Centrale thermique en Guyane : le rapporteur public demande l'annulation de l'autorisation environnementale, EDF redoute un black out

Pour remplacer l'actuelle centrale thermique de Guyane, dont la fermeture est prévue pour fin 2023, EDF a obtenu en octobre 2020 l'autorisation d'en construire une nouvelle, au Larivot. Saisi par des associations environnementales opposées à ce projet, le rapporteur public du tribunal administratif vient de demander « l'annulation » de l'autorisation environnementale accordée à l'énergéticien. Un avis qui ne vaut pas décision de justice mais qui doit orienter le tribunal dans son choix, attendu dans les prochains mois.
Le projet d'EDF prévoit la construction d'une centrale thermique d'une capacité de production de 120 mégawatts, auxquels s’ajoutent quelques 10 MW d’énergie solaire. Elle se situe dans l’estuaire de la rivière de Cayenne, à un kilomètre du port de pêche du Larivot.
Le projet d'EDF prévoit la construction d'une centrale thermique d'une capacité de production de 120 mégawatts, auxquels s’ajoutent quelques 10 MW d’énergie solaire. Elle se situe dans l’estuaire de la rivière de Cayenne, à un kilomètre du port de pêche du Larivot. (Crédits : © Benoit Tessier / Reuters)

Nouveau rebondissement pour le projet de centrale thermique EDF du Larivot en Guyane, qui doit remplacer l'actuelle centrale au diesel de Dégrad-des-Cannes, vieille de 38 ans, dont la fermeture est prévue fin décembre 2023. Le rapporteur public du tribunal administratif de Guyane a demandé ce jeudi 31 mars « l'annulation » de l'autorisation environnementale accordée à EDF en octobre 2020.

Selon lui, la préfecture de Guyane a « commis une erreur d'appréciation » en accordant cette autorisation à EDF pour son projet de centrale électrique de 120 MW, à Matoury, dans un secteur à haute valeur écologique soumis aux risques naturels.

Pour le rapporteur public, il y avait des « alternatives suffisantes », trop vite « écartées » par l'État et EDF. Alternatives qui présentaient des risques naturels « légèrement moins défavorables » et évitaient la construction d'un oléoduc de 14 kilomètres pour alimenter en biodiesel importé la centrale électrique envisagée, a-t-il indiqué. Ces « sites alternatifs n'existent tout simplement pas », a rétorqué à l'audience le secrétaire général des services de l'État en Guyane, Mathieu Gatineau.

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Les opposants à la centrale misent sur un mix d'énergies renouvelables (ENR) comme moyen d'assurer la production électrique nécessaire à la Guyane. C'est ce que proposait dès 2018 le syndicat des énergies renouvelables (SER). Et, d'après un rapport de l'Ademe publié en février 2020, « un mix électrique 100% ENR est possible en Guyane tout en satisfaisant l'ensemble de la demande électrique à tout instant, moyennant un recours à des capacités de stockage complémentaires à la réserve hydraulique ».

L'Ademe reconnaît néanmoins que développer un parc ENR de substitution pour remplacer la vieille centrale diesel de Dégrad-des-Cannes dès sa fermeture « apparaît peu réaliste » et préconise donc de recourir au thermique de manière transitoire, sous forme de groupes électrogènes en conteneurs activables à la demande, dans l'attente du développement des ENR.

Parmi les propositions en matière d'ENR, l'association Guyane Nature Environnement propose par exemple d'installer du photovoltaïque sur des surfaces déjà artificialisées ou perturbées, comme les zones commerciales ou le lac du barrage hydroélectrique de Petit-Saut.

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Pas de risque de black-out même sans la nouvelle centrale

Pour l'avocat d'EDF, Me Steve Hercé, la centrale au Larivot (Matoury) doit se faire sinon, en 2024, « on va dans le mur » puisque l'actuelle centrale électrique d'EDF, vétuste et polluante, devra être arrêtée fin 2023. « A-t-on dans les délais un ou des moyens équivalents de sécuriser l'approvisionnement électrique ? » a pointé Me Hercé.

Une récente étude commandée par la collectivité territoriale de Guyane (CTG) et financée par l'Agence française de développement (AFD), consultée par l'AFP, estime néanmoins que « le risque de black-out » en 2024 « est maîtrisable » « sans le Larivot » et grâce au déploiement massif du solaire. Les conclusions de cette étude sont rejetées par EDF et la CTG.

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Décision finale dans les prochains mois

L'avis du rapporteur public ne vaut pas décision de justice. Il est censé orienter le tribunal administratif de Guyane, qui doit se prononcer sur le fond du dossier dans les mois prochains au regard des enjeux environnementaux. Reste à voir s'il sera suivi ou non.

Cette nouvelle intervention vient en tout cas nourrir encore un peu plus le dossier controversé de ce projet de nouvelle centrale EDF. En effet, l'autorisation préfectorale accordée en octobre 2020 pour sa mise en exploitation a fait l'objet de quatre recours dès février 2021 par les associations Guyane Nature Environnement et France Nature Environnement devant le tribunal administratif. Elles avaient par la suite saisi le juge des référés en juillet, qui avait suspendu les travaux de construction, considérant qu'il existait « un doute sérieux quant à la légalité » de l'autorisation environnementale de la future centrale. Mais le 9 février 2022, le Conseil d'État a annulé cette décision. C'est donc désormais au tribunal administratif de se prononcer.

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(Avec AFP)

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Commentaires 4
à écrit le 03/04/2022 à 17:45
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Bonjour, Pourquoi pas un de nos tous nouveaux Mini réacteur atomique.... Après tous, s'est peux polluants, et sa peux se démonté après usage ....

à écrit le 02/04/2022 à 2:37
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Des énergies "vertes" ultra-chères pour des pauvres ultra-marins est un non sens économique pour l'empire français...

à écrit le 01/04/2022 à 18:56
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Bonjour, En France, et dans les territoires et département d'outre-mer, ils est difficile de construire des installations public, centrales électriques ou autre , mais tout développement humain a besoin d'énergie.... Ensuite , les installations sur...

à écrit le 01/04/2022 à 14:01
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Comment faire sans électricité ? On revient au moyen âge à la bougie Il faudrait réfléchir avant d'être anti tout

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