Une défense plombée par des aveux initiaux

En février 2008, Jérôme Kerviel "reconnaît" des faits pour lesquels il cherchera ensuite à démontrer la responsabilité de la banque.

Pour tenter de démontrer que Jérôme Kerviel a abusé de la confiance de la Société Générale, le ministère public ne se privera pas de s'appuyer sur les déclarations de l'ex-trader lors des interrogatoires réalisés par la police judiciaire, puis au cours des premières auditions face aux juges d'instruction. "Je reconnais avoir pris de grosses positions qui pourraient être qualifiées selon eux 'hors limite de mon mandat', que j'ai masquées par une opération fictive", a ainsi déclaré le suspect dès son premier jour de garde à vue, le 26 janvier 2008, selon le procès-verbal. Mais aussi: "J'ai alors fourni de faux justificatifs de saisie sur ces opérations à savoir de faux e-mails". Ou encore, le lendemain: "À supposer que mes engagements aient été réellement affichés, clairement, sans couverture, ma hiérarchie aurait imposé au regard de leur importance que je coupe mes positions".

De même, devant les juges d'instruction, le 4 février: "J'ai caché à M. Cordelle (mon supérieur hiérarchique direct) les dépassements que j'ai réalisés dans mes positions." Ou encore: "Je masquais l'exposition. La Société Générale ne connaissait donc pas mes positions." Puis, le 16 avril: "Il est exact que j'ai saisi, je dirais des centaines, de multiples deals fictifs dans le système Eliot afin de masquer mes positions et mes résultats."

Pour tenter de relativiser ces aveux, la défense de Kerviel va s'employer à démontrer que la banque l'a en réalité laissé faire, voire implicitement encouragé en s'abstenant de le stopper. Et que ses dissimulations étaient une simple façade qui ne pouvait réellement tromper les supérieurs de Jérôme Kerviel et les services de contrôle de la banque.

négligences avérées

Dans son livre, "l'Engrenage", qui a fait l'objet de relectures attentives de la part de ses avocats, Jérôme Kerviel affirme ainsi qu'il existe "entre traders et responsables un code tacite fait de silences et de brèves allusions". Puis: "La vérité à propos de mes résultats relevait du secret de Polichinelle puisque la somme, qui correspondait à des gains bien réels et engrangés par la banque, apparaissait en trésorerie et en comptabilité". Ou encore: "À plusieurs reprises cependant, et ce dès le mois d'avril 2007, mes supérieurs hiérarchiques avaient été alertés par les services de contrôle de la présence d'opérations fictives sur mon périmètre, mais eux-mêmes ne m'avaient jamais mis en demeure d'arrêter ces pratiques ni n'étaient venus me poser la moindre question". Reste à savoir si la cour se laissera convaincre par l'idée que les négligences avérées de la banque suffisent à considérer que sa confiance n'a pas été abusée.

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