de la loi du 27 décembre 2023 prévoit une conférence nationale de financement des services express régionaux métropolitains, « organisée avant le 30 juin 2024, afin de débattre des solutions à mettre en œuvre pour assurer un financement pérenne des dépenses d'investissement et de fonctionnement de ces services ».

« Je n'ai pas d'information sur les dates et les modalités de la conférence de financement. La moindre des choses consisterait à y associer toutes les associations d'élus, les associations d'usagers, les syndicats patronaux et de salariés », a simplement proposé Jean-Marc Zulesi.

L'exemple de Strasbourg

Dans le Grand-Est, où le RER métropolitain (Reme) de Strasbourg est opérationnel depuis le 12 décembre 2022, les autorités n'ont pas attendu la loi Serm pour planifier l'avenir. Des financements publics sont déjà prévus pour améliorer, d'ici 2027, le fonctionnement du Reme autour de la capitale régionale. L'offre ferroviaire déployée dans cinq directions (Lauterbourg, Haguenau, Saverne, Molsheim, Sélestat) comprend entre 640 et 650 trains supplémentaires chaque semaine, par rapport à 2022.

Malgré l'avance prise sur les autres métropoles, il y a urgence. La promesse initiale de 1.000 trains supplémentaires a été revue à la baisse en 2023 car elle butait sur des capacités opérationnelles insuffisantes à la SNCF. « Pour que le Reme de Strasbourg fonctionne à plein, il faudra certainement agrandir la gare de Strasbourg. On a trop de trains sur un nombre de voies insuffisant », a déjà prévenu Franck Leroy, président du conseil régional du Grand-Est.

Le Grand-Est envisage de créer un deuxième Serm entre la Lorraine et le Luxembourg, et un troisième entre Mulhouse et Bâle. L'avenant Mobilités du contrat de plan État-Région, adopté en décembre 2023 alloue 650 millions d'euros de financements à ces trois projets, en complément des autres investissements ferroviaires (850 millions d'euros) menés dans le Grand-Est jusqu'en 2027. Mais l'enveloppe ne sera pas suffisante.

Déplafonner le versement mobilité

« Il faut ouvrir le débat sur le déplafonnement du versement mobilité », a déjà proposé Alain Jund, vice-président écologiste de l'Eurométropole de Strasbourg en charge des transports et des déplacements. « Le versement mobilité n'est pas là pour financer l'infrastructure, mais des services », répond Jean-Marc Zulesi.

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La Société des grands projets, créée par la loi Serm et issue de la transformation de la Société du Grand Paris, est appelée à co-financer les infrastructures sur tout le territoire. « Elle possède une capacité à lever de la dette. Ce modèle nous semble intéressant », a rappelé Jean-Marc Zulesi, sans détailler les clés de répartition restant affectées aux collectivités.

A Strasbourg, le service a démarré sans nécessiter de travaux d'infrastructure spécifiques, « au prix d'une saturation à 100 % de la gare de 5 heures 30 à 21 heures 30 » selon Nicolas Bordillat, directeur des programmes pour le Grand-Est chez SNCF Réseau.

Bordeaux en marche

Il n'en ira pas de même à Bordeaux, où les besoins d'investissement dans les infrastructures ferroviaires sont estimées à 590 millions d'euros par Thomas Lapierre, chef de projet pour le RER métropolitain à la métropole bordelaise. 90 millions d'euros s'y ajouteront pour le matériel roulant.

Le Serm est déjà opérationnel à Bordeaux. Il desservira à terme, comme dans la première phase strasbourgeoise, une étoile ferroviaire à cinq branches (Libourne-Arcachon, Saint-Mariens/Saint-Yzan-Langon, La Pointe de Grave-Pessac). La convention initiale pour son financement, signée en 2018 entre la région et la métropole, a été révisée en 2023 pour intégrer le conseil départemental de la Gironde.

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De telles organisations nécessitent une gouvernance ad hoc. Sur les territoires concernés, des syndicats mixtes, des groupements d'intérêt public et d'autres structures locales de coordination vont apparaître en première ligne. « La loi laisse aux élus le choix de la structure qui correspond à chaque territoire », a rappelé Jean-Marc Zulesi. La loi prévoit une labellisation des Serm, mais ses critères et ses conditions demeurent flous. « Sa définition n'est pas arrêtée », a simplement confirmé son rapporteur.

La Réunion veut aussi son Serm

L'association Objectif RER métropolitains a recensé une trentaine de projets de RER métropolitains, y compris de la part de bassins de mobilité de taille plus modeste (Limoges, La Rochelle, Angers, Besançon) que celle attendue.

Même l'île de La Réunion pourrait être candidate. « Le train à La Réunion a été arrêté en 1976. La nouvelle mandature élue en 2021 a fait de sa relance une priorité », a rapporté Fabrice Hoarau, président de la commission transports déplacements routes et travaux au conseil régional. « Mais il semble que les territoires d'outre-mer en soient exclus pour l'instant du dispositif des Serm », a-t-il déploré.

« La loi s'applique sur tout le territoire », a tenté de rassurer Jean-Marc Zulesi. « Chaque projet devra répondre aux critères fixés par le décret. Il ne faut écarter aucun projet. Mais tous ne pourront être labellisés », a déjà prévenu le député.

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Commentaire 1
à écrit le 10/02/2024 à 8:31
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Ce que vous appelez RER, se dit S-Bahn en Allemagne, et existe depuis 1924. Mais c´est symptomatique de la France : seul Paris en avait un. D´un coup Macron dans un rapport de l´administration centrale découvre que la « province » a aussi le droit de...

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