Nucléaire : le réacteur 1 de Civaux reconnecté, près de 80% du parc d’EDF désormais en service

Le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Civaux, dans la Vienne, a été reconnecté au réseau électrique. Il était à l'arrêt depuis plus d'un an et demi après la découverte d'un problème de corrosion, qui s'était révélé commun à de nombreux sites. 44 réacteurs sont désormais en fonctionnement en France sur les 56 que compte le parc nucléaire d'EDF.
La remise en route du réacteur 1 de Civaux porte à 44 le nombre de réacteurs à ce jour en fonctionnement en France, sur un total de 56.
La remise en route du réacteur 1 de Civaux porte à 44 le nombre de réacteurs à ce jour en fonctionnement en France, sur un total de 56. (Crédits : Wikimedia Commons)

Arrêté depuis août 2021, le réacteur 1 de la centrale de Civaux a été progressivement remis en route ces derniers jours. À 21h ce mercredi 25 janvier, il a atteint 12% de sa puissance, permettant sa reconnexion au réseau. Il devrait fonctionner à 100% d'ici trois jours. Cela porte à 44 le nombre de réacteurs à ce jour en fonctionnement en France, sur un total de 56, soit près de 80% du parc.

À l'origine, la coupure de ce réacteur n'avait rien d'anormal. Elle était, en effet, liée à une visite de contrôle décennale de l'installation. Elle a toutefois duré bien plus longtemps en raison d'un problème de corrosion sur des conduites d'eau de secours servant à refroidir le réacteur en cas d'urgence. À la suite de cette découverte, des problèmes similaires ont été détectés aussi sur le réacteur 2 de Civaux et sur d'autres sites, sur des portions de tuyauteries cruciales pour la sûreté des centrales. Ce qui a conduit EDF à contrôler l'ensemble de ses réacteurs et à mener de longues réparations. Résultat : ils n'étaient ainsi que 24 en service fin août dernier. L'électricien a, depuis, mis les bouchées doubles pour remettre en service son parc.

Cette remise en service est en tout cas un événement marquant pour EDF, qui voit le retour sur le réseau électrique de sa centrale la plus récente (1997-99) et la plus puissante.

Lire aussiRelance du nucléaire, défauts de corrosion et renationalisation : 2022, l'année du grand chamboulement d'EDF

Des dizaines de mètres de conduites remplacées

À Civaux, après découpes de tuyaux et analyses en laboratoire, quelque 44 mètres de conduites ont été remplacés pour le premier réacteur et 32 mètres sur le deuxième réacteur. Les deux réacteurs ont aussi dû mener à bien leurs visites décennales : c'est chose faite pour le premier, et cela devrait être le cas pour le second le 19 février, qui devrait alors repartir à son tour.

Début novembre, EDF avait par ailleurs rendu public un problème sur le réacteur 1 de Civaux qu'il n'avait jamais rencontré sur un réacteur du parc nucléaire tricolore. Le 2 novembre, une fuite de vapeur s'est, en effet, produite lors d'une épreuve hydraulique, un contrôle réglementaire qui s'effectue tous les dix ans et qui vise à vérifier l'étanchéité du circuit primaire principal. Celui-là même qui permet de refroidir le cœur du réacteur. Un problème également résolu.

Lire aussiNucléaire : tout savoir sur la fuite inédite qui touche le réacteur de Civaux 1 d'EDF

Les problèmes de corrosion, une page « qui commence à se tourner »

Un an d'investigations sur le parc a permis à EDF de conclure que les réacteurs plus récents comme Civaux (1.300 et 1.450 MW) étaient les plus sensibles au problème de corrosion, par la géométrie de leurs tuyaux. Les réacteurs de 900 MW de technologie américaine Westinghouse, les plus anciens, et les plus nombreux, apparaissent moins exposés.

EDF a ainsi décidé de réparer systématiquement les 16 réacteurs à risque (sur 56). Huit sont réparés ou en train de l'être et il en restera huit à réaliser en 2023. « On a fait face, et tout le groupe s'est mobilisé. L'ingénierie, la R-D, les laboratoires... c'était EDF », se félicite Christophe Rieu, directeur de Civaux depuis l'été 2022. En revanche, pour réaliser ces réparations, notamment des soudures délicates, il a fallu appeler des sous-traitants, le drômois Monteiro dans le cas de Civaux.

Avec des tuyaux refaits à l'identique, EDF peut-il garantir que la corrosion ne se reproduira pas ? Le responsable n'écarte pas une récidive. Mais « on a développé des moyens de contrôle plus puissants et plus fréquents. Et c'est un phénomène très lent ». Pour lui, « c'est une page d'un sujet technique qui commence à se tourner ».

Lire aussiRenationalisation d'EDF : l'Etat temporise face aux recours, l'AMF clôture provisoirement l'OPA

Moins de réacteurs, moins de production

L'indisponibilité de nombreux réacteurs nucléaires n'a pas été sans conséquence. Le niveau de production nucléaire a été à son plus bas en 2022 depuis que le parc actuel existe. Elle est en effet tombée à 279 TWh, en baisse de 22,7% comparé à 2021.

En plus des difficultés inédites sur son parc, un conflit social pour des augmentations de salaires à l'automne a par ailleurs coûté à l'entreprise la perte de 4 TWh de production nucléaire, selon une estimation communiquée début novembre par EDF. « EDF a perdu un peu de volumes de production lors des grèves de l'automne et en raison de la modulation » de la production nucléaire en fin d'année, du fait de la météo, a précisé un porte-parole d'EDF. Jusqu'à 10 réacteurs ont été arrêtés avant Noël pour économiser du combustible, et ce, grâce aux températures douces qui ont entraîné une moindre consommation, selon l'entreprise.

Lire aussiNucléaire: la méthode du gouvernement pour construire six nouveaux réacteurs EPR à toute vitesse

Vers un prolongement de la durée de fonctionnement des réacteurs

Le Sénat a néanmoins voté ce mardi, en première lecture, un projet de loi favorisant la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, étoffé de dispositions controversées, comme la suppression de l'objectif de réduction à 50% de la part du nucléaire dans le mix électrique d'ici 2035. Une vote qui intervient alors que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a d'ores et déjà appelé EDF à étudier la possibilité d'un prolongement du fonctionnement des réacteurs au-delà de 60 ans. La plupart des réacteurs français ont été construits dans les années 1980 et approchent la quarantaine d'années, leur durée de fonctionnement initialement prévue. « Nous voulons voir cette échéance inscrite dans la prochaine PPE [programmation pluriannuelle de l'énergie, ndlr] », a ainsi précisé le président de l'instance de contrôle. L'ASN entend ensuite instruire ce dossier détaillé avec l'appui de l'IRSN, son bras technique, pour prendre une position fin 2026 au plus tard.

Lire aussiNucléaire : le Sénat accélère, EDF appelé à étudier une prolongation de ses réacteurs au-delà de 60 ans

Grève dans les centrales, mais pas de coupures pour le grand public

En attendant la mobilisation nationale de mardi 31 janvier, la CGT appelle à reprendre la grève dès aujourd'hui et demain dans les raffineries, les centrales électriques mais également les ports et les docks contre la réforme des retraites. Si elle est adoptée, la loi conduirait à la suppression des régimes spéciaux chez EDF ou Engie. Leurs salariés seraient, par exemple, eux aussi contraints, à terme, d'attendre 64 ans pour partir à la retraite.

Chez les électriciens et gaziers, des baisses de production dans les centrales nucléaires et les barrages sont à prévoir dès ce jeudi, prévient Fabrice Coudour, secrétaire fédéral de la FNME-CGT. Il assure toutefois qu'elles ne devraient pas provoquer de coupures de courant pour le grand public, tant elles sont encadrées par le gestionnaire des lignes à haute et très haute tension RTE.

Au menu de ces deux jours de mobilisation, également des actions « positives », à la Robin des bois : gratuité, réductions de tarifs, passage en heures réduites et rétablissements du courant pour les ménages coupés sont à prévoir, afin de contrebalancer les reproches adressés après l'annonce de « coupures ciblées », notamment contre des élus favorables à la réforme.

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 26/01/2023 à 17:13
Signaler
La durée de vie des centrales n'a jamais été prévue pour 40 ans. Il y a une révision décennale et tant qu'elle est bonne on continue. Au USA ils envisagent de les prolonger au moins jusqu'à 80 ans. Une conception pour pouvoir changer la cuve permett...

à écrit le 26/01/2023 à 16:36
Signaler
La problématique de la corrosion sous tension est connu d EDF depuis les années 90 . Une série de contrôles et remplacement de matériels avait déjà été fait. Mais voilà Les socialistes sont revenus avec leurs alliés écolos, porteurs de réductions d...

à écrit le 26/01/2023 à 16:17
Signaler
L'électricité va donc redevenir 'bon marché' ? Même si d'aucuns disent que ça serait un mauvais signe, provoquant la tentation de ne pas devenir(rester) sobres. Sauf que courant cher n'est pas très bon pour l'industrie vs la concurrence mondiale.

à écrit le 26/01/2023 à 12:51
Signaler
Nonobstant le problème de corrosion qui ne pouvait être anticipé, la disponibilité des centrales françaises est depuis de nombreuses années très nettement inférieure à celle de la plupart des pays.

le 26/01/2023 à 14:53
Signaler
Georges, les autres pays ont-ils une ASN aussi rigoureuse ?? Ont-ils des groupes anti-nucléaires aussi virulents ? Ont-ils des gouvernements aussi inconséquents ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.