Agriculture bio : le gouvernement ajoute 40 millions d'euros au nouveau fonds d'urgence

Le gouvernement a annoncé ce mercredi renforcer le nouveau fonds d'urgence destiné à aider les agriculteurs certifiés bio en difficulté. Il y ajoute 40 millions d'euros, le portant ainsi à 90 millions d'euros, ce qui reste néanmoins insuffisant aux yeux des professionnels. L'exécutif a par ailleurs maintenu les objectifs de conversion de terres agricoles vers le bio et a pour cela présenté un programme dédié au soutien global de cette filière.
Concrètement, les agriculteurs bio ayant enregistré une baisse de leur excédent brut d'exploitation ou de chiffre d'affaires d'au moins 20% pourront déposer une demande, dès le feu vert européen.
Concrètement, les agriculteurs bio ayant enregistré une baisse de leur excédent brut d'exploitation ou de chiffre d'affaires d'au moins 20% pourront déposer une demande, dès le feu vert européen. (Crédits : Reuters)

40 millions : c'est le montant supplémentaire dont sera doté le nouveau fonds d'urgence destiné aux agriculteurs. Présenté il y a tout juste un mois, il est donc déjà renfloué. « Le Premier ministre avait posé (fin janvier) les bases d'un fonds à 50 millions d'euros et on va (le) rehausser à hauteur de 90 millions d'euros », a déclaré le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, au Salon de l'agriculture, mercredi.

« On a considéré que, compte tenu de la nature de la crise qui dure, il y avait besoin de mettre des moyens complémentaires à hauteur, en gros, de ce qu'on a déjà fait en 2023 », a-t-il justifié auprès de la presse.

Ce fonds, qui doit être encore approuvé par la Commission européenne, s'ajoute en effet aux 104 millions d'euros d'aides versées en 2023 aux exploitants de ce secteur qui pâtit depuis deux ans d'une consommation en berne dans un contexte de forte inflation.

Concrètement, les agriculteurs bio ayant enregistré une baisse de leur excédent brut d'exploitation ou de chiffre d'affaires d'au moins 20% pourront déposer une demande, dès le feu vert européen, pour un versement d'ici fin juin.

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Insuffisant aux yeux des professionnels du bio

Reste que le montant de ce fonds demeure encore loin des doléances de la Fédération nationale des agriculteurs biologiques (Fnab).

« En 2023 avec 104 millions d'euros, on a aidé 4.300 fermes sur 60.000 », a souligné son président Philippe Camburet juste après l'intervention du ministre. « Je ne comprends pas qu'on puisse annoncer des aides à 10% ou 15% des fermes alors qu'avec la baisse des ventes, on aurait besoin d'en toucher 30% à 40% », a-t-il ajouté.

L'organisation avait déjà fait part début février de son sentiment d'être l'un des grands perdants du récent mouvement de grogne des agriculteurs. Leur mobilisation a obligé le gouvernement a annoncé tout un lot de mesures pour calmer leur colère. Outre ce fonds d'urgence largement insuffisant à ses yeux, la Fnab regrette les annonces sur les pesticides, qu'elle considère comme des « régressions environnementales ». L'exécutif a notamment abandonné son projet de mettre en place un indicateur français pour mesurer la réduction des pesticides dans les cultures, au profit d'un européen. Au grand dam également de nombre d'ONG environnementales.

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Faire repartir une consommation en berne

Le ministre a par ailleurs insisté ce mercredi sur la nécessité de surtout faire repartir la consommation du bio en France. Après une croissance soutenue pendant plusieurs années, les ventes de produits bio, réputés plus chers et concurrencés par des labels aux critères moins exigeants ou des produits locaux, ont commencé à se retourner en 2021. Les ventes ont baissé de 5% en 2022. « C'est un petit renversement de tendance qu'on espère momentané », a indiqué Jean Verdier, président de l'Agence bio.

Le dernier baromètre de cet organisme public chargé de promouvoir le secteur, rendu public ce mercredi, fait part d'un « coup de frein dans la transition alimentaire ». Les préoccupations sur la santé et l'environnement, jusqu'à présent la principale motivation pour la consommation de bio, prennent moins d'importance dans l'esprit des 4.000 Français interrogés. Ils accordent en revanche plus de valeur à la dimension plaisir de l'alimentation, selon ce baromètre.

« On sent la fatigue des consommateurs qui ne retournent plus autant les paquets pour lire l'étiquette », estime Laure Verdeau, la directrice de l'Agence bio.

C'est pourquoi, selon elle, les prochaines campagnes de promotion du bio devront « miser sur la charge émotionnelle et la proximité ». Reste que le facteur prix devient de plus en plus prégnant. Rien d'étonnant avec une inflation persistante depuis des mois - à +3,1% en janvier et +5,7% dans l'alimentation. 43% des Français déclarent ainsi avoir désormais le sentiment d'être contraints de se restreindre sur l'achat de produits bio pour des raisons financières sur les dépenses alimentaires. Et 86% disent éviter, pour cette raison, les produits issus de l'agriculture biologique. 94% pensent d'ailleurs que « les produits bios sont souvent plus chers », et 62% estiment même que « le bio, c'est surtout du marketing ».

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Le bio a aussi un nouveau programme

Dans ce contexte, le secteur redoute un léger mouvement de « déconversion » d'agriculteurs bio vers le conventionnel. Illustration de ces inquiétudes avec le lait bio : la production a reculé de 4% en 2023 après avoir quasiment doublé depuis 2017, comme l'a souligné lundi Pascal Le Brun, président de la Coopération laitière. Selon lui, un tiers du lait bio est actuellement écoulé dans la filière conventionnelle.

À cela s'ajoute le fait que, dans la plupart des filières, l'agriculture conventionnelle est plus rémunératrice que le bio, selon une étude de l'Insee publiée ce mardi. L'écart est même particulièrement criant pour les deux filières qui concentrent la plus grande part de bio : le maraîchage (21,5% de bio en 2020) et la production de fruits (18,5%). L'excédent brut d'exploitation par exploitant, une mesure de rentabilité, y est inférieur de respectivement 57,7% et 31,1% en bio par rapport à l'agriculture conventionnelle.

L'objectif du gouvernement reste toujours que 18% des terres agricoles soient dédiées au bio en 2027, affirme le cabinet de Marc Fesneau en prévoyant une consolidation des conversions cette année avant une reprise. Les chiffres ne sont pas encore disponibles pour 2023 mais, d'après les dernières données, ils couvrent 10,7% de la surface agricole utile (SAU) en France.

Dans cette optique, l'exécutif a présenté ce mercredi un programme « Ambition bio 2027 ». Il est centré autour de trois axes : stimuler la demande en bio, consolider les filières bio et accompagner les agriculteurs face aux enjeux sociaux et environnementaux. Le gouvernement veut notamment pousser les cantines et établissements de santé à atteindre les obligations de la loi Egalim de 20% d'approvisionnement en bio, et encourager les restaurants à ajouter du bio à leur menu.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 29/02/2024 à 9:40
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de l'austerite a la francaise!!!!!!!!! quand on t'explique qu'on va economiser 10 milliards, en francais, ca veut dire ' on va faire plein de cheques puis on expliquera pourquoi on a accentue le deficit qui est injuste vu qu'il est ultraneoliberal me...

à écrit le 29/02/2024 à 9:37
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