Ces métiers qui (eux aussi) pourraient nous sauver de la crise climatique

Et si après le fameux Big Quit, la « Grande démission », venait le temps de la « Grande métamorphose » ? En réponse aux enjeux de la transition écologique, le marché du travail évolue. Loin d’être confinée aux seuls domaines les plus évidents (énergie, transport, bâtiment…), cette transformation s’étend à tous les secteurs. En France, 4 millions de personnes exercent déjà un métier dit « vert », selon le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Et près de 3,8 millions d’actifs occuperaient un métier potentiellement « verdissant ». Et ce n’est pas fini si l’on en croit l’Ademe. L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie estime à près d’un million le nombre de nouveaux emplois à pourvoir dans l’économie verte d’ici 2050. Parmi ces emplois, qui nous sauveront peut-être des nombreuses menaces qui pèsent sur la planète, certains semblent évidents : climatologue, chercheur en biodiversité, agronome, écologue, ingénieur en énergie renouvelable, en gestion des déchets… Et d’autres, plus surprenants, pourraient peser tout aussi lourd dans la balance. (Cet article est extrait de T La Revue n°12 - « Climat : Et si on changeait nous aussi ? », actuellement en kiosque).
(Crédits : Istock)

Ingénieur(e) en décroissance, un métier réinventé

Voilà bien deux mots qui paraissent mal assortis... Il faut dire que l'on associe d'ordinaire l'ingénierie aux projets industriels, moteurs de croissance par excellence. Mais au sein même des pépinières d'ingénieurs les plus réputées, une voie alternative fait de plus en plus de bruit. Et si ces diplômes prestigieux soutenaient une autre cause que celle de l'économie du marché et de la course au high-tech ? Et si ces hauts niveaux de qualification étaient mis au service de « solutions techniques sobres et durables », pour citer le discours très remarqué d'un étudiant, Clément Choisne, lors de la cérémonie de remise de diplômes de Centrale Nantes en 2018. Près de Budapest, en Hongrie, un laboratoire d'expérimentation et de recherche « décroissant » est devenu le repère de ces jeunes diplômés désireux de réinventer leur métier. Cargonomia, cofondé en 2012 par l'ingénieur français Vincent Liegey, propose des stages au programme surprenant : travail de ferme, mise en pratique de techniques d'agroécologie, distribution de paniers de légumes, et surtout, une bonne dose d'échanges et de réflexions sur le monde de demain. Alors, concrètement, ingénieur en décroissance, quésako ? Encore au stade larvaire, le métier consiste à  concevoir des objets, systèmes, techniques ou services moins voraces en énergie et moins polluants. Les domaines d'application sont multiples : la permaculture, l'agroforesterie urbaine, les vélos-cargos et tout ce qui a trait à la low-tech en général.

Expert(e) en géo-ingénierie, une solution prométhéenne

Il y a ceux qui veulent prévenir le désastre, et ceux qui veulent en guérir les symptômes. S'il s'avère impossible de réduire les émissions de gaz à effet de serre à temps pour endiguer le réchauffement climatique, certains scientifiques ont un plan B : la géo-ingénierie. Mise en avant pour la première fois en 2006 par le météorologue néerlandais Paul Crutzen, cette approche repose sur un arsenal de techniques à grande échelle, imaginées pour modifier artificiellement le climat terrestre. Elle se divise en deux méthodes principales : d'une part la filtration partielle du rayonnement solaire et, d'autre part, la capture et la séquestration de CO2. La première a pour but de refroidir la planète en renvoyant dans l'espace, à l'aide de différentes méthodes, une part plus importante des rayons solaires arrivant dans l'atmosphère. Dénoncée par certains comme une pratique digne d'apprentis sorciers, la géo-ingénierie solaire fait l'objet de nombreuses publications scientifiques visant à démontrer les risques considérables qui y sont associés. Quant à la capture du dioxyde de carbone, elle consiste à extraire le carbone émis en sortie de centrales à gaz ou à charbon, puis à le stocker dans le sol, les océans ou la végétation. Jugée moins hasardeuse, elle doit néanmoins encore faire ses preuves. Les divers projets expérimentaux menés jusqu'ici se sont avérés excessivement coûteux et peu efficaces. Il reste donc du travail !

Avocat(e) spécialisé(e) dans l'environnement, le droit comme une arme

Dans les universités, le droit de l'environnement a le vent en poupe. Depuis une dizaine d'années, le nombre d'étudiants à vouloir intégrer les masters spécialisés n'a eu de cesse d'augmenter. La raison de cet engouement ? Des apprentis juristes de plus en plus sensibilisés à la défense de l'environnement. À l'instar de personnalités rendues célèbres par le cinéma, tel l'activiste Erin Brockovich ou l'avocat Robert Bilott - dont le combat contre le groupe industriel DuPont a récemment fait l'objet d'un biopic, Dark Waters -, les avocats de demain veulent faire du droit une arme de protection massive. Jusqu'ici, force est de constater que les poursuites pénales pour atteinte à l'environnement restent encore rares. Selon une étude menée récemment par le ministère français de la Justice, elles ne représentent même pas 1 % de l'activité des parquets. Les choses pourraient néanmoins vite changer, boostées par toujours plus d'affaires médiatisées, à l'image du jugement historique rendu le 3 février 2021 par le tribunal administratif de Paris. Dans ce qui a été qualifié de « premier grand procès climatique en France », la justice a reconnu que l'État avait commis une « faute » en se montrant incapable de tenir ses engagements de réduction des gaz à effet de serre sur la période 2015-2018.

Analyste d'impact, la finance autrement

Donner un sens à l'économie, c'est ce que propose la finance dite « à impact ». Plus ambitieuse que la finance durable, cette stratégie d'investissement répond à deux objectifs d'importance égale : engendrer une performance financière et générer un impact social et environnemental positif. Ainsi, un fonds d'investissement dédié à cette pratique pourrait, par exemple, compter parmi ses actifs une entreprise qui fournit de l'énergie solaire à des foyers qui ont un accès limité à l'électricité. En forte croissance depuis une dizaine d'années, la finance à impact recense déjà près d'une centaine de fonds dédiés rien qu'en France. Dans le monde, selon le GIIN (le réseau international de l'impact investing), plus de 500 milliards de dollars seraient actuellement gérés selon ce principe. Et pour déterminer où investir tout cet argent à visée responsable, les gestionnaires d'actifs ont besoin de compétences bien spécifiques, celles d'un analyste d'impact. À la différence d'un analyste ESG, acteur désormais bien établi de la finance durable, l'analyste d'impact ne s'intéresse pas uniquement aux aspects environnementaux et sociaux sous l'angle du risque. Il va plus loin et s'assure que les solutions proposées par l'entreprise soutenue répondent effectivement à un objectif précis, tel que réduire les inégalités sociales, préserver la biodiversité, ou encore réduire le réchauffement climatique... Un modèle financier vertueux serait-il possible ?

Urbanistes, architectes, ingénieur(e)s du bâtiment : au cœur de la War Room

Ce sont des chiffres sur lesquels tout le monde semble s'accorder : d'ici 2050, au moins deux tiers de la population mondiale vivront en zone urbaine. Championne toute catégorie des émissions de gaz à effet serre (GES), la ville grignote chaque jour un peu plus de terrain sur la planète. En France, où l'urbanisation est loin d'être la plus galopante du monde, ce sont environ 60 000 hectares de terres agricoles qui disparaissent sous le béton chaque année. Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde en novembre 2021, l'architecte urbaniste Albert Lévy insistait sur la nécessité urgente d'un « Big Bang urbanistique », à savoir « une refonte totale de l'urbanisme pratiqué » pour répondre aux enjeux du « réchauffement climatique et ses conséquences catastrophiques ». Loin de lui donner tort, le Programme des Nations Unis pour l'Environnement avait publié en 2018 un rapport aux accents tout aussi pressants : faute d'une « approche fondamentalement nouvelle » en matière de conception des villes, les fameux objectifs de développement durable de l'ONU ne seront pas atteints. En réponse à ces appels, les formations d'urbanisme, d'architecture et d'ingénierie du bâtiment font peu à peu de la durabilité leur nouveau cheval de bataille. Matériaux biosourcés, sobriété des bâtiments, réutilisation des structures existantes, tiers lieux, végétalisation des villes... Et si c'étaient eux, les professionnels les mieux placés pour nous sauver de la crise climatique ?

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T La Revue n°12

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Commentaire 1
à écrit le 28/01/2023 à 10:46
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Aucun métier ne permet vraiment de lutter contre le réchauffement climatique. Tout cela n'est que du vent

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