5G : la guerre des prix se profile en Belgique

L’opérateur roumain Digi, spécialiste des offres à bas prix, a profité des enchères de fréquences 5G pour entrer sur le marché belge du mobile. Il donnera, sans nul doute, du fil à retordre au trio Proximus, Orange et Telenet.
Pierre Manière
Mitch De Geest, le PDG de Citymesh, qui s'est allié avec le roumain Digi pour déployer la 5G en Belgique.
Mitch De Geest, le PDG de Citymesh, qui s'est allié avec le roumain Digi pour déployer la 5G en Belgique. (Crédits : Reuters)

La compétition s'annonce particulièrement féroce, dans les années à venir, sur le marché belge des télécoms. La semaine dernière, les enchères pour l'attribution de nouvelles fréquences mobiles ont permis de faire rentrer deux nouveaux acteurs. Il s'agit de Network Research et de Citymesh Mobile. C'est ce dernier qui fait trembler les opérateurs en place. Citymesh Mobile est une coentreprise détenue par l'opérateur B2B belge Citymesh (à hauteur de 51%) et le roumain Digi (49%), un champion du low cost redouté sur le Vieux Continent.

Cette attribution de fréquences était particulièrement attendue. Elle concernait d'abord du spectre radioélectrique dans les bandes 700 MHz et 3.600 MHz. Il s'agit, ici, de fréquences qui n'ont jamais été utilisées par les opérateurs, et qui seront dédiées à la 5G. L'attribution visait, aussi, à remettre en jeu des fréquences 900 MHz, 1.800 MHz, et 2.100 MHz, qui étaient utilisées pour la 2G, la 3G et la 4G. Le gouvernement belge, qui souhaitait doper la concurrence sur le marché du mobile, a mis en place des règles pour favoriser l'arrivée de nouveaux entrants. La manœuvre permettait, aussi, de s'assurer d'une belle bagarre entre les acteurs pour décrocher du spectre, et donc d'en tirer plus d'argent.

Un pactole de 1,2 milliard d'euros pour l'Etat

Le gouvernement belge a, sur ce front, bien réussi son coup. Les arrivées de Network Research et de Citymesh Mobile en témoignent. Idem pour la valorisation du spectre. Les opérateurs vont, au total, débourser quelque 1,2 milliard d'euros, ce qui constitue un prix plutôt élevé au regard de la taille et de la population du pays. Au terme de l'attribution, c'est l'opérateur historique Proximus qui a décroché le plus de fréquences, soit 170 MHz de spectre pour 491 millions d'euros. Il est suivi par Orange Belgium, la filiale du géant français des télécoms, et Telenet. Tous deux ont mis la main sur 150 MHz pour respectivement 322 et 264 millions d'euros. Citimesh Mobile a, pour sa part, acquis 80 MHz de spectre pour 114 millions d'euros. Network Research, lui, s'est contenté de 20 MHz dans la seule bande des 3.600 Mhz, pour 11 millions d'euros.

Ce dernier dispose seulement d'un peu de spectre 5G dans des bandes hautes, dont la portée est très limitée. Les ambitions de ce spécialiste belge de l'informatique devraient logiquement se cantonner à déployer des réseaux privés pour le compte de clients entreprises ou d'administrations publiques. Mais on le voit mal, dans ces conditions, se lancer sur le marché grand public. A contrario, Citymesh Mobile s'est doté d'un portefeuille de fréquences confortable, aussi bien en 5G qu'en 2G/3G/4G. Nul doute qu'il vise, ici, les particuliers. Le partage des tâches entre les propriétaires de cette coentreprise semble évident. Citymesh se focalisera sur les clients B2B. Tandis que Digi, lui, ciblera le grand public.

Le « perturbateur » Digi

De quoi faire grincer des dents les Proximus, Orange Belgium et Proximus... Tous vont devoir composer avec un concurrent dont l'agressivité est bien connue. Le géant français des télécoms en sait quelque chose. En Espagne et en Roumanie, Orange a particulièrement souffert des offres à bas prix de ce nouveau « Free » des télécoms, dont les ambitions à l'international vont crescendo. De l'autre côté des Pyrénées, c'est notamment l'insolente réussite de Digi qui a notamment poussé Orange à se marier avec son rival MasMovil...

Dans une note publiée ce lundi, les analystes de l'agence de notation Moody's s'attendent, sans surprise, à ce que Digi amorce une guerre des prix, et casse les tarifs des abonnements pour chiper un maximum d'abonnés à la concurrence. « Nous nous attendons à ce que Digi agisse comme un perturbateur sur le marché belge de la téléphonie mobile en se basant sur son expérience réussie en Espagne », expliquent-ils. Dans ce pays, le trublion roumain a vu sa base d'abonnés croître de 27% en un an, à 3 millions de fidèles. Dans l'Internet fixe, il a multiplié sa base d'abonnés par deux l'an dernier, à 480.000 clients.

Une recomposition favorable aux consommateurs

Avec Digi, c'est tout le paysage du mobile qui pourrait être bousculé en Belgique. Aujourd'hui, c'est Proximus qui mène la danse, avec une part de marché de 39% en mars 2021. L'opérateur historique est talonné par Orange Belgium (24%) et Telenet (22%). Une très probable guerre des prix profiterait d'abord aux consommateurs. Mais cela ne sera pas sans conséquence sur les investissements des opérateurs, en particulier concernant le déploiement, toujours très coûteux, des réseaux.

Pierre Manière

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