737 MAX  : empêtré dans ses problèmes de qualité, Boeing renonce à monter les cadences de production

La tourmente se poursuit pour le 737 MAX après l'incident d'Alaska Airlines. Si l'impact direct est loin d'avoir été négligeable, avec 171 avions immobilisés, les répercussions s'annoncent bien plus lourdes encore. Confronté à des problèmes de qualité en série, Boeing est contraint de renoncer à augmenter le rythme de production de son best-seller pour le moment. D'abord imposée par la FAA, cette décision est en train d'être intégrée par la direction de Boeing et va peser lourd dans les prochains mois, voire au-delà.
Léo Barnier
Le 737 MAX va être contraint de stopper sa montée en cadence après avoir atteinte le rythme de 38 appareils par mois courant 2023.
Le 737 MAX va être contraint de stopper sa montée en cadence après avoir atteinte le rythme de 38 appareils par mois courant 2023. (Crédits : JASON REDMOND)

Depuis le redémarrage post-Covid du secteur aérien, Airbus et Boeing ont fait de la montée en cadence de la production d'avions le nerf de la guerre. Il s'agit pour l'un comme pour l'autre de rattraper le temps perdu pendant la crise et de combler l'immense demande actuelle, en particulier pour les avions moyen-courriers. Et à ce jeu-là, si l'avionneur européen a connu des difficultés, son concurrent américain s'est lui pris les pieds dans le tapis. Au point de devoir aujourd'hui mettre en pause cette montée en cadence si stratégique pour le 737 MAX.

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Pas de prévisions 2024

Une fois n'est pas coutume, Boeing n'a pas annoncé d'objectif de livraisons pour l'année qui débute lors de ses résultats 2023, ce mercredi. Et pour cause, l'avionneur doit composer avec une situation inédite qui rend 2024 très incertaine depuis la découverte de nouveaux problèmes de qualité dans la production du 737 MAX, qui ont conduit à la perte d'une porte bouchon en plein vol sur un appareil d'Alaska Airlines.

« Cela peut frustrer nos clients et nos investisseurs, mais la qualité et la sécurité doivent primer sur tout le reste. [...] Comme vous le verrez, nous n'émettons pas de perspectives pour 2024 aujourd'hui. Ce n'est pas le moment. Nous ne prévoyons pas de calendrier, nous ne prenons pas d'avance sur nos cadences. Nous irons lentement avant d'aller vite », a déclaré Dave Calhoun, PDG de Boeing, en préambule de la présentation des résultats annuels.

Le patron de Boeing va même plus loin : « Nous encouragerons et récompenserons les employés qui se mobilisent pour ralentir les choses si cela s'avère nécessaire. Nous nous concentrons simplement sur chaque nouvel avion et nous nous assurons que nous respectons toutes les normes que nous avons, toutes celles que notre régulateur a établies et que nos clients exigent. Dans le cadre de ce travail, nous restons confiants dans notre redressement. »

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Le 737 MAX bloqué à la cadence 38

De fait, la cadence de production des 737 MAX va rester inchangée pour une durée indéterminée. Pas seulement pour les MAX 9, concernés par l'affaire des porte-bouchons, mais pour l'ensemble de la gamme. Le MAX 8, qui constitue l'essentiel des ventes comme des livraisons, est donc concerné.

Cette décision a d'abord été imposée par le régulateur, l'Administration fédérale de l'aviation américaine (FAA) dans le cadre de l'enquête sur l'incident d'Alaska Airlines. Son administrateur, Mike Whitaker, avait ainsi déclaré le 24 janvier : « Permettez-moi d'être clair : Boeing ne reprendra pas ses activités habituelles. Nous n'accepterons aucune demande d'augmentation de la production de la part de Boeing, et nous n'approuverons pas de lignes de production supplémentaires pour le 737 MAX, tant que nous n'aurons pas la certitude que les problèmes de contrôle de la qualité mis au jour au cours de ce processus sont résolus. »

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Mais le patron de Boeing semble désormais avoir fait sienne cette contrainte.

« Aujourd'hui, nous produisons des 737 à un rythme de 38 par mois, et nous resterons à ce rythme jusqu'à ce que la FAA et Boeing soient satisfaits de la qualité de notre processus de fabrication », a-t-il annoncé.

« Au cours des dernières années, nous avons veillé à ne pas pousser le système trop vite, et nous n'avons jamais hésité à ralentir, à suspendre la production ou à arrêter les livraisons pour prendre le temps dont nous avions besoin pour bien faire les choses. Personne ne le sait mieux que nos investisseurs. Comme vous le savez, l'arrêt des livraisons de 787 a duré plus d'un an. [...] Et sur le 737, nous avons régulièrement ralenti les ruptures de rythme pour soutenir la stabilité de l'ensemble du système de production et pour collecter les performances lorsqu'elles sont identifiées. Mais cela montre clairement que nous avons encore du pain sur la planche. Je sais que l'impact sur le calendrier de livraison peut frustrer nos clients et nos consommateurs, mais la qualité et la sécurité doivent primer sur tout le reste », a poursuivi Dave Calhoun.

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Remise en cause des objectifs à moyen terme ?

Le patron de l'avionneur américain n'a pas annoncé d'abandon de l'objectif de montée en cadence pour le 737 à moyen-terme, qui était jusqu'ici d'atteindre la cadence 50 à l'horizon 2025-2026, mais semble l'avoir mis en suspens pour le moment. Le directeur financier, Brian West, a néanmoins confirmé que le 787 - l'autre fer de lance de Boeing - était bien revenu à un rythme de production de 5 appareils par mois courant 2023. Et que le programme poursuivait sa remontée en cadence vers les 10 avions mensuels, toujours à l'horizon 2025-2026.

Cette décision de geler la montée en cadence du 737 MAX devrait également influer sur l'objectif de dix milliards de dollars par an de flux de trésorerie disponible à partir de 2025-2026, comme le rappelle l'AFP. En attendant, Brian West se montre confiant sur la capacité de Boeing à maintenir cet indicateur dans le vert, y compris en cette nouvelle année.

« Nous avons toujours su que 2024 serait une année importante pour notre redressement. Sur la base de ce que nous savons aujourd'hui, nous prévoyons une autre année stable de flux de trésorerie disponible, grâce à la production du 737 à raison de 38 exemplaires par mois, à la poursuite de l'exécution du 787 en vue d'atteindre nos objectifs à long terme, à la liquidation continue de nos inventaires de 737 et de 787 en attente de livraison et à la poursuite de la réduction progressive de nos deux usines fantômes », a déclaré le directeur financier.

Par ce terme de « shadow factories », Brian West désigne les ressources mobilisées dans les usines d'Everett et de North Charleston pour remettre en état les avions parqués en vue de leur livraison plutôt que de produire des avions neufs.

Léo Barnier

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Commentaires 8
à écrit le 01/02/2024 à 7:58
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Ben oui ce serait dommage d'oublier de monter les réacteurs ! "Oups !" ^^

le 01/02/2024 à 13:42
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ça ça va, sans eux pas de décollage = risque minimal, même si la carlingue se dévisse et tombe au sol. :-) Oublier les freins, c'est ennuyeux.

le 01/02/2024 à 17:37
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"risque minimal" C'est vrai j'y ai pensé après, plutôt vertueux même ! ^^

à écrit le 31/01/2024 à 22:29
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Boeing 737 max est un qvian sure en 100% pourcents.Il n'y aura aucune doute dans ça

à écrit le 31/01/2024 à 22:01
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Le responsable a t-il pris la porte ?.......ou a t-il été augmenté, comme en FRANCE ?

le 31/01/2024 à 22:59
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@René Monti - "Le responsable a t il pris la porte"??? Pas eu le temps...elle tombée de 5 000 mètres.🤣

à écrit le 31/01/2024 à 21:03
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..La qualite prime sur le reste....maintenant qu ils ont provoqué 346 morts !! Allez demander aux familles qui ont perdu ces gens ce qu'ils pensent de cette philosophie ..d'apres coup... Avant c'etait quoi la philosophie?

le 01/02/2024 à 13:47
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optimiser les coûts, réduire les dépenses, sachant qu'il y a une limite. La direction serait devenus financière plutôt que technique, parait-il, la finance dicte ce que les ingénieurs doivent construire ou pas (réutiliser une vieille structure, ça f...

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