
Il ne fait pas bon d'être l'un des dirigeants de Tiktok en ce moment. La commission d'enquête du Sénat a annoncé ce vendredi qu'elle entendra, jeudi 8 juin, Eric Garandeau, directeur des affaires publiques de TikTok SAS, le matin, puis l'après-midi, Marlène Masure, directrice générale des opérations France, Benelux et Europe du Sud de TikTok SAS. Ces auditions seront ouvertes à la presse. S'agissant d'une commission d'enquête parlementaire, les personnes convoquées sont auditionnées sous serment.
La commission a également prévu d'entendre le 19 juin le ministre chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, Jean-Noël Barrot.
TikTok soupçonné d'exploiter les données des mineurs
Créée à la demande du groupe Les Indépendants, la commission d'enquête sénatoriale sur l'utilisation du réseau social, son « exploitation des données » et sa « stratégie d'influence », devrait rendre ses conclusions avant la pause estivale du Parlement. Elle a déjà entendu de nombreux experts, ainsi que les eurodéputés Raphaël Glucksmann, président de la commission spéciale sur l'ingérence étrangère dans l'ensemble des processus démocratiques de l'Union européenne, Nathalie Loiseau, présidente de la sous-commission « sécurité et défense », ou encore Alain Bazot, président de l'association de consommateurs UFC-Que choisir.
Aux Etats-Unis, les accusations sont encore plus graves. TikTok est accusé par ses détracteurs de permettre l'accès aux autorités chinoises à des données d'utilisateurs du monde entier, ce que l'application conteste. Son patron, Shou Zi Chew, un Singapourien diplômé de Harvard, avait tenté difficilement de défendre son application en mars, devant le Congrès américain, face à des élus intraitables, qui ont pour la plupart condamné d'avance TikTok.
L'application bannie des téléphones des fonctionnaires
La Maison Blanche, la Commission européenne, ainsi que les gouvernements canadien, britannique, australien et d'autres organisations ont récemment interdit à leurs fonctionnaires d'utiliser TikTok sur leurs téléphones professionnels. Les Etats-Unis accusent notamment TikTok, filiale du groupe chinois ByteDance, de servir d'outil à Pékin pour espionner et manipuler les Américains. De son côté, le ministère de la Justice australien affirme que TikTok présente « des risques importants pour la sécurité et la vie privée » en raison de la « collecte massive de données sur les utilisateurs ».
Le Parlement du Montana est même allé plus loin en adoptant, mi-avril, un texte qui ordonne aux magasins d'applications mobiles (Apple et Google) de ne plus distribuer TikTok à partir du 1er janvier 2024. Le Congrès et la Maison Blanche réfléchissent à des projets de loi similaires.
Mais ByteDance est bien décidé à ne pas se laisser faire. Cette interdiction « enfreint la constitution des Etats-Unis de multiples façons », affirme l'entreprise, et notamment le premier amendement qui garantit la « liberté d'expression », argue le communiqué de ByteDance, consulté par l'AFP.
« TikTok exerce son jugement éditorial, un droit protégé par la Constitution, pour diffuser et promouvoir des contenus créés par des tiers », indiquent les avocats de l'entreprise. La plainte évoque en outre un principe d'équité. « Au lieu de réguler les réseaux sociaux en général, la loi bannit TikTok, et seulement TikTok pour des raisons punitives (...) fondées sur des inquiétudes spéculatives au sujet de la sécurité des données et de la modération des contenus », argumentent les juristes.
L'entreprise fait aussi valoir que l'Etat américain n'a pas le pouvoir légal de bannir l'application pour des motifs de sécurité nationale, un sujet qui relève de l'Etat fédéral.
(Avec AFP)
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