Du pneu de camions aux énergies vertes, la reconversion industrielle réussie de La Roche-sur-Yon

Deux ans après la fermeture de l’usine Michelin de la Roche-sur-Yon, la quasi-totalité des salariés est désormais reclassée. La reconversion du site, pilotée par le géant du pneumatique, la Banque des territoires et la SPL Oryon, vient de donner lieu à la création d’une société de projet Atinea, codétenue par ces trois partenaires. Objectif : réaménager le lieu pour accueillir des entreprises tournées vers les énergies renouvelables et les mobilités durables.
Les 60.000 mètres carrés du site de Michelin de La Roche-sur-Yon vont être déconstruits, reconstruits, voire réaménagés pour accueillir des entreprises de mobilité douce et des énergies renouvelables.
Les 60.000 mètres carrés du site de Michelin de La Roche-sur-Yon vont être déconstruits, reconstruits, voire réaménagés pour accueillir des entreprises de mobilité douce et des énergies renouvelables. (Crédits : DR)

Le 31 décembre 2020, quand l'usine de pneus Michelin de la Roche-sur-Yon ferme ses portes après une cinquantaine d'années d'activité, les 672 salariés sont sous le choc. Tous vont devoir être reclassés. Et 20 hectares de terrain et 60.000 m² de bâtiments industriels vont devoir se trouver un nouvel horizon pour éviter de devenir une friche au nord de l'agglomération yonnaise. Deux ans et demi plus tard, le pari est en partie gagné.

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« Au gré d'une convention de redynamisation signée avec l'État, nous nous sommes engagés à créer autant d'emplois qu'il y en avait chez Michelin. Aujourd'hui, trente entreprises, situées sur le bassin d'emplois yonnais, ont signé un accord avec Michelin Développement pour créer 629 emplois subventionnés par Michelin », indique Eric Faidy, secrétaire général Europe du Sud chez Michelin.

Celui-ci est co-actionnaire de la société de redynamisation industrielle Atinea, fondée en juin 2023, aux côtés de la Banque des territoires des Pays de la Loire et de la société développement économique yonnaise Oryon pour s'occuper des terrains.

Un moyen de remplir le site

« On aurait pu mettre un panneau à vendre et chercher un acquéreur, mais nous considérons qu'il est de notre responsabilité d'être présent auprès des salariés comme du territoire et d'aller au-delà de ce que prévoit la loi », justifie Eric Faidy. Après des échanges avec les présidents de l'agglomération, de la région, du département et la Banque des territoires, le principe de la création d'une société à mission est retenu. Ce sera une SAS dont la vocation est de faire renaître le site autour des mobilités durables et des énergies vertes.

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Craignant que la thématique soit trop restrictive, Michelin est dubitatif, mais accepte. « Il y a eu des hauts et des bas. Entre une agglomération, une banque et un industriel, nous sommes dans des sphères un peu différentes. Aujourd'hui, nous sommes alignés sur tout. En écoutant les locaux, on s'est rendu compte que de nombreuses activités se développaient autour de l'hydrogène et des énergies renouvelables et que nous n'aurions pas de mal à remplir le site », admet l'industriel, engagé à apporter son expertise.

Un montage financier à la hauteur des enjeux

Il aura, tout de même, fallu près d'un an de discussions pour que les protagonistes regroupés au sein d'Atinea se mettent d'accord sur le contenu du pacte d'actionnaires, les statuts et les missions de l'entreprise. Et pour cause, le projet est loin d'être anodin. Ce serait même le plus important engagé par la Banque des territoires. « Et beaucoup plus conséquent que des opérations similaires menées par Michelin en Ecosse et en Allemagne », témoigne Eric Faidy.

L'enveloppe globale porte sur 45 millions d'euros, dont 15 millions en fonds propres, majoritairement financés à hauteur de 6 millions d'euros par Michelin et autant par la Banque des territoires. Cette dernière a porté le projet, mené les études de faisabilité et d'ingénierie et a élaboré le business plan. « Parce que, c'est notre métier, chaque projet a une problématique différente, et donc un montage juridique et financier spécifique », explique Philippe Jusserand, directeur régional de la Banque des territoires Pays de la Loire.

Avec l'application du ZAN (zéro artificialisation nette), les friches ainsi que les entrées de ville, les parkings, les zones commerciales... deviennent de vraies réserves foncières pour les communes ou les agglomérations. « Avec le développement du e-commerce, du recentrage vers les centres-villes, des fonciers vont devoir être reconvertis », observe Philippe Jusserand.

« Face aux enjeux de souveraineté, la région des Pays de la Loire, si elle n'est pas la plus industrialisée, a vocation à accueillir des industries, à condition qu'elles soient acceptées par population. C'est devenu un de nos sujets prioritaires. Parce qu'il est facteur de créations d'emplois et de redynamisation des villes moyennes », souligne-t-il.

« Ça se passe comme ça en Vendée »

Ici, au Nord de la Roche-sur-Yon, les 20 hectares et les 60.000 m² de bâtiments, jusque-là détenus par Michelin, ont été cédés à la société Atinea. La présidence de cette dernière est, d'un commun accord, assurée par la SEM Oryon, choisie en raison de ses connaissances du tissu local, et de son expertise dans l'accueil et l'installation d'entreprises.

D'ici la fin de l'année 2023, voire début 2024, elle va lancer la phase d'étude des voiries, les opérations de déconstruction ou de reconstruction. En outre, elle doit imaginer la meilleure façon d'aménager le site, dont la livraison définitive devrait intervenir en 2025. Comme il y était obligé, l'industriel du pneumatique a investi 6,5 millions d'euros pour dépolluer le site. Les résultats de l'opération, menée entre 2020 et 2022, ont été certifiés par la DREAL (Direction régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement).

Le site reste sous surveillance pendant quatre ans pour s'assurer de la qualité des sols et des eaux. D'ores et déjà, le site accueille temporairement le transporteur Blondel. De son côté, le groupe vendéen Dubreuil (5.500 personnes) aurait manifesté son intention d'y développer une activité de remise à neuf de véhicules utilitaires et de rétrofit.

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Un autre projet pourrait concerner la décarbonation d'unités de transport fluvial. Pour Luc Bouard, président de l'agglomération yonnaise et Philippe Jusserand, le but n'est pas de distribuer des royalties. « Le modèle économique repose sur la revente progressive des bâtiments sur 7 à 8 ans, à la demande des entreprises. Ça se passe comme ça en Vendée m'a-t-on dit », découvre le dirigeant de Michelin. Arrivera, alors, un moment où l'industriel se retira du site. La société Atinea pourra être dissoute. Elle aura rempli sa mission.

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