Réformer, c'est bien, se former, c'est mieux

LA CHRONIQUE DU "CONTRARIAN" OPTIMISTE. L'apprentissage pourrait être une solution efficace pour juguler le chômage structurel qui sévit dans l'Hexagone. Or, la formation professionnelle, pour laquelle Emmanuel Macron a engagé un plan de réforme important l'an dernier, demeure le parent pauvre du système éducatif français. Le développement de cette filière est pourtant un enjeu vital pour le pays. Par Robert Jules, directeur adjoint de la Rédaction.
La France comptait en 2017 à peine 400.000 apprentis, soit 7 % des jeunes (16-15 ans), un taux largement inférieur à la moyenne européenne (15 %).
La France comptait en 2017 à peine 400.000 apprentis, soit 7 % des jeunes (16-15 ans), un taux largement inférieur à la moyenne européenne (15 %). (Crédits : Reuters)

Le taux de chômage structurellement élevé en France démontre que notre modèle économique n'est pas satisfaisant. Pourtant, il existe 100.000 offres d'emplois qui ne trouvent pas preneurs dans la restauration et 50000 dans l'industrie. L'une des pistes pour remédier à ce paradoxe est celle de l'apprentissage et de la formation professionnelle, qui sont depuis des décennies les parents pauvres du système éducatif. Cette situation est due selon l'OCDE au fait que « l'enseignement professionnel apparaît souvent comme une branche bonne seulement à accueillir "les enfants des autres" face aux cursus généraux que viennent couronner des études universitaires, tenues pour le nec plus ultra ».

Mais les regards sont en train de changer en raison de « la persistance d'un chômage élevé chez les jeunes » et du « caractère imprévisible du monde du travail contemporain » qui voit le développement rapide de l'automatisation de tâches répétitives manuelles mais aussi, aujourd'hui, intellectuelles. La nécessité de s'adapter à cette nouvelle donne revalorise donc un enseignement professionnel dont l'OCDE rappelle qu'il « favorise grandement l'intégration des individus sur le marché du travail, l'approfondissement des connaissances et le développement personnel ». Il est donc logique que nombre de pays investissent dans l'apprentissage et la formation, vecteurs d'une meilleure productivité des individus et d'économies plus compétitives.

L'essort de la formation professionnelle contribuera à la croissance du PIB

Mais le système français se distingue : selon l'OCDE, seuls 36 % des individus ont recours à la formation professionnelle contre 53 % en Allemagne et 56 % au Royaume Uni. Pire, il ne bénéficie pas en priorité aux plus concernés : les salariés les moins qualifiés et les seniors qui font partie des catégories les plus exposées au chômage. Quant à l'apprentissage, selon le ministère du Travail, le pays comptait en 2017 à peine 400.000 apprentis, soit 7 % des jeunes (16-15 ans), un taux largement inférieur à la moyenne européenne (15 %). Pourtant, 70 % des apprentis trouvent un emploi dans les 7 mois qui suivent la fin de leur formation alors qu'aujourd'hui 1,3 million de jeunes ne sont ni à l'école, ni à l'université, ni en apprentissage, ni en emploi. Un véritable « gâchis », selon le ministère.

Afin de remédier à cette situation urgente, Emmanuel Macron a lancé l'année dernière un plan de réforme de l'apprentissage et de la formation professionnelle, doté d'un montant de 15 milliards d'euros. Même si cela ne fait pas les gros titres des médias, l'enjeu est vital pour le pays. Dans une récente étude de l'Institut Sapiens, intitulée « L'utilité de la formation pro face à la révolution digitale », ses auteurs, les économistes Nathalie Chusseau et Jacques Pelletan, ont calculé qu'en formant 3 millions de personnes - un chiffre qui correspond à 10 % de la population active française, soit la part des actifs ayant un emploi touché directement par la révolution digitale - pendant six mois, le PIB augmenterait de 2,5 %. Et si la durée de la formation était portée à 1 an, le PIB progresserait de 3,4 %, grâce à une meilleure productivité du capital humain. Cette notion de productivité est en effet le principal moteur de la création de richesses au sein des entreprises où on se demande comment produire davantage par unité de travail, de capital, d'énergie et de ressources utilisées.

Sur une longue période, Nathalie Chusseau et Jacques Pelletan évaluent le gain total entre 62 et 86 milliards d'euros, un montant largement supérieur aux 15 milliards d'euros que coûterait une formation professionnelle de six mois pour 10 % de la population active à raison de 11 euros l'heure. Il est donc grand temps de redonner ses lettres de noblesse à l'apprentissage et la formation professionnelle.

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Commentaires 2
à écrit le 17/03/2019 à 12:49
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Se former c'est bien mais... se réformer? Par rapport a quoi? Par rapport a une "vérité" imposé? Se former pour s'adapter... oui!

à écrit le 17/03/2019 à 9:09
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Tapez ceci sur votre moteur de recherche "détournement argent formation" et vous comprendrez vite l'ampleur du problème. Oui la formation pourrait être vertueuse mais l'oligarchie s'en sert une énième fois pour détourner l'argent public. Ça n...

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