Les pays émergents en pointe sur l'adoption des cryptomonnaies

Où en est-on sur l'adoption des crypto-actifs, qui ont connu un âge d'or en 2021, avant de voir leurs cours freiner brutalement, stoppés par le relèvement des taux d'intérêt ? L'intérêt reste palpable sur les plateformes où ils s'échangent mais, pour l'heure, la course à l'adoption se fait en ordre dispersé, comme en témoignent les chiffres de l'étude annuelle du cabinet Chainalysis. L'Europe de l'ouest, du nord et centrale pèse 22% de la valeur des transactions mais avec des situations diverses selon le pays. De même, les usages des cryptos sont multiples et aucun ne tire encore son épingle du jeu, entre le trading sur les places de marché, l'essor des NFT ou bien les services naissants de la finance décentralisée. Une certitude, le coup de froid du printemps dernier a révélé un marché « résilient » qui est là pour durer, sous une forme ou une autre.
Jeanne Dussueil
Les sanctions des Occidentaux contre la Russie en guerre en Ukraine ont-elles accéléré l'adoption à l'est ?
Les sanctions des Occidentaux contre la Russie en guerre en Ukraine ont-elles accéléré l'adoption à l'est ? (Crédits : DADO RUVIC)

L'hiver des cryptos, survenu au printemps dernier dans la foulée de la chute des marchés, n'a pas refroidi l'intérêt pour les cryptomonnaies sur la planète. Si la chute de près de 70% en un an du cours du bitcoin, la star des cryptos, entraînant dans son sillage les autres actifs, a été spectaculaire en avril dernier, la circulation de ces jetons numériques échangés en dehors de toute autorité centrale, n'a, elle, visiblement pas faibli.

Celle-ci s'est « stabilisée » en 2022, mais de manière inégale dans le monde, avec de nouvelles vagues observées dans les pays émergents tels le Vietnam (1er), les Philippines (2ème), l'Ukraine (3ème), l'Inde... le Pakistan, le Brésil, la Thaïlande, la Russie et la Chine pour le Top 10, selon le classement de Chainalysis sur l'adoption des cryptos publié fin octobre. Si la France suit cet engouement, l'an passé, elle n'a toutefois pas été la locomotive de l'Europe.

Une Europe hétérogène

En 2022, la vague crypto a davantage déferlé au Royaume-Uni qui se classe première du continent européen (et 17ème au global), avec 233 milliards de dollars de cryptos échangés entre juin 2021 et juin 2022, et en Allemagne (21ème, avec 195 milliards), où les échanges ont performé de +47%, portés notamment par une taxe à 0% sur les gains de long terme sur le capital, explique Chainalysis.

Regroupée dans un ensemble (« centrale, du nord et de l'ouest »), l'Europe pèse 21,9% de la valeur des transactions comparée au reste du monde, souligne l'étude. Ce qui en fait la première zone géographique de la « crypto économonie », note l'étude qui se base sur les données disponibles. D'autre part, l'Europe de l'est a compté pour 10% de la valeur reçue des cryptos entre juillet et juin 2022. L'Amérique du Nord est le second marché, avec une part de 19% de la valeur reçue sur la période.

Des usages encore éclatés

Sur les 146 pays étudiés par ce cabinet d'études, sur la période, la France occupe la troisième position des pays européens et 32ème au global, juste devant les Pays-Bas et l'Espagne. L'Hexagone a enregistré 150 milliards de dollars de transactions sur l'année étudiée, sur un rythme de croissance de 13% de l'activité « on-chain » (la demande de blocs pour le minage des cryptos) sur un an, selon l'étude.

Autrement dit, sur les cinq usages étudiés de ces nouveaux protocoles décentralisés de la blockchain, l'intérêt se confirme en France - déjà identifié en début d'année où 1 Français sur 12 détenait des cryptos, selon une autre étude - sans pour autant encore observer l'explosion d'un usage en particulier.

Dans cet Index 2022, la France est ainsi classée 20ème dans la catégorie du « commerce de la Finance décentralisée », dite « Retail DeFi ». Mais elle pêche encore sur les échanges de pair-à-pair (101ème), soit entre particuliers, là où performent au contraire le Vietnam ou encore les Seychelles qui ont créé des passerelles entre les paiements bancaires classiques sur Internet et le bitcoin par exemple.

Mais, selon Chainalysis, la récente adoption au niveau de l'Union européenne de deux textes phares, MiCA (la définition des crypto-actifs) et TFR (les transferts de ces actifs) devrait encourager le lancement de nouveaux services encadrés par ces nouveaux règlements.

Lire aussiMiCA et TFR, ces deux règles européennes qui vont révolutionner les cryptoactifs

Peu de contournements des sanctions pendant la guerre en Ukraine

Parmi les autres catégories de cette photographie annuelle de « l'adoption » que comptent créer les cryptos, on trouve les « prêts » (lending), le gaming (jeux), les NFT (jetons non fongibles qui authentifient la singularité et l'exclusivité d'un oeuvre numérique), du côté finance décentralisée (DeFI), mais aussi des services centralisés de la « CeFI », lorsque les algorithmes des blockchain sont contrôlés par des sociétés privées ou des institutions qui imposent les règles du KYC (Know your customer) qui prennent en charge les risques.

« La Chine est particulièrement forte dans les usages sur des services centralisés », note d'ailleurs le cabinet d'études. C'est aussi le cas dans d'autres pays où l'économie est particulièrement administrée ou contrôlée, tels la Russie, l'Inde (1ère sur la CeFI) ou encore la Turquie. A noter que les Etats-Unis, tout en étant champion de l'adoption globale (5ème), l'est de manière égale sur les services centralisés et décentralisés (3ème), et sont moins avancés sur les services de pair à pair (111ème).

En Europe, les spécialistes de la CeFI en 2022 ont fait leur preuve en Europe de l'Est où une croissance a été plus notable au moment du déclenchement de la guerre en Ukraine par la Russie. L'Europe de l'Est a ainsi échangé 360 milliards de dollars en 2022, soit 10% des échanges globaux. Les sanctions des Occidentaux contre la Russie ont-elles accéléré ce mouvement ? « Les marchés des crypto-monnaies ne sont probablement pas assez liquides pour permettre un contournement systématique et à grande échelle des sanctions», affirme Chainalysis.

Quid de la suite de cette adoption qui s'opère pour l'instant en ordre dispersé ? « Il est important de noter que l'adoption mondiale reste bien au-dessus de ses niveaux d'avant le marché du « bull market » (marché à la hausse NDLR) de 2019 », conclut Chainalysis qui insiste sur un marché des cryptos « résilient ».

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Jeanne Dussueil

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