Etats-Unis : Google visé par une plainte gouvernementale pour « monopole » sur le marché de la publicité en ligne

Le ministère américain de la Justice a porté plainte mardi contre Google pour « monopole » sur le marché de la publicité. Selon des experts, le groupe récolte plus d'un quart de toutes les dépenses publicitaires numériques et plus de la moitié des recettes publicitaires adossées aux recherches en ligne.
Le ministère et huit Etats américains, dont la Californie et New York, demandent à la justice de condamner le groupe californien pour infraction au droit de la concurrence.
Le ministère et huit Etats américains, dont la Californie et New York, demandent à la justice de condamner le groupe californien pour infraction au droit de la concurrence. (Crédits : ANDREW KELLY)

Google dans le viseur des autorités américaines. Le ministère américain de la Justice accuse en effet le moteur de recherche d'utiliser « des méthodes anticoncurrentielles et illégales pour éliminer, ou réduire drastiquement, toute menace à sa domination sur les technologies utilisées pour la publicité numérique ».

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Le ministère et huit Etats américains, dont la Californie et New York, demandent à la justice de condamner le groupe californien pour infraction au droit de la concurrence, de lui faire payer des dommages et d'ordonner la cession de ses activités liées à la vente d'espaces publicitaires en ligne.

La plainte explique que Google contrôle aussi bien les technologies utilisées par « quasiment tous les sites web » pour vendre des bandeaux ou fenêtres pop-up aux marques, que les outils dont se servent les annonceurs pour acheter ces espaces, ainsi que le marché où ont lieu les transactions. « Les dommages sont clairs : les éditeurs de sites internet gagnent moins, et les annonceurs dépensent plus », assènent les plaignants.

« Bien que Google ait affaire à une concurrence accrue depuis quelques années, sa part de marché reste inégalée », note Evelyn Mitchell, analyste d'Insider Intelligence. Selon elle, le groupe récolte plus d'un quart de toutes les dépenses publicitaires numériques et plus de la moitié des recettes publicitaires adossées aux recherches en ligne.

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La publicité numérique, « un secteur hautement concurrentiel » selon Google

Le ministère « essaie de désigner des gagnants et des perdants » dans le secteur de la publicité numérique, qui est « déjà hautement concurrentiel », a réagi un porte-parole de Google. La société dit estimer que si le ministère l'emportait, son approche « ralentirait l'innovation, augmenterait les frais de publicité et rendrait plus difficile la croissance de milliers de petites entreprises et d'éditeurs ».

« La concurrence pour les recettes publicitaires est féroce en ligne et hors ligne », appuie la CCIA (Computer & Communications Industry Association) dans un communiqué. Cette association professionnelle qui représente l'industrie numérique estime que le ministère devrait prendre en compte l'ensemble du marché publicitaire, pas seulement la partie numérique. « La position du gouvernement selon laquelle les pubs en ligne ne sont pas en concurrence avec le papier, la radio, la télévision et les panneaux dans la rue défie la raison », lance la CCIA. Mais pour le ministère et les huit Etats, c'est bien d'internet qu'il s'agit.

« Un internet ouvert » est « indispensable à la vie américaine »

« Un internet ouvert » est « indispensable à la vie américaine », énonce la plainte en introduction. Les plaignants font valoir que les publicités numériques sont nécessaires pour financer les sites internet, et qu'elles sont « achetées et vendues dans des volumes énormes en quelques fractions de seconde », selon un fonctionnement très différent de celui des journaux imprimés ou régies des chaînes télévisées.

« Plus de 13 milliards de publicités sont vendues chaque jour sur le web aux Etats-Unis », ajoutent les plaignants. Ils assurent que Google a abusé de sa position dominante pour exclure ses rivaux, notamment en « prenant systématiquement le contrôle d'une large variété d'outils high-tech utilisés par les éditeurs, les annonceurs et autres acteurs du marché ».

« Nous accusons Google d'avoir capté les revenus des éditeurs pour ses propres profits et punis ceux qui cherchaient des alternatives », déclare la ministre adjointe Vanita Gupta, citée dans un communiqué. « Ces méthodes ont affaibli l'internet libre et ouvert, et fait augmenter les coûts pour les entreprises et pour le gouvernement des Etats-Unis, y compris l'armée ».

Google pourrait être forcé à vendre une partie de son activité publicitaire

C'est la deuxième plainte lancée par le ministère contre le groupe californien depuis l'investiture du président Joe Biden il y a deux ans. La première, qui porte sur la domination de son moteur de recherche, doit déboucher sur un procès cette année. Aux Etats-Unis, l'entreprise affronte déjà des poursuites lancées fin 2020 par une coalition d'Etats emmenée par le Texas.

Google déjà condamné en France par l'Autorité de la concurrence

Selon leurs accusations, Google a cherché à évincer toute concurrence en manipulant les ventes aux enchères publicitaires. « Google devrait être inquiet » constate Evelyn Mitchell. La société « pourrait être forcée de vendre une partie de son activité publicitaire ».

Google a déjà été condamné dans le passé à des amendes pour infraction au droit de la concurrence, notamment par l'Union européenne. En France, en juin 2021, l'Autorité française de la concurrence avait sanctionné Google d'une amende de 220 millions d'euros pour abus de position dominante dans le secteur de la publicité en ligne. Le géant américain, qui n'avait pas contesté les faits, s'était engagé à améliorer l'interopérabilité de ses services avec des solutions tierces.

En Allemagne, Paypal fait l'objet d'une procédure pour des entraves au droit de la concurrence

L'Office anti-cartel allemand a annoncé en début de semaine l'ouverture d'une procédure contre le service américain de paiement en ligne Paypal pour des entraves présumées au droit de la concurrence dans ses contrats avec les commerçants en ligne.

La procédure « porte sur les règles relatives aux conditions d'utilisations de Paypal en Allemagne », pour les entreprises utilisant ce service pour vendre leurs produits sur Internet, a détaillé l'organisme dans un communiqué. Ces conditions d'utilisations imposent aux commerçants de « ne pas proposer de prix plus faibles aux clients utilisant un service de paiement moins onéreux que Paypal », a-t-il complété. Or, « Paypal est non seulement le premier fournisseur de paiement en ligne en Allemagne, mais aussi le plus cher », commente l'Office. Les frais payés par les vendeurs pour utiliser le service de PayPal représentent 2,49% du montant du paiement, auxquels s'ajoutent 0,35 euro par transaction.

Cette clause « pourrait donc restreindre la concurrence et constituer une atteinte à l'interdiction des abus (de position dominante) », estime Andreas Mundt, le président de l'institution. « Si les commerçants sont empêchés de prendre en compte les coûts des différentes méthodes de paiement (...) d'autres plateformes pourraient être empêchées d'émerger sur le marché », a-t-il développé. Si une position dominante est prouvée, l'institution pourrait contraindre Paypal à supprimer cette clause.

Cette annonce s'inscrit dans une large offensive ces dernières années des autorités de la concurrence allemandes et européennes contre les géants du numérique.

(Avec AFP)

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