Paiement fractionné : le Crédit Agricole poursuit le mouvement de consolidation avec le rachat de Pledg

Le groupe bancaire a annoncé son intention de racheter, d’ici la fin du trimestre, Pledg qui devait faire face à un marché de plus en plus difficile avec la hausse des taux et la dégradation du coût du risque. La filiale spécialisée dans le crédit à la consommation Sofinco va pouvoir bénéficier de la plateforme technologique de la fintech pour muscler son offre de paiement fractionné, devenu incontournable auprès des enseignes marchandes.
Au moins un Français sur quatre a déjà utilisé un paiement fractionné.
Au moins un Français sur quatre a déjà utilisé un paiement fractionné. (Crédits : DR)

Sur un marché frappé de plein fouet par la hausse des taux, le mouvement de concentration dans le paiement fractionné se poursuit. Après la prise de contrôle d'ONEY par BPCE en 2020, et le rachat de FLOA par BNP Paribas en 2022 pour 250 millions d'euros, c'est au tour du Crédit Agricole de s'intéresser à un spécialiste du paiement fractionné. Via sa filiale Crédit Agricole Consumer Finance (CACF), le groupe bancaire vient en effet d'annoncer son intention d'acquérir la fintech Pledg.

Lancé en 2017, et soutenu au départ par Crédit Mutuel Arkéa, Pledg propose à un marchand une solution technique de paiement en plusieurs fois pour les achats des clients. L'avantage pour le vendeur ? Il est réglé immédiatement, et en intégralité, via une avance de trésorerie.

Lire aussiPrêt-à-porter : inflation, fast fashion... La « correction n'est pas terminée » pour le milieu de gamme

Une formule très appréciée du commerce, notamment du commerce en ligne. De fait, elle permet d'augmenter le taux de conversion (achat sur visite) et le panier moyen. Ce mode de paiement a accompagné le boom du e-commerce durant la pandémie, avec des taux de croissance à deux chiffres.

Opération finalisée à la fin du premier trimestre

Aujourd'hui, Pledg revendique plus de 200 clients marchands et une production annuelle de 220 millions d'euros. La fintech a noué en 2022 un accord de partenariat avec Django, une filiale spécialisée dans le paiement fractionné « éthique » de La Banque Postale, pour lui fournir l'accès à sa plateforme technologique, en marque blanche.

L'opération de rachat par le Crédit Agricole devrait être finalisée, avant la fin du premier trimestre. Le montant de la transaction n'a pas été dévoilé. En 2021, la fintech avait levé 15 millions d'euros de capital, après une première levée de fonds de 1,2 million d'euros en 2017. Les levées de fonds se sont brusquement taries au second semestre 2022 dans l'univers de la fintech. La dernière grande opération du secteur a été l'augmentation de capital de 115 millions d'euros, réalisée en février 2022 par la fintech Alma, l'un des derniers acteurs français indépendants.

Lire aussiLa fintech Alma surfe sur l'engouement du paiement fractionné

De fait, malgré son accord avec La Banque Postale, Pledg n'a pas rencontré le même succès que Alma, qui a notamment remporté un contrat décisif avec la SNCF pour permettre l'achat de billets de train en plusieurs fois. « L'adossement bancaire était l'issue qui s'imposait », avance Nicolas Pelletier, PDG de Pledg, dans un communiqué. Il ouvre ainsi à Sofinco (CACF) sa technologie tout en profitant du groupe bancaire pour sécuriser son refinancement.

« Cette opération va positionner Sofinco comme l'acteur de référence sur le marché français. C'est un service (le paiement fractionné, NDLR) devenu incontournable pour répondre à la demande de nos différents partenaires », explique Franck Oniga, directeur général de Sofinco.

Années difficiles

Après les années de folle croissance en 2020 et 2021, l'année 2022 a été particulièrement difficile pour le paiement fractionné, et pour le crédit à la consommation en général. Des poids lourds comme ONEY, filiale de BPCE, ou BNP Personal Finance, ont dû mener de profondes réorganisations, avec parfois l'arrêt d'activités dans certains pays européens.

« 2022, et dans une moindre mesure en 2023, ont été compliqués pour la profession », reconnaît un banquier.

Le coût du refinancement a explosé et le coût du risque est reparti à la hausse, au mieux sur des niveaux d'avant crise sanitaire. Un effet de ciseaux désastreux dans un modèle d'affaires à faible marge et gros volumes. D'autant que les Français, en perte de pouvoir d'achat avec l'inflation, ont réduit leur consommation, notamment sur les segments non essentiels, prisés par le paiement fractionné (électroniques, voyages, beauté... ). Bref, une sorte de « tempête parfaite » qui annonçait des pertes - Alma a publié une perte de 32 millions d'euros en 2022, l'un des très rares acteurs à publier ses chiffres - et un mouvement de consolidation.

Crédit Agricole en retrait

La France est une terre ancienne pour le paiement fractionné, à la fois en raison d'une réglementation stricte du crédit à la consommation, mais aussi à des acteurs bancaires issus du monde de la grande distribution, comme ONEY (Auchan) ou FLOA (Casino).

Faute de statistiques officielles, le marché du paiement fractionné en France est estimé à 5 milliards d'euros, avec ONEY et FLOA. Ces deux derniers se disputent la première place (environ 30% de part de marché chacun). Toutefois, la fintech Alma a marqué des points en remportant l'appel d'offres de la SNCF, au nez et à la barde des leaders du secteur.

Toutes les études montrent que le recours au paiement fractionné s'impose de plus en plus dans les comportements des consommateurs, surtout pour les plus jeunes générations, plus actives en ligne. Sur ce marché en plein essor, le Crédit Agricole était jusqu'ici clairement en retrait, même si son offre de paiement par carte en 3X ou 4X a connu un bon développement. Enfin, plusieurs acteurs étrangers s'intéressent au marché français, comme l'Américain PayPal, le Suédois Klarna, leader mondial, qui revient en force après des débuts difficiles, ou plus discret, l'Italien Scalapay.

Nouveaux univers

Les prochaines années verront le déploiement de la nouvelle directive européenne. Celle-ci intègre désormais le paiement fractionné et les mini-prêts dans la réglementation du crédit à la consommation (avec obligation de vérifier la solvabilité de l'emprunteur ou d'afficher le TAEG). De fait, le paiement fractionné se transforme très vite et allonge sa duration, bien au-delà des trois mois.

Ainsi, ONEY propose désormais un paiement en 12 fois via la carte bancaire. De nouvelles « verticales » apparaissent, comme le voyage, mais aussi la santé, notamment l'optique. Mais, c'est surtout l'économie circulaire qui devrait connaître de nouvelles innovations, notamment le co-financement de biens avec reprise.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 16/02/2024 à 11:12
Signaler
Mais encaissement unifié.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.