Agriculture : 72% des exploitants bretons ont du mal à recruter, et la moitié partira en retraite dans les dix ans

En phase de transition, l’agriculture bretonne est ,sur le plan démographique, confrontée à un double défi. D’une part, un employeur agricole sur sept rencontre des difficultés à recruter, de l’autre, un sur deux est appelé à partir en retraite dans les dix ans. La région s’active pour accélérer le renouvellement des générations et susciter davantage d’installations.
La Bretagne est confrontée à une double problématique d’emploi et de renouvellement des générations. En 2022, 72% des employeurs du secteur agricole ont affirmé avoir rencontré des difficultés à embaucher.
La Bretagne est confrontée à une double problématique d’emploi et de renouvellement des générations. En 2022, 72% des employeurs du secteur agricole ont affirmé avoir rencontré des difficultés à embaucher. (Crédits : © Stephane Mahe / Reuters)

Entre 2010 et 2020, la Bretagne a perdu 23,5% de ses exploitations agricoles, principalement tournées vers l'élevage, avec une dominante de l'orientation laitière. Première région agricole, la région recense aujourd'hui 67.800 actifs et 25.947 exploitations. Si le récent Salon de l'agriculture a mis l'accent sur la souveraineté alimentaire et les transitions, la Bretagne se trouve aussi confrontée à une double problématique d'emploi et de renouvellement des générations.

Selon une note d'actualité publiée fin février par les Chambres d'agriculture de Bretagne, le marché du travail du secteur agricole et agro-alimentaire est particulièrement tendu.

Sur ce territoire où 3,7% des emplois régionaux sont fournis par le seul secteur agricole (contre 2,2% en France) et qu'avec l'agro-alimentaire, la proportion grimpe à 9% (4,3% en France), les employeurs bretons anticipent depuis plusieurs mois des difficultés. En 2022, celles-ci ont porté sur 66% des 162.340 postes à pourvoir.

72% des employeurs du secteur agricole ont affirmé avoir rencontré des difficultés à embaucher l'an passé. Ce pourcentage était de 40% dix ans auparavant.

Emploi salarié dynamique mais manque de candidats

« Cette situation de tension s'explique par deux phénomènes », notent les Chambre d'agriculture. « D'une part, par l'augmentation de l'emploi salarié qui reste dynamique, d'autre part, par un taux de chômage qui est très bas en Bretagne, à 6% au troisième trimestre 2022 ».

En 2022, le nombre de salariés a augmenté de 0,7 % entre les premier et troisième trimestres en Bretagne, tous secteurs confondus.

Un an plus tôt, les exploitations bretonnes employaient 55.392 actifs familiaux et salariés, soit 46.607 équivalents temps plein, auxquels se sont ajoutés 39.275 salariés saisonniers et occasionnels (4.750 ETP), selon des chiffres émanant du Conseil régional.

« L'emploi agricole en ETP a baissé de 10% entre 2010 et 2020, en raison de la diminution des chefs d'exploitation (-19%) et des autres actifs familiaux (-16%). Ces reculs ne sont pas entièrement compensés par la progression du salariat » analyse l'étude des Chambres d'agriculture.

Les questions de recrutement font donc écho à un autre phénomène qui bouscule le secteur agricole breton : le vieillissement de la population.

En 2020, 12.676 chefs d'exploitation avaient plus de 55 ans, soit 35% des agriculteurs. 54% d'entre eux, soit 19.179, ont plus de 50 ans.

Une installation pour trois départs

En dix ans, la Bretagne a perdu un quart de ses exploitations et 7% de son cheptel. « Les départs ne sont pas compensés par les installations. On compte une installation pour près de trois départs » indique la note d'actualité. En 2021, 777 jeunes se sont installés.

Dans les dix ans à venir, près d'un agriculteur sur deux partira à la retraite. L'enjeu démographique est suffisamment alarmant pour que le Conseil régional s'empare du dossier.

L'exécutif régional entend enrayer le vieillissement de la population agricole, attirer davantage de jeunes et contribuer à 1.000 nouvelles installations aidées par an, à horizon 2028, contre 500 aujourd'hui.

Pour le Loïg Chenais-Girard, le président de la Région, dont la stratégie consiste à favoriser l'installation et la transmission des exploitations agricoles, l'enjeu de l'accès au foncier est tout aussi primordial.

« Nous voulons doubler le nombre d'installations aidées chaque année en Bretagne pour maintenir une agriculture à taille humaine, diversifiée, qui contribue à la souveraineté alimentaire de notre pays tout comme à la vitalité de nos territoires », a-t-il insisté de nouveau au salon de l'agriculture.

2023, année déterminante

Dans cette optique, la collectivité a annoncé un plan de sauvegarde dont la mise en place est prévue pour 2023. Il est émaillé de plusieurs mesures concrètes telles que l'extension de prêts d'honneur aux producteurs laitiers, une dotation jeune agriculteur de 22.000 euros ou encore la création d'un dispositif de transmission destiné aux cédants.

Pour l'agriculture bretonne, 2023 s'annonce comme une année charnière, avec la mise en place de la nouvelle Politique agricole commune (PAC 2023-2027). Le Conseil régional a par ailleurs entamé avec le Préfet de région, les premières concertations préalables à la future loi d'orientation et d'avenir agricole annoncée par le Président de la République.

Sur le plan financier, la Région vient de voter un nouveau Plan d'investissement de transition des exploitations agricoles de 27 millions d'euros ainsi qu'un plan spécifique pour l'agriculture bio.

Les Chambres d'agriculture le constatent : les difficultés de recrutement poussent certains des exploitants en activité, à réorienter leur production, de la filière animale vers la filière céréalière, moins contraignante. Cela pourrait changer le paysage breton, redoutent-elles.

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Commentaire 1
à écrit le 07/03/2023 à 17:15
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La concurrence avec les ukrainiens à 200€/mois dont les taxes aux frontières de l'UE ont été abolies récemment n'est pas aisée. Qui voudrait racheter une exploitation dans ces conditions à part les groupes industriels?

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