« Botox » : le plan de la SNCF pour prolonger la vie de ses TGV et préserver ses capacités

La SNCF lance une opération lifting pour une centaine de TGV avec l'opération « Botox ». L'objectif est de préserver ses capacités et de voir venir en attendant l'arrivée de ses futurs TGV M. En espérant que cette opération de rajeunissement soit plus réussie que certains exemples hollywoodiens.
Léo Barnier
La remise en état de 104 TGV va nécessiter 2 millions d'heures de travail.
La remise en état de 104 TGV va nécessiter 2 millions d'heures de travail. (Crédits : BENOIT TESSIER)

Face à l'engouement actuel pour le ferroviaire - de la part des passagers comme des pouvoirs publics - la SNCF se retrouve confrontée à un besoin rapide de capacités. L'opérateur ferroviaire, qui a mis au rebut une cinquantaine de TGV au cours des cinq dernières années, a donc décidé de prolonger la vie de son parc restant pour faire le lien avec l'arrivée des futurs « TGV Inoui 2025 » (nouveau nom des TGV M). Une centaine de rames vont avoir le droit à un lifting plus ou moins poussé à la faveur de ce projet baptisé « Botox ».

« Si nous voulons accueillir plus de clients, il nous faut avoir plus de places dans nos trains », a lancé Alain Krakovitch, directeur de TGV-Intercités, pour introduire ce plan transformant qu'il décrit comme « un programme industriel d'obsolescence déprogrammée ». Il portera sur la rénovation de 104 rames sur les 363 encore en flotte. L'objectif est de prolonger leur durée de vie entre 2 et 10 ans selon les modèles et leur ancienneté. Sans révéler de chiffres exacts - le coût exact du chantier étant encore en train d'être affiné - le dirigeant a affirmé qu'il s'agirait d'un investissement de « plusieurs centaines de millions d'euros » avant d'évoquer un peu plus tard un chiffre compris entre 500 millions et un milliard d'euros.

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Préserver les capacités

Alors pourquoi investir autant pour un allongement somme toute assez limité ? Pour Alain Krakovitch, ce projet Botox va être source d'économies avec, en parallèle de la rénovation, le développement des capacités de réparation de pièces en interne. Cela doit permettre des économies de 500 millions d'euros par an par rapport à l'achat de matériel neuf. Il est néanmoins difficile de comparer un investissement à amortir sur dix ans au maximum et l'achat d'un TGV sorti d'usine qui va rouler pendant 40 ans.

La nécessité pour la SNCF de conserver de l'offre est donc centrale. En dépit de la sortie de nombreuses rames, Christophe Fanichet, PDG de SNCF Voyageurs, la filiale passagers du groupe SNCF dont fait partie TGV-Intercités, a affirmé à plusieurs reprises ces dernières semaines que le nombre de places en circulation en France a augmenté de près de 9,5 % entre 2018 et 2023. Une hausse qui s'explique notamment par le remplacement de TGV sur un niveau par des duplex, mais aussi la densification des cabines sur les TGV Ouigo, apparus il y a dix ans.

Lors de la décision d'acheter une flotte de 115 TGV M/Inoui 2025 en 2017, la SNCF estimait alors qu'elle pourrait maintenir ses capacités. L'arrivée des nouvelles rames, la densification, ainsi que l'optimisation de l'utilisation et de la maintenance des trains existants devaient ainsi compenser la sortie des matériels les plus anciens. Mais le calcul a semble-t-il été légèrement optimiste et la SNCF ne peut pas se permettre de perdre davantage de rames, sous peine de voir ses capacités partir irrémédiablement à la baisse dans les prochaines années. Que ce soit en nombre de sièges offerts, mais aussi en nombre de fréquences (nombre de trains circulant par jour sur une ligne donnée). D'autant que ce dernier critère ne peut être compensé par la densification des cabines. D'ailleurs, le groupe a complètement arrêté de sortir des rames du service depuis 2020.

Botox doit même amener une légère progression du nombre de sièges dans les prochaines années avec l'arrivée progressive des TGV Inoui 2025. Ce qui sera bienvenu pour la SNCF afin de répondre à la demande croissante autour du ferroviaire. L'opérateur a connu un été record avec 24 millions de passagers et 40 % de trains complets cette année.

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Parer à toute éventualité

Ce plan doit aussi permettre de pallier d'éventuels retards dans la montée en puissance des TGV M/Inoui 2025. En effet, les TGV du futur commencent à accumuler du retard dans leur développement. Initialement attendue pour les Jeux olympiques et paralympiques de Paris en août 2024, la mise en service a d'abord été repoussée vers « fin 2024-début 2025 » et semble maintenant avoir été repoussée courant 2025 et probablement pas avant la mi-année.

Même si ce retard n'est pas encore très conséquent, la capacité industrielle d'Alstom à produire ces nouvelles rames doit aussi être prise en compte. Le constructeur français, comme ses concurrents, est aujourd'hui saturé face à une forte demande et un grand nombre de projets à mener de front. Alstom réfléchit d'ailleurs à la pertinence de mettre en place une deuxième ligne de production. Mais ce type de projet industriel de grande ampleur prendra forcément plusieurs années avant de se concrétiser et d'apporter une véritable accélération des cadences.

Même si le risque de voir des cadences de livraisons plus faibles qu'attendues n'est pas avéré pour l'instant, il ne peut pas être entièrement occulté du côté de la SNCF. Ce qui explique sa volonté de prolonger des rames pour des périodes relativement courtes, de l'ordre de 2 à 4 ans.

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Chantier à plusieurs niveaux

Dans le détail, seules 23 rames seront prolongées pour 10 ans, toutes à double niveau avec des caisses en aluminium. Cela passera par une rénovation complète de la cabine au standard « Océane like » et des travaux sur les équipements. Ce travail qui demandera trois ans d'études, ainsi que 4 à 6 mois de travaux par rame, doit leur permettre d'atteindre les 50 ans de service opérationnel. Les chantiers débuteront en 2026 et s'étaleront jusqu'en 2033.

Les autres TGV ne seront qu'à un seul niveau qui ne verront leur durée de vie augmenter que de 2 à 4 ans. Cela passera par une rénovation plus légère des intérieurs, ainsi qu'une remise à neuf systématique de la voiture bar et des sanitaires. La corrosion, notamment au niveau du câblage, exclut d'aller plus loin sous peine de coûts prohibitifs. Cela nécessitera 1 an d'études et de 2 semaines à 1 mois de travaux par rame. Les premières circulations sont prévues début 2026 sur l'axe Atlantique.

Enfin, 19 rames supplémentaires (en plus des 104 de Botox) seront sorties du parc pour servir de « magasins » de pièces détachées au profit des rames prolongées. Cela s'accompagnera d'un investissement de 700 millions d'euros vers les technicentres de la SNCF pour optimiser la maintenance et développer les capacités de réparation de pièces.

Léo Barnier

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Commentaires 7
à écrit le 23/09/2023 à 4:37
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Nes serait-il pas plus rentable économiquement de supprimer la SNCF?

à écrit le 22/09/2023 à 14:09
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Plus de places dans les trains ? Peut-être d'abord plus de places pour les bagages et pour circuler dans les voitures, y monter et en descendre, ce serait bien, déjà...

à écrit le 22/09/2023 à 12:44
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Cette pratique, programmée, est courante dans le monde aérien; et n'a pas besoin d'acronyme... Buzz, quand tu nous tient !

à écrit le 22/09/2023 à 7:26
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Merci beaucoup ! Je suis tombé sur cette information hier et je me suis dit que quand même appeler une rénovation Botox c'était sacrément moche et vulgaire sans parler de tout ce que cela implique psychologiquement, après la bagnole à l'hydrogène "ho...

le 22/09/2023 à 8:47
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C est un acronyme … la Sncf étant une boîte industrielle elle fonctionne comme les autres de son secteur par acronyme . chercher donc le libellé complet haha

le 22/09/2023 à 8:47
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C est un acronyme … la Sncf étant une boîte industrielle elle fonctionne comme les autres de son secteur par acronyme . chercher donc le libellé complet haha

le 22/09/2023 à 14:37
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C'est tout ce que tu as comme réponse sans rire !? Un acronyme ? Et ça fait pas Botox du coup ? lol !

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