Recherche médicale : une étude dijonnaise avance « une réponse vaccinale contre le cancer » du côlon

Le professeur François Ghiringellhi, oncologue au centre Georges-François Leclerc de Dijon, a eu l’idée d’expérimenter un traitement mêlant immunothérapie et chimiothérapie. Ses résultats très promoteurs ont été publiés, cet été, dans la revue de référence Nature Medicine.
Outre François Ghiringhelli, oncologue au centre Georges-François Leclerc de Dijon, la chercheuse Marion Thibaudin a également piloté le groupe d’études au sein du centre Leclerc.
Outre François Ghiringhelli, oncologue au centre Georges-François Leclerc de Dijon, la chercheuse Marion Thibaudin a également piloté le groupe d’études au sein du centre Leclerc. (Crédits : CGFL)

Chaque année, plus de 47.000 personnes déclarent un cancer colorectal, ou cancer du côlon et du rectum, et il cause 17.000 décès. Il est l'un des plus fréquents en France, selon l'institut national du cancer. Ces chiffres importants ont incité le centre de soins et recherche Georges-François Leclerc, à Dijon, - qui consacre 10% de son budget annuel de 130 millions d'euros à la recherche - à lancer une expérimentation dès 2017 sur ce type de cancer. Le laboratoire AstraZeneca a fourni gratuitement les médicaments pour l'étude et payer tous les surcoûts hospitaliers et les analyses biologiques pour un total d'environ 2,5 millions d'euros. « 95% des cancers du côlon sont traités uniquement par chimiothérapie et la plupart ne sont pas opérables », explique le professeur François Ghiringellhi, oncologue au centre Georges-François Leclerc.

Les 5% de malades restants sont traitables par immunothérapie. « L'immunothérapie est un traitement qui consiste à injecter dans le corps des anticorps fabriqués par les industriels, qui activent les lymphocytes B ou globules blancs et aide le corps à se défendre lui-même contre le cancer, sans utiliser de médicaments. Ce qui permet des survies prolongées ou des guérisons, sans besoin d'opérer », rappelle-t-il.

Un vaccin contre le cancer du côlon

L'innovation de cet essai clinique baptisé Meditreme vient de la combinaison, pour la première fois, des deux traitements : chimiothérapie et immunothérapie. L'expérimentation a été menée sur 57 patients, dans huit établissements en France, de 2017 à 2020. Puis, les analyses biologiques ont été effectuées entre 2020 et 2023. « C'est un changement de concept puisque 95 % des malades ne pouvaient pas faire d'immunothérapie, la maladie étant intrinsèquement résistante à ce traitement », souligne François Ghiringellhi. Avec cette étude, le professeur prouve que cette croyance est fausse, puisque l'immunothérapie combinée à la chimiothérapie a fonctionné pour une grande partie des malades. « Cette combinaison a permis des régressions de la maladie dans 65 % des cas. Nous avons eu également 15 % des malades qui ont connu une rémission complète de la maladie sans rechute, ce qui normalement n'arrive pas avec un traitement de chimiothérapie », précise François Ghiringellhi. Résultats : huit patients traités selon le protocole Meditreme ont développé une réponse immunitaire contre le cancer. « Ce qui prouve que le traitement était capable d'induire une réponse vaccinale contre le cancer chez les malades réceptifs », s'enthousiasme le professeur. Ces résultats positifs ont été reconnus par la communauté internationale, avec notamment une publication le 10 août dernier, dans la revue Nature Medicine, « l'une des trois grandes revues mondiales de recherche médicale », souligne François Ghiringhelli.

Une étude de phase 3 financée par des laboratoires américains ?

Au-delà de la découverte encourageante pour les malades, cette innovation représente un potentiel marché très important pour les industriels. « Ce type de traitement pourrait coûter entre 5.000 et 10.000 euros par mois, sachant que la durée du traitement est de six mois minimums », précise François Ghiringhelli. Afin de garantir le remboursement de ce traitement et d'aboutir à un nouveau standard mondial de prise en charge, le professeur doit encore produire « une étude de stade 3 », où la moitié des malades ont le traitement standard et l'autre moitié le traitement expérimental. Coût estimé de l'expérimentation : entre 30 et 40 millions d'euros.

François Ghiringhelli est actuellement en discussion avec AstraZeneca pour savoir si le laboratoire souhaite poursuivre le protocole, sinon le professeur mise également sur deux laboratoires américains, fortement intéressés, et qui fabriquent le même type de médicaments.

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