Prix Tech for Future 2023 : Euveka, la startup qui rend le prêt-à-porter plus inclusif et durable

Cette pépite drômoise a développé des mannequins robots qui facilitent le prototypage des vêtements. Cette technologie de rupture brevetée permet d'adapter la coupe à la morphologie réelle des acheteurs, afin de réduire drastiquement les invendus des marques -donc leur empreinte carbone- ainsi que les retours des clients. Euveka gagne le prix Tech for Future 2023, organisé par La Tribune, dans la catégorie « Data & IA ». Portrait.
Euveka a développé un mannequin robotisé qui s'adapte à la morphologie des clientes en prêt-à-porter. Sa fondatrice et CEO, Audrey-Laure Berghenthal, gagne le prix Tech for Future 2023, organisé par La Tribune, dans la catégorie Data & IA.
Euveka a développé un mannequin robotisé qui s'adapte à la morphologie des clientes en prêt-à-porter. Sa fondatrice et CEO, Audrey-Laure Berghenthal, gagne le prix Tech for Future 2023, organisé par La Tribune, dans la catégorie Data & IA. (Crédits : Georges Vignal)

Les tailles des vêtements en prêt-à-porter sont-elles adaptées à la morphologie de toutes les clientes ? « Les marques ne produisent des vêtements que pour une seule forme de morphologie, qui représente 20 % de la population féminine globale. Cette morphologie existe dans les tailles 36 et 38 mais pas au-delà du 40. On peut avoir une même taille mais pas la même forme du corps. C'est ce qui explique qu'il y ait tant de retours », répond Audrey-Laure Bergenthal, présidente d'Euveka à Saint-Marcel-lès-Valence (Drôme).

A l'aide de son mannequin robot évolutif et connecté, cette entreprise propose d'assister les fabricants de prêt-à-porter dans les phases de mise au point de leurs collections et de leurs déclinaisons en fonction des morphologies, « pour être plus inclusif ». Et réduire drastiquement les deux fléaux de tout acteur de la mode : les invendus, et les retours, ce qui diminue l'empreinte carbone du secteur.

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Startup industrielle qui compte Adidas, Etam ou Amazon parmi ses clients

La solution combine l'accès au robot, la licence logicielle et l'accompagnement par un expert. Active depuis 2011, Euveka se présente comme une startup industrielle. L'entreprise s'adresse aux marques grand public (Etam, Adidas, Amazon, la Fée Maraboutée..) mais aussi aux grands noms du luxe et aux écoles de mode. « C'est stupide de travailler sur un mannequin en bois », juge Audrey-Laure Bergenthal.

Euveka n'a pas choisi de basculer dans le sur-mesure pour adapter la production des vêtements à l'évolution du corps humain. La solution, brevetée, ne consiste pas à produire des vêtements différents pour chaque morphologie. « Entre le prêt-à-porter et la haute couture, nous proposons une synthèse du meilleur des deux mondes », rappelle Audrey-Laure Bergenthal. Le robot mécatronique est réalisé dans un matériau qui imite la souplesse de la peau. Des capteurs permettent de mesurer la pression exercée par le tissu sur le corps. Le robot est capable de passer d'une morphologie à une autre en moins de 90 secondes.

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« Il est urgent que l'industrie de la mode se remette en cause »

Euveka (10 salariés) a connu une montée en puissance progressive dans la décennie 2010, suivie d'un coup d'arrêt dû à sa capitalisation trop fragile. En 2018, l'entreprise réalisait 1,13 million d'euros de chiffre d'affaires pour un résultat net déficitaire d'1,76 million d'euros. Elle a été sauvée avec l'appui de Sofimac, société de capital-investissement établie à Clermont-Ferrand. Une levée de fonds (série A) de 5 millions d'euros est prévue en 2023 pour soutenir sa croissance à l'international, où Euveka revendique désormais 60 % de son activité. « Grâce au chiffre d'affaires que notre activité a généré dès le départ, nous avons déjà investi 15 millions d'euros dans le développement. Nous ferons ce qu'il faut pour grossir et devenir leader sur ce marché. Il n'y a pas de concurrent. Amazon a choisi de devenir client de notre solution », expose Audrey-Laure Bergenthal.

Le projet s'inscrit dans un contexte industriel et dans un écosystème chahutés par les enjeux du développement durable. « J'y ai découvert il y a quinze ans des processus moyenâgeux qui ne tenaient pas compte de la diversité des morphologies. Dans mon environnement, on se plaignait du manque de diversité de la mode », rapporte Audrey-Laure Bergenthal.

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Version masculine et un pied robotisé en préparation

Juriste en propriété industrielle, la future fondatrice d'Euveka prévoyait un troisième cycle d'études à Harvard. Mais son parcours a bifurqué vers un BTS de stylisme et de modélisme. « L'industrie de la mode a réussi de jolies choses. On sait produire rapidement, mais on ne produit pas en local. Le prêt-à-porter a permis à tout le monde de s'habiller à moindre coût, mais cette révolution a ses limites. La dépendance vis-à-vis de la Chine est dramatique. Il est urgent que cette industrie se remette en cause », propose Audrey-Laure Bergenthal, qui défend « une approche globale qui va de pair avec le "Produire mieux" ».

Le robot est produit en Rhône-Alpes, où Euveka a trouvé des réseaux de fournisseurs. Les projets d'expansion promettent une variante masculine du mannequin robot, lancé en fin d'année 2024, ainsi qu'un pied robotisé pour offrir une solution équivalente dans l'industrie de la chaussure. Une solution dérivée sera ensuite implémentée sur les sites de vente en ligne, pour permettre aux consommateurs finaux de sélectionner leur taille de vêtement sans risque de devoir retourner un produit dont la coupe s'avère inadaptée.

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« Tech for Future » est le grand événement tech de La Tribune, piloté par les rédactions de La Tribune et soutenu par des partenaires officiels tels que la Mission French Tech, Bpifrance, Business France, BNP Paribas, Dalkia et Deloitte, ainsi qu'une centaine d'acteurs de la tech. Il se compose d'une tournée en janvier et février dans tous les territoires (11 étapes dont 8 en métropole et 3 en Outre-Mer), pour repérer les innovations qui changent le monde dans tous les domaines, et des débats à chaque étape sur le rôle économique, sociétal et géopolitique de la tech pour la France et l'Europe.

Au terme de cette tournée, 51 startups de tous les territoires ont été primées. Parmi elles, La Tribune a révélé au Grand Rex de Paris, le 6 avril, les 10 grands gagnants 2023. Après sa victoire lors de la sélection dans la région Aura, Euveka est le grand gagnant national du prix « Data & IA ».

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Commentaire 1
à écrit le 11/04/2023 à 8:51
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wow, c'est triste d'en arriver la! de mon temps on avait du bon sens, et on commencait par faire des etudes de marche en s'interessant a ses clients! en particulier on essayait de voir si ce qu'on allait produire allait etre achete...apres avoir fait...

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