La Réunion, porte-étendard de l'innovation dans les Outre-Mer

Grâce à un écosystème tech florissant et à un projet ambitieux visant à devenir le principal hub de l'innovation ultra-marine, La Réunion est le premier territoire d'Outre-Mer à obtenir la labellisation Capitale French Tech.
Sylvain Rolland
L'île de La Réunion est le premier territoire d'Outre-Mer à obtenir la labellisation Capitale French Tech.

On connaît l'île de La Réunion pour ses plages de sables fin, ses cascades spectaculaires, son volcan ou encore son rhum arrangé. Désormais, le « caillou » peut également revendiquer une autre spécialité : l'innovation. Grâce au dynamisme de son écosystème tech et l'ambition de son projet pour les prochaines années, la French Tech locale, créée en 2016, a obtenu le label Capitale French Tech pour la période 2023-2025. Une consécration synonyme d'un budget plus important et d'actions de plus grande ampleur, en lien avec Paris et les autres Capitales, pour faire rayonner le territoire. C'est une première pour l'île, et une première tout court pour un territoire d'Outre-Mer. La Réunion rejoint ainsi 15 autres Capitales en France, tandis que 32 territoires sont labellisés « Communautés » (des structures d'entrepreneurs bénévoles) et 67 à l'international.

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« Porter la voix » de tous les territoires d'Outre-Mer

Pour Manuel Warlop, coprésident de la French Tech Réunion, la labellisation est une reconnaissance locale qui positionne l'île comme un hub global de l'innovation dans les Outre-Mer. « On a montré qu'on a la capacité et la volonté de se structurer pour monter en puissance au niveau local, mais aussi fédérer l'ensemble des Communautés d'Outre-Mer dans le monde, car nous partageons avec la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, la Polynésie ou encore la Nouvelle-Calédonie énormément d'enjeux liés à l'insularité, à l'internationalisation des entreprises, au financement ou à la transition écologique », explique l'entrepreneur. Qui poursuit : « C'est très important de devenir une Capitale car cela va nous permettre de porter la voix de l'ensemble des Outre-Mer et de multiplier les collaborations entre nous ».

Comme quasiment partout ailleurs en Métropole comme en Outre-Mer, la tech se développe à grande vitesse dans la petite île de l'Océan Indien. « L'écosystème reste à taille humaine, tout le monde se connaît donc c'est incomparable avec Paris ou même les grandes métropoles du continent. Mais du coup la solidarité y est très forte, c'est un écosystème très soutenant qui m'a beaucoup facilité la vie », indique Béatrice Gouyon, la cofondatrice et CEO de Logipren, la startup la plus en vue de l'île, vainqueur en 2022 du prix "Outre-Mer" de Tech for Future, le concours d'innovation de La Tribune.

Une jambe à La Réunion, l'autre en Métropole

Comme la plupart des succès made in La Réunion, Logipren s'appuie sur ses deux jambes, l'une sur l'île, l'autre en métropole, à Paris. Son logiciel d'aide à la prescription de médicaments pour les nouveaux-nés, qui a sauvé la vie de nombreux bébés prématurés en supprimant les erreurs médicamenteuses qui touchent particulièrement cette catégorie de population, est déjà utilisé par 70% des hôpitaux français, et commence à s'exporter partout dans le monde.

« A La Réunion comme ailleurs, voire encore plus qu'ailleurs étant donné l'étroitesse du marché local, il faut penser à l'international dès le début », explique l'ancienne médecin, qui emploie une vingtaine de personnes à La Réunion et un peu moins d'une vingtaine à Paris. « Les ingénieurs, la partie scientifique, la R&D, la finance, l'administratif et le support client sont situés à La Réunion. Seuls les commerciaux sont à Paris et dirigés par un directeur général sur place », décline Béatrice Gouyon.

L'entrepreneuse n'y voit que des avantages. « On attire les talents sans difficulté car la qualité de vie est extraordinaire, et c'est pourquoi de nombreux jeunes vont se former en métropole et reviennent ensuite à La Réunion. De mon côté, ça me coûte beaucoup moins cher qu'à Paris, et je bénéficie d'aides plus importantes parce que je suis à La Réunion, avec un Crédit impôt recherche plus élevé et des charges sociales plus faibles », décline-t-elle. Et de conclure, catégorique : « Jamais je n'aurais réussi à faire ça ailleurs tant j'ai reçu ici une aide sur-mesure qui n'aurait tout simplement pas été possible dans un écosystème plus grand ».

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Peu de financements mais un écosystème complet

Niveau financement par contre, les startups de La Réunion sont loin des standards de la métropole. Rares sont les opérations qui dépassent les quelques millions d'euros. La faute au manque d'investisseurs présents sur l'île. « Il y a Bpifrance qui soutient énormément l'écosystème, mais du côté du privé ça manque encore d'acteurs. Les startups peuvent se tourner vers Agicap, qui est de loin le principal fonds d'investissement de l'île avec 35 millions d'euros investis à date. Derrière, il y a les prêts bancaires, quelques business angels, mais les participations des autres acteurs privés sont très faibles, il faut plutôt se mettre en lien avec la métropole ou l'étranger », indique Manuel Warlop, de la French Tech Réunion.

De fait, l'île de La Réunion propose un écosystème d'innovation complet, mais à taille humaine. Quelque 200 startups y seraient en activité, dont une partie délocalisée en métropole. L'écosystème est notamment animé par Bpifrance, Business France, la French Tech, des acteurs comme la Technopôle de Saint-Denis et celle de Saint-Pierre, Digital Réunion, la CCI, la Région, Apicap ainsi que les structures universitaires. L'île a été labellisée réseau e-santé dès 2016, avant de devenir une Communauté French Tech en 2019 puis une Capitale en 2023.

Pour encore monter en puissance, la French Tech Réunion a établi une feuille de route qui repose sur quatre axes : améliorer l'accès au financement pour les pépites locales, mieux accompagner les succès en leur faisant bénéficier des programmes de la Mission French Tech, fédérer les acteurs du territoire et renforcer sa compétitivité. « Notre projet s'appelle Welcome Tech Island pour faire de La Réunion un véritable hub d'innovation, avec le but à terme d'avoir une licorne », précise Juliette Campione, la présidente de la French Tech Réunion. Une chose est sûre : le « caillou » ne manque pas d'ambition.

Sylvain Rolland

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Commentaire 1
à écrit le 02/02/2023 à 13:28
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Il y a encore des efforts à faire ! De tous les DOM-TOM, C'est le lieu avec le plus de potentiel touristique et une population a peu près homogène en terme d'esprit.

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