Au vu de la séquence connue par Boeing, avec des problèmes à répétition et des objectifs ratés en termes de livraisons de 737 MAX, le pire était à craindre pour les résultats financiers 2023. Le constructeur américain a tout de même réussi un dernier trimestre quasiment à l'équilibre, meilleur qu'attendu. Ce qui a contribué à l'importante réduction de ses pertes sur l'année par rapport à 2022. En parallèle de ces annonces financières, Dave Calhoun, PDG de Boeing, a promis de rester concentré sur le renforcement de la qualité qui fait actuellement défaut au constructeur.
Avec 773 millions de dollars de déficit opérationnel en 2023, le bilan n'apparaît pas tout de suite positif pour Boeing. Mais le fait est que le constructeur a divisé ses pertes par 4,5 par rapport à 2022. Sa marge opérationnelle est ainsi de -1 %, contre -5,3 % il y a un an. Cela tient notamment à une amélioration de 17 % de son chiffre d'affaires, à 78 milliards de dollars - en partie grâce à la progression de ses livraisons d'avions commerciaux - tandis que la hausse des coûts a été limitée à 11 %.
Résultats mitigés entre les divisions
Certes l'avionneur de Chicago a raté son objectif pour les 737 MAX, à cause de problèmes de qualité en particulier chez son sous-traitant Spirit Aerosystems, mais les appareils long-courriers ont bien fonctionné, entre le 787 pour les passagers et les différents modèles d'avions cargo. Ce mix favorable a permis aux revenus de la division Commercial Airplanes de bondir de près d'un tiers, au-delà de la hausse des livraisons, à 34 milliards de dollars. Malgré une réduction de ses pertes, elle reste fortement déficitaire avec une marge opérationnelle négative de près de 5 %.
Le constat est proche pour la division Defense, Space & Security, avec une hausse de 8 % du chiffre d'affaires, à 25 milliards de dollars, une division des pertes par deux, mais une marge opérationnelle encore dans le rouge, à -7 %.
La branche Global Services, qui adresse les marchés civils comme militaires, est la seule à être bénéficiaire et à avoir réellement tiré parti financièrement de la reprise du trafic commercial comme des besoins de défense. Elle améliore son chiffre d'affaires de 9 %, dans un volume de 19 milliards de dollars, et renforce sa marge de près de deux points pour atteindre 17,4 %.
Perspectives incertaines
Malgré tout, Boeing arrive à capitaliser sur ces performances disparates en tirant un flux de trésorerie opérationnel largement positif de près de 6 milliards de dollars, en forte progression sur un an. Cela tient notamment à l'accélération des livraisons dans le dernier trimestre. Le flux de trésorerie disponible a, lui, doublé pour atteindre 4,4 milliards de dollars. Bien que divisée par deux, la perte nette reste salée, à 2,2 milliards de dollars.
Boeing n'a pas encore annoncé de projections ou d'objectif pour 2024. Il faut dire que le constructeur n'est pas dans une situation confortable pour le faire, suite à la mise en cause de la qualité de sa production avec l'affaire des bouchons de porte sur les 737 MAX 9. Suite à cette affaire, révélée par l'incident survenu sur un vol d'Alaska Airlines, l'Administration fédérale américaine de l'aviation (FAA) a interdit à Boeing toute hausse de la production pour l'ensemble des modèles de 737 MAX : le MAX 9 bien sûr, mais aussi le MAX 8 qui constitue l'essentiel des ventes comme des livraisons. Cela ne va pas faciliter non plus les certifications des 737 MAX 7 et MAX 10 qui patinent depuis des années.
La cadence du 737 MAX va donc rester bloquée, pendant un temps du moins, à 38 appareils par mois (niveau atteint l'été dernier) comme l'a confirmé Dave Calhoun lors des résultats annuels. Il ne pourra donc pas continuer sa course en avant. L'objectif de Boeing était jusqu'ici d'atteindre la cadence de 50 à l'horizon 2025-2026.
Améliorer la qualité avant tout
Face à cette situation, Dave Calhoun a indiqué, lors de la présentation des résultats, être confiant sur les avancées de l'enquête et que, quelles que soient les conclusions, « ce type d'incident ne devait pas arriver ».
Un peu plus tôt, le patron de Boeing s'est adressé à ses employés, assurant qu' « un examen plus approfondi nous rendra meilleurs ». Il garantit qu'il « reste concentré sur l'accident du vol 1282 d'Alaska Airlines et sur les mesures » à prendre « en tant qu'entreprise pour renforcer la qualité chez Boeing ». Des mesures immédiates ont ainsi été décidées « pour renforcer la qualité dans tous (les) programmes d'avions commerciaux » et au sein de la « chaîne d'approvisionnement », mais aussi pour renforcer la surveillance de la FAA à l'égard de Boeing.
Boeing doit aussi faire face aux législateurs, le Congrès américain ayant pris un rôle prépondérant depuis le double crash du MAX en 2018 et 2019, et à ses clients. Dave Calhoun parle de « conversations directes et difficiles », évoquant la déception de ses partenaires.
Preuve de cette défiance, Scott Kirby, directeur général de United Airlines, s'est récemment rendu à Toulouse pour engager des discussions avec Airbus afin d'évoquer une extension de sa commande d'A321 NEO, selon l'agence Reuters. Le géant américain en a pourtant déjà 180 en commande, mais il s'agit de faire face aux retards de certification du 737 MAX 10 qui ne cessent de s'allonger. La compagnie a ainsi retiré l'appareil de ses plans internes, sans pour autant annuler sa commande pour 277 exemplaires pour le moment.
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