Cette « triple révolution » qui menace la télévision traditionnelle

Baisse de la durée d’écoute de la télévision au profit des géants du Net et de la vidéo à la demande, concurrence accrue sur le marché de la publicité, démocratisation des téléviseurs connectés… Roch-Olivier Maistre, le président de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, fait le point sur les mutations qui obligent les chaînes classiques à se transformer pour ne pas sombrer.
Pierre Manière
Roch-Olivier Maistre, le président de l'Arcom.
Roch-Olivier Maistre, le président de l'Arcom. (Crédits : Reuters)

C'est une véritable tempête, rien de moins, qu'essuie aujourd'hui la télévision traditionnelle. Voici ce qu'a rappelé, mardi soir, Roch-Olivier Maistre, le président de l'Arcom, lors de son audition par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale. Le chef de file du régulateur de l'audiovisuel a dessiné les contours de la « triple révolution » qui bouscule les chaînes, dans un paysage en pleine « transformation ».

En premier lieu, la sacro-sainte durée d'écoute de la télévision (DEI) est « en diminution structurelle », a-t-il rappelé. Celle-ci reste « encore très élevée » dans l'Hexagone (environ 3 heures 30 par jour), mais a dégringolé de près de 20% depuis 2020. En parallèle, ceux qui regardent la télévision sont de plus en plus vieux. L'âge moyen du téléspectateur est désormais de 57 ans. « Il a augmenté de 10 ans en 10 ans ! », résume Roch-Olivier Maistre. Les jeunes désertent progressivement les chaînes traditionnelles au profit des services de vidéo à la demande (Amazon, Disney ou Netflix) comme des réseaux sociaux (Tiktok, Snapchat et Instagram).

La fin du règne sans partage de la TNT

L'essor des grandes plateformes vient bousculer les chaînes. « Elles constituent pour nos groupes nationaux une concurrence croissante sur l'acquisition, les coûts et la diffusion de programmes inédits, en audiovisuel comme en cinéma, et sur l'accès aux talents », poursuit le président de l'Arcom. Surtout, elles se taillent une part gigantesque du marché de la publicité, qui est le carburant des chaînes privées classiques.

« Les acteurs numériques absorbent à eux-seuls plus de la moitié des ressources publicitaires consacrées au médias, détaille Roch-Olivier Maistre. En 2022, nos médias traditionnels tiraient seulement 12% de leurs recettes publicitaires totales de leurs offres numériques. La même année, 66% des recettes de la publicité numérique en France était captée par trois acteurs extra-européens : Google, Meta et Amazon. »

Une autre mutation concerne, elle, la distribution des contenus. S'en est fini du règne sans partage de la TNT. « Elle n'est désormais le seul mode d'accès à la télévision que pour un peu moins de 20% des foyers », souligne le patron de l'Arcom. En face, les téléviseurs connectés effectuent une percée fulgurante. « 88% des foyers équipés d'un téléviseur avaient une 'smart TV' fin 2022, insiste-t-il. La distribution directe via Internet (OTT) vient bousculer le modèle historique de la box. » La télévision se mue « en véritable magasin d'applications, à l'image de nos smartphones », renchérit le président de l'Arcom. Elle est, en résumé, de moins en moins la chasse gardée des chaînes.

« Le statu quo n'est pas une option »

Impossible, pour les chaînes traditionnelles, de rester les bras croisés. Dans ce contexte, « le statu quo n'est pas une option pour nos acteurs, publics comme privés », a assené Roch-Olivier Maistre. Tous cherchent d'ailleurs à étendre leur empreinte dans l'écosystème numérique, au risque de passer un jour l'arme à gauche. Après avoir échoué à se marier, TF1 comme M6 ont par exemple étoffé leurs offres digitales. Sous la coupe de Rodolphe Belmer, TF1 appuie sur le champignon dans le streaming gratuit, et se développe dans la publicité ciblée. Ces stratégies constituent, au regard de Roch-Olivier Maistre, un impératif. « Nos groupes doivent désormais aller les publics là où ils sont », martèle-t-il.

Pierre Manière

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Commentaires 12
à écrit le 09/10/2023 à 15:19
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Quand on cherche bien, avec plus de 20 chaînes, généralement on trouve: documentaires, informations, concerts, voire films de qualité ou sport...Évidemment, si on ne cherche que de quoi satisfaire sa soif de spectacle, suspense, rire toujours insat...

à écrit le 06/10/2023 à 8:39
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Le pire fléau de l'humanité est en danger, enfin une bonne nouvelle !

à écrit le 05/10/2023 à 11:21
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Faut remettre les choses a leur place, avec 5 chaines et canal+ en plus, on avait des films de diffusés sur les 4 a 5 chaines car souvent la 3 et la 5 avaient peu de diffusions intéressante... a ce jour avec les plus de 20 chaines, y a plus rien a vo...

à écrit le 05/10/2023 à 5:16
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Il y a encore des gens qui regardent la tele ?

à écrit le 04/10/2023 à 18:06
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Pendant ce temps : Bientôt la fin de l’anonymat sur les réseaux sociaux ? Ce sujet épineux est discuté actuellement à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique. En commission la semaine d...

le 04/10/2023 à 18:33
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"Suzanne Vergnolle, rappelant qu’aujourd’hui il existe un système permettant d’identifier une personne en ligne, notamment par le biais de son adresse IP". Exactement, c'est parfaitement juste. Que les "rois" de la réflexion règlent déjà la sécurité ...

le 05/10/2023 à 5:18
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Comme en Chine. C'est bien la micronnie. Next time, votez mieux.

à écrit le 04/10/2023 à 15:46
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la TV c est mort. qui regarde encore la TV a part les retraités ? d ici 20 ans ca sera aussi utile que le telegraphe

le 04/10/2023 à 21:01
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Pas faux... MAIS; ce qu'on y trouve est par essence débile. Et comme la seule différence avec la TV 'fibre', c'est que c'est pire, mais TRES payant... quel choix ???

le 05/10/2023 à 5:19
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@PM. Essayez de lire. Ca occupe bien les neuronnes, encore faut-il en avoir

à écrit le 04/10/2023 à 14:12
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La mesure du nombre d'usagers en mode TNT ne peut être que fausse, à comparaison de la tv connectée. Le recul du financement public remplacé par les recettes publicitaires dirige tout droit vers la TV connectée et la fin d'une certaine tranquillité ...

à écrit le 04/10/2023 à 14:02
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Quand on voit ce qui passe à la télé, pas de quoi y passer sa soirée: les titres des infos , la météo et on éteint la boite à idiots. Netflix et autres auront à moyen terme le même pb: comment générer de l'attractivité pour capter les gogos (abon...

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