Exaspération. Alors que, côté sud, la SNCF a perdu pour la première fois une ligne de TER, côté Nord la compagnie ferroviaire nationale se trouve maintenant face à une fronde régionale inédite. En effet, fin octobre, la région des Hauts-de-France, présidée par Xavier Bertrand (LR), avait menacé de suspendre les paiements à la SNCF d'ici la mi-novembre si des progrès dans l'amélioration du service de transport n'étaient pas constatés à cette date.
De quoi se plaignent les usagers? Ils sont exaspérés par les trop nombreuses annulations de trains, par l'absence de communication en amont, et, quand il y en a, par des trains trop courts, donc... bondés.
"La dégradation du service sur l'ensemble du réseau TER est telle que le plafond des pénalités pour suppressions de trains (1,8 million d'euros par an) est atteint depuis le 8 juin 2021", soulignait alors la région.
Dans son communiqué, la région fustigeait "les nombreux dysfonctionnements rencontrés quotidiennement depuis des mois par les usagers du réseau TER (retards et suppressions de trains récurrents pour des indisponibilités de matériel ou de personnel)".
"Le jour où les problèmes seront réglés, on paiera l'arriéré"
Avant hier, mercredi 1er décembre, le conseil régional constatait le statu quo décevant dans un communiqué:
"Malgré les actions annoncées par SNCF, la situation n'a pas été redressée."
Le communiqué poursuivait en ces termes:
"La région Hauts-de-France prend la décision de suspendre les paiements dus à l'exploitant SNCF, avec effet immédiat, dans l'attente d'un redressement de la qualité de service."
Ce vendredi, le conseil régional annonce, à l'issue d'une réunion jugée "constructive" avec des représentants de la compagnie ferroviaire, qu'elle ne reprendrait ses paiements à la SCNF que lorsque le service des TER se sera amélioré.
En attendant que le taux de suppressions des TER redescende sous les 3%
Et Franck Dhersin, vice-président de la région, n'y va pas par quatre chemins :
"Le jour où les problèmes seront réglés, on paiera l'arriéré"
Franck Dhersin a indiqué que la région, qui doit payer chaque mois quelque 40 millions d'euros, reprendrait ses versements mensuels lorsque le taux de suppression des TER sera redescendu autour de 2,9%, contre "6% à 9,5%" actuellement.
Une réunion avec la SNCF "très constructive", dit pourtant la région
Après sa rencontre avec la SNCF, le vice-président de la région s'est félicité d'une réunion avec des interlocuteurs "très constructifs".
De fait, si la région n'a rien lâché, la SNCF a fait amende honorable promettant un "grand plan de recrutement et redistribution de postes" et un effort particulier pour 9 lignes, celles qui subissent le plus d'avaries, comme Lille-Douai-Amiens-Saint-Quentin et Paris-Beauvais.
Pas encore de "résultats visibles", reconnaît la SNCF
La SNCF a reconnu que le plan qu'elle avait lancé en octobre avait permis "des progrès techniques" mais pas encore de "résultats visibles" pour les usagers.
Le PDG de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, avait reconnu jeudi sur franceinfo que l'entreprise n'avait "pas anticipé un certain nombre de difficultés" dans cette région, citant comme causes principales les feuilles sur les voies, le gibier et le Covid qui a retardé les formations de conducteurs.
Christophe Fanichet, le Pdg de SNCF Voyageurs, lors d'une réunion avec la presse en octobre, expliquait pour sa part:
"Il y a un sujet de matériel roulant qui est en difficulté de maintenance et qu'il appartient à la SNCF voyageurs d'améliorer. Car la qualité de service n'est pas au niveau que SNCF Voyageurs doit délivrer à monsieur Bertrand. Donc, on rajoute des effectifs pour améliorer la maintenance et pour qu'on ait plus de trains qui puissent être plus fiables."
Il soulignait aussi les difficultés dues à la saturation des infrastructures sur l'axe Paris et Hauts-de-France:
"La production du Nord est très compliquée d'abord, en termes de situation géographique avec l'arrivée sur la gare du Nord. Nous parlons du "Y picard" qui arrive sur Creil avec des conflits de circulation énormes, puisque vous avez tous les trains qui passent là, sans aucune exception. Donc, on a une vraie tension sur l'infrastructure. L'infrastructure, ce n'est pas un claquement de doigts : une décision politique, ça se prend assez vite. Une décision d'infrastructure, il faut un certain temps."
La région demande le remboursement des abonnements
"Il faudra bien jusqu'à mars pour retrouver (un service) acceptable", anticipe Franck Dhersin, soulignant qu'un an est nécessaire pour former un conducteur de train. Selon lui, cette situation met en lumière la nécessité d'investissements de l'État pour permettre à la SNCF d'embaucher et d'entretenir le réseau. Il a aussi déploré que les "30 millions d'euros de bénéfices avant impôts" des TER Hauts-de-France l'an dernier aient servi à combler le "trou du TGV" plutôt qu'à investir pour les trains régionaux.
La région exige, par ailleurs, le remboursement des abonnements des usagers pour les quatre derniers mois "calamiteux", sujet sur lequel la SNCF doit faire des propositions, selon M. Dhersin.
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