Construction de logements : aimer notre maire

TRIBUNE. Il n'est que temps de réhabiliter les maires de France par rapport au logement. Il y a autant de styles de dialogue que d'élus, mais le sens de la responsabilité urbanistique les caractérise bien plus que le clientélisme ou la courte vue électoraliste. Par les promoteurs du Grand Paris (*).
Philippe Jarlot est président des Promoteurs du Grand Paris
Philippe Jarlot est président des Promoteurs du Grand Paris (Crédits : Reuters)

Avec la proximité croissante des élections municipales, le leitmotiv revient, lancinant, dans la bouche des observateurs et des acteurs de la politique du logement : c'est à cause de la frilosité des maires, qui ne veulent pas déplaire à leurs électeurs en bouleversant les grands équilibres de leur commune, que les permis de construire sont en recul. Cet argument est avancé régulièrement un an avant l'échéance. Cette fois, on a même commencé à le lire plus tôt, deux bonnes années avant que les Français n'aillent aux urnes, alors que la courbe des autorisations de construire s'était infléchie.

Cette critique, dans un pays en manque de logements a pour effet un désamour de nos maires : à cause d'eux, les chantiers seraient beaucoup moins nombreux que nos besoins l'exigeraient, tout ça pour servir des calculs électoraux.

Réhabiliter les maires de France par rapport au logement

Il n'est que temps de réhabiliter les maires de France par rapport au logement, en ne s'arrêtant pas à cette appréciation rustique et largement dépassée. Dépassée d'abord parce que s'il est vrai que certains témoignent de malthusianisme, leur proportion diminue, un peu par vertu, un peu par calcul. Vertu parce que beaucoup ont la fierté de développer et de renouveler leur ville et de laisser une trace profonde dans l'urbanisme local. Calcul aussi : si les électeurs peuvent être mus par des réflexes d'égoïsme, qui les conduisent à refuser que leur ville accueille de nouveaux habitants, ils savent qu'elle doit être ouverte et ne pas exclure, peut-être leurs propres enfants. Ainsi, le dynamisme de la construction pourrait bien constituer un atout au crédit des élus. Et si un maire qui bâtit  n'était plus un maire battu ?

Les temps ont changé. Ce qui n'a pas changé, c'est l'exigence des citoyens envers les élus de proximité : ils sont plus que jamais leurs préférés, ceux de la part de qui ils attendent tout et plus encore. À cet égard, on n'en finit plus de mesurer les conséquences néfastes de la suppression progressive de la taxe d'habitation. De grandes figures de la politique, de tous bords, ont dressé le constat que cette décision, en première approche populaire à l'évidence, distendait le lien entre les maires et les administrés. En effet, cette taxe reliait de façon directe les habitants, quel que soit leur statut, propriétaires ou locataires, à leurs édiles. Elle les fondait à demander des comptes puisqu'elle alimentait sans filtre le budget des communes. Sa suppression sonne le glas de cette relation économique, qui induisait un lien politique au meilleur sens du terme. Ce lien est maintenant dissous.

Faire encore plus et encore mieux

Elle induit la peur des maires que la promesse de compensation à l'euro près ne se fasse pas de manière intègre par l'État, non seulement dès l'exercice budgétaire 2020, mais au-delà, dans les années suivantes. Inquiets de ne pouvoir apporter aux habitants de leur commune, les services qu'ils veulent, certains maires ont choisi de ne délivrer les permis de construire qu'avec parcimonie : comment accueillir dignement de nouveaux ménages quand on doute de pouvoir continuer à satisfaire ceux qui vivent déjà sur le territoire de la commune ?

Il est urgent de s'en remettre à la science des maires quant aux besoins en logements nouveaux, y compris à caractère social, mais aussi en matière de réhabilitation. Eux qui appréhendent mieux que quiconque les nécessités de leur territoire. On sait aussi que chaque grande loi sur l'urbanisme, comme ce fut le cas pour ALUR et ELAN, sont tentées de reprendre aux maires la prérogative de signer les permis de construire, transférant ce pouvoir aux intercommunalités ou aux préfets. L'intercommunalité doit être une solution choisie sur certains territoires, le maillage de la commune a du sens. En tout cas, déposséder nos élus locaux au profit de l'État du pouvoir d'autoriser les constructions et d'orienter l'urbanisme serait une erreur historique.

Pour un promoteur, le maire et ses équipes sont des interlocuteurs familiers. Il y a autant de styles de dialogue que d'élus, mais le sens de la responsabilité urbanistique et du service logement caractérise les maires bien plus que le clientélisme ou la courte vue électoraliste. L'anagramme du verbe aimer est le mot maire, les aimer et ouvrir les yeux sur ce qu'ils permettent et encouragent en faveur du logement est le premier impératif... pour les inciter à faire encore plus et encore mieux.

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(*) Les Promoteurs du Grand Paris est une association regroupant six promoteurs immobiliers franciliens: MDH Promotion, Pierre Etoile, Bécarré Elysées, Bricqueville, Cibex et Paris-Ouest Promotion.

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