IA Act : les eurodéputés adoptent largement le règlement encadrant les systèmes d'intelligence artificielle

Présentée en avril 2021 par la Commission européenne, cette législation unique avait pris une nouvelle dimension avec l'arrivée, fin 2022, de ChatGPT. Adoptée à 523 favorables ce mercredi, elle constitue les « premières règles contraignantes et complètes au monde pour une IA fiable », s'est réjouit le commissaire européen en charge de ce dossier, Thierry Breton. Mais, de son côté, le monde de la tech s'est montré pour le moins circonspect.
Le commissaire européen, Thierry Breton, en charge du dossier de l'IA Act.
Le commissaire européen, Thierry Breton, en charge du dossier de l'IA Act. (Crédits : POOL)

C'est un « soutien massif » des eurodéputés en faveur de l'IA Act qu'a salué le commissaire européen en charge de ce dossier, Thierry Breton. Un texte qui, selon lui, établit les « premières règles contraignantes et complètes au monde pour une IA fiable », s'est-il réjouit sur X (ex-Twitter).

Et pour cause, ce mercredi, les députés européens ont adopté un ensemble de règles destinées à encadrer les systèmes d'intelligence artificielle (IA) comme ChatGPT. Cette législation unique au niveau mondial a été approuvée au Parlement par 523 voix pour, face à 46 voix contre. Les 27 États de l'UE doivent désormais approuver le texte en avril avant que la loi ne soit publiée au Journal officiel de l'UE en mai ou juin.

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« Aujourd'hui est un jour historique sur notre long chemin vers la réglementation de l'IA », a également salué le co-rapporteur du texte Brando Benifei (sociaux-démocrates) devant la presse ce mercredi matin. Pour rappel, ce projet de loi avait été présenté par la Commission européenne en avril 2021. À l'époque, il s'agissait plutôt de légiférer sur les usages de l'IA les plus dystopiques, par exemple le crédit social à la chinoise, l'emploi d'algorithmes de reconnaissance émotionnelle sur les caméras de surveillance, ou encore les systèmes de police prédictive.

Mais l'apparition fin 2022 de ChatGPT de la start-up californienne OpenAI, capable de rédiger des dissertations, poèmes ou traductions en quelques secondes, lui a donné une nouvelle dimension. Car, ce système a révélé l'énorme potentiel de l'IA, mais aussi ses risques. La diffusion de fausses photos ou vidéos, plus vraies que nature, a ainsi alerté sur le danger de manipulation de l'opinion.

Une approche à deux niveaux

La législation prévoit une approche à deux niveaux. Les modèles d'IA à « usage général » devront respecter des obligations de transparence ainsi que les règles européennes en matière de droit d'auteur. Quant aux systèmes considérés comme à « haut risque » - utilisés par exemple dans les infrastructures critiques, l'éducation, les ressources humaines, le maintien de l'ordre -, ils seront soumis à des exigences plus strictes. Ils devront par exemple prévoir la mise en place d'une analyse d'impact obligatoire sur les droits fondamentaux.

Les images, textes ou vidéos générés artificiellement (deep fakes) devront être clairement identifiés comme tels.

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Le texte interdit aussi les systèmes de notation citoyenne ou de surveillance de masse utilisés en Chine, ou encore l'identification biométrique à distance des personnes dans les lieux publics. Sur ce dernier point, les Etats ont toutefois obtenu des exemptions pour certaines missions des forces de l'ordre comme la prévention d'une menace terroriste ou la recherche ciblée de victimes.

En outre, la législation européenne sera dotée de moyens de surveillance et de sanctions avec la création d'un office européen de l'IA, au sein de la Commission européenne. Il pourra infliger des amendes allant de 7,5 à 35 millions d'euros, en fonction de l'infraction et de la taille de l'entreprise. « Nous réglementons le moins possible, mais autant que nécessaire », a justifié le commissaire européen Thierry Breton.

Avec ce texte, « nous avons réussi à trouver un équilibre très fin entre l'intérêt d'innover et l'intérêt de protéger », a expliqué l'autre co-rapporteur Dragos Tudorache (Renew, centristes et libéraux). Toutefois, cette législation « n'est que le commencement », a-t-il relevé, soulignant que l'intelligence artificielle continue d'évoluer rapidement. « Nous devrons être très attentifs à cette évolution de la technologie à l'avenir et être prêts à répondre aux nouveaux défis qui pourraient en découler », a-t-il ainsi prévenu.

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Le monde de la tech circonspect

Un enthousiasme général qui n'est pas partagé au sein du monde de la tech qui s'est montré circonspect. « Nombre de ces nouvelles règles restent floues et pourraient ralentir le développement et le déploiement d'applications innovantes », estime ainsi Boniface de Champris, un responsable Europe du CCIA, un lobby du secteur.

De leur côté, l'Observatoire des multinationales (France), Corporate Europe Observatory (Belgique) et LobbyControl (Allemagne) redoutent que les lobbys affaiblissent la mise en œuvre des règles entourant l'IA. « De nombreux détails de la loi sur l'IA restent ouverts et doivent être clarifiés (...), par exemple en ce qui concerne les normes, les seuils ou les obligations de transparence. La composition du conseil consultatif de la nouvelle agence européenne pour l'IA reste également floue », ont-ils averti dans un communiqué commun.

La France réticente à l'IA Act

Même certains pays ont fait preuve de réticence à l'idée d'adopter cet IA Act. À commencer par... la France. Cette dernière craignait, en effet, qu'une régulation excessive tue la progression de champions européens naissants. Suite à l'accord trouvé en décembre, Emmanuel Macron avait d'ailleurs estimé que l'IA act n'était « pas une bonne idée ».

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« Mais nous sommes le premier endroit au monde à réglementer les modèles dits fondationnels d'intelligence artificielle. Quand je regarde les capacités de la France sur l'intelligence artificielle, nous sommes certainement les premiers en Europe continentale, au coude-à-coude avec les Britanniques. Eux, n'auront pas cette régulation (...) Nous pouvons réguler beaucoup plus vite que nos compétiteurs (...) mais il faut être à la bonne vitesse. Si nous perdons des leaders à cause de cela, il faudra revenir dessus », avait-il expliqué.

L'IA générative pourrait gonfler le PIB français de 400 milliards d'euros d'ici à 2030

L'adoption de l'IA Act par le Parlement européen intervient le jour-même de la parution d'un rapport du comité interministériel sur l'intelligence artificielle générative sur le potentiel moteur de croissance de l'économie française que représenterait l'IA. Il était présenté officiellement ce mercredi au président Emmanuel Macron à l'Élysée.

Il a vocation à émettre des recommandations sur la stratégie française, faire l'état des lieux des capacités actuelles, ou encore produire des chiffres sur l'impact économique de l'IA générative. La veille, l'Élysée a présenté de premiers extraits du rapport et notamment des « chiffres inédits sur le potentiel de création de valeur de l'IA ». « Le rapport évoque une hausse du PIB potentielle de 250 à 400 milliards d'euros grâce à l'IA à l'horizon 2030 », a ainsi chiffré la présidence. Pour rappel, le PIB se situait à 2.640 milliards d'euros en 2022.

(Avec AFP)

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Commentaires 3
à écrit le 14/03/2024 à 8:17
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Des gens qui ont validé les mégas camions sans hésiter, difficile de les estimer on a plut^^ot tendance maintenant à détester ce qu'ils valident. Bienvenu en UERSS empire de la corruption prévu pour durer mille ans. 88 ans déjà de ce cauchemar, leur ...

à écrit le 13/03/2024 à 18:35
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staline se felicite de la n'ieme contrainte, a grands coups de lois normes et impots, mais viendra exiger que ceuwx qui le peuvent car ils en ont les moyens eux redresse l'europe dans la justice de la competence injuste........comme on fait son lit o...

à écrit le 13/03/2024 à 16:18
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" estime ainsi Boniface de Champris, un responsable Europe du CCIA, un lobby du secteur" J'invite les lecteurs à aller sur le site officiel du CCIA pour prendre connaissance de la liste des membres. En fait le lecteur avisé remarquera qu'il y a cert...

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