Qui sont les Regtech, ces startups surfant sur la réglementation financière ?

Dans la famille des startups de la finance, émerge une nouvelle catégorie, les Regtech, qui proposent aux institutions financières des solutions pour rendre plus efficace et moins coûteuse l'application des différentes réglementations. Le cabinet KPMG a recensé plus de 240 startups en Europe, dont une petite cinquantaine en France, dans son panorama de l'écosystème Regtech. La lutte anti-blanchiment est le segment le plus représenté.
Juliette Raynal
La startup britannique Onfido fait partie des Regtech européennes les plus prometteuses selon le cabinet KPMG. Elle a développé des algorithmes d'intelligence artificielle pour vérifier l'identité des utilisateurs à partir d'un selfie.
La startup britannique Onfido fait partie des Regtech européennes les plus prometteuses selon le cabinet KPMG. Elle a développé des algorithmes d'intelligence artificielle pour vérifier l'identité des utilisateurs à partir d'un selfie. (Crédits : Onfido)

Le secteur foisonnant des startups de la finance, que l'on appelle les Fintech, regroupe des sous-catégories très variées. La plus importante et la première à s'être développée concerne les services de paiement à l'image de la cagnotte Leetchi ou de la plateforme Lemon Way. Sont ensuite arrivés les services de financement, comme October (ex-Lendix) et Younited Credit, ou encore les Assurtech qui s'attaquent au domaine de l'assurance.

Aujourd'hui, une autre famille de startups, beaucoup plus discrète, tend à émerger en proposant aux institutions financières des solutions pour rendre plus efficace et moins coûteuse l'application des nombreuses réglementations, grâce aux nouvelles technologies. On les appelle les Regtech et le cabinet de conseil KPMG vient d'en dresser un panorama détaillé à l'échelle européenne.

Une cinquantaine de Regtech en France

"Les Regtech représentent des acteurs très variés qui gravitent autour de la réglementation financière. Leur point commun est une meilleure utilisation des données détenues par les banques", expose l'étude, qui en recense 242 sur le Vieux Continent, dont 45 installées en France. Parmi elles : Dreamquark, qui vient d'obtenir un financement de 14 millions d'euros, Regmind, qui facilite le suivi des mises à jour réglementaires, ICA qui permet de minimiser les risques dans la gestion d'actifs, ou encore Scorée, qui optimise la gestion des justificatifs de conformité pour les assureurs et courtiers, Saagie spécialisée dans l'automatisation des reportings réglementaires, ou bien Neuroprofiler dans la modélisation des profils de risque.

Concrètement, les services de ces startups sont aussi vastes que la réglementation elle-même et balayent de nombreuses problématiques comme la lutte anti-blanchiment, la protection des données, la veille et le reporting réglementaires ou encore la gestion des risques et des actifs.

La lutte anti-blanchiment d'abord

"La lutte anti-blanchiment correspond à la catégorie la plus représentée (37%) parmi les Regtech européennes", note le rapport. "Cette prédominance n'est pas surprenante car la lutte anti-blanchiment constitue l'un des sujets majeurs de préoccupation des établissements financiers et c'est là où il est possible d'automatiser un certain nombre de process", commente Sylvie Miet, responsable du département réglementation bancaire chez KPMG France.

Dans son rapport, le cabinet distingue deux catégories de startups dans la lutte anti-blanchiment : celles dédiées au contrôle de la connaissance client (KYC), comme le britannique Onfindo, qui a développé des algorithmes d'intelligence artificielle pour vérifier l'identité des utilisateurs à partir d'un selfie, les français Chekk et Ubble, ou encore l'allemand IDnow. Et celles dédiées à la surveillance des opérations, qui consiste à identifier les actions qui divergent du profil, établi au préalable, en termes de risque et d'opération d'un client donné.

Au total, cette catégorie de Regtech a levé plus de 400 millions d'euros, selon les informations disponibles au premier semestre 2019. Soit la part du lion des près de 950 millions d'euros levés par l'ensemble des startups européennes qui surfent sur la réglementation financière.

Un écosystème encore "peu mature, mais qui accélère"

"Nous sommes loin des chiffres des principaux acteurs de la Fintech, comme les acteurs du paiement et les plateformes de financement. Ce ne sont pas les mêmes ordres de grandeur", souligne Fabrice Odent, responsable des activités bancaires chez KPMG France. "L'écosystème Regtech est encore peu mature mais il accélère car il offre plus d'agilité aux établissements financiers et permet de répondre à des contraintes réglementaires de plus en plus pressantes. Il y a un besoin fondamental pour ces acteurs d'être en conformité. Ce n'est pas optionnel", ajoute-t-il.

Si la contrainte réglementaire joue en faveur de ces jeunes pousses, elle constitue aussi un défi du fait de ses évolutions très régulières, "ce qui est coûteux et nécessite d'importants investissements", pointe Sylvie Miet. "Certaines sociétés sont encore fragiles et n'ont pas atteint un degré de maturité suffisant les mettant à l'abri des aléas du marché", prévient-elle. Par ailleurs, il est rare qu'elles parviennent à s'imposer dans d'autres régions du monde que la leur. "Peu de Regtech proposent une offre couvrant les exigences réglementaires applicables à toutes les juridictions", souligne Sylvie Miet.

Pas encore de licorne, mais des alliés

Certaines Regtech pourraient surmonter ces écueils et tirer leur épingle du jeu. Dans son rapport, KPMG a ainsi identifié les 36 Regtech européennes les plus prometteuses, "celles ayant levé plus de 20 millions d'euros ou celles étant citées par au moins deux classements internationaux dédiés aux Regtech", précise l'étude. Fenergo (Irlande), Onfido, Duedil et Glassbox au Royaume-Uni cumulent ces deux critères. Les français Fortia et Scaled Risk figurent également dans cette sélection. S'il est encore trop tôt pour parler de licorne (société non cotée en Bourse valorisée plus d'un milliard de dollars) dans la Regtech, ces startups affichent un atout indéniable : elles se présentent comme des alliés précieux des banques et des assureurs et non comme des concurrents directs.

Juliette Raynal

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