Concurrence : pourquoi l'entrée d'Amazon au capital de Deliveroo est freinée

L'autorité britannique de la concurrence a lancé vendredi une enquête approfondie sur l'investissement d'Amazon dans Deliveroo, lors de sa dernière levée de fonds de 575 millions de dollars en mai dernier. La procédure, qui peut aboutir au blocage pur et simple de l'opération, doit se clôturer en juin 2020.
Anaïs Cherif
(Crédits : REUTERS/Charles Platiau)

Amazon et Deliveroo sont dans le radar de l'autorité britannique de la concurrence. La Competition and Markets Authority (CMA) a annoncé vendredi l'ouverture d'une enquête approfondie sur la levée de fonds réalisée en mai par Deliveroo, permettant l'entrée à son capital du géant américain.

  • Quels sont les liens entre Amazon et Deliveroo ?

La startup britannique de livraison de repas a bouclé une levée de fonds mi-mai de 575 millions de dollars (environ 515 millions d'euros). Cette série G a été menée par Amazon en tant que principal investisseur. Ce tour de table aurait donc permis à l'ogre du e-commerce d'acquérir environ 16% du capital de Deliveroo, selon le Guardian. Les investisseurs historiques de Deliveroo avaient également remis au pot : T. Rowe Price, Fidelity Management and Research Company, ainsi que Greenoaks.

La jeune pousse a ainsi levé 1,53 milliard de dollars depuis sa création à Londres en 2013. Deliveroo est valorisé 2 milliards de dollars depuis sa levée de fonds bouclée en septembre 2017.

Lire aussi : Deliveroo s'allie à Amazon pour contrer Uber Eats

  • Quelles sont les craintes de l'autorité de la concurrence ?

L'autorité britannique de la concurrence redoute en substance des prix plus élevés et des services moindres pour les consommateurs, mais aussi les restaurateurs et les épiceries. Suite à l'annonce de la levée de fonds, la CMA a lancé en juin dernier une première enquête, dite de "phase 1", clôturée le 11 décembre. Le régulateur estimait alors que la transaction pose "de sérieux problèmes de concurrence" pour le secteur de la livraison de repas et d'aliments, déjà très concentré avec seulement trois grands opérateurs - Deliveroo, Uber Eats et Just Eat.

Cette entrée au capital "peut donner à Amazon la possibilité d'exercer une influence matérielle sur Deliveroo", souligne le document publié par la CMA, au regarde de "l'expertise d'Amazon dans des domaines tels que le fonctionnement des marketplaces, des réseaux logistiques et des services d'abonnements, qui pourrait lui permettre d'influencer d'autres actionnaires et membres du conseil d'administration de Deliveroo."

Amazon n'a jamais caché ses ambitions dans le secteur de l'alimentation. La firme de Seattle s'essaye elle-même à la livraison de repas à domicile avec son service "Amazon Restaurants", lancé en 2016 aux États-Unis et au Royaume-Uni. Face à la concurrence féroce -- notamment celle de Deliveroo -- Amazon a fermé son service au Royaume-Uni seulement deux ans après son lancement, mais le service est toujours disponible aux États-Unis. L'autorité a examiné des documents internes d'Amazon et réalisé des entretiens avec la direction pour tenter de mesurer l'impact que pourrait avoir le groupe de Jeff Bezos si il relançait un service concurrent.

"Bien qu'Amazon ait fermé ses activités de livraison de restaurants, les éléments de preuve examinés dans le cadre de l'enquête indiquent qu'Amazon continue de s'intéresser fortement à ce secteur. La CMA estime (...) qu'Amazon pourrait réintégrer l'offre de plateformes alimentaires en ligne au Royaume-Uni, très probablement par le biais d'un investissement ou d'une acquisition alternative", peut-on lire dans le document.

  • Quelle est la prochaine étape ?

A l'issue de la "phase 1", les deux entreprises visées disposaient de 5 jours pour faire parvenir des propositions au régulateur. La CMA a précisé vendredi que les éléments apportés n'avaient pas dissipé ses inquiétudes, selon un communiqué de presse. C'est pourquoi l'autorité lance cette nouvelle enquête, dite de "phase 2", qui se clôturera le 11 juin 2020. A l'issue de cette procédure, l'autorité a le pouvoir de bloquer complètement l'opération ou d'exiger des contreparties. En avril dernier, la CMA avait ainsi bloqué l'OPA amicale à 9,6 milliards de dollars lancée dans la grande distribution par Sainsbury's sur Asda, filiale de Walmart.

Les deux entreprises visées ont défendu leur accord vendredi dernier. "Nous pensons pouvoir convaincre la CMA du fait que cet investissement minoritaire est bon pour la concurrence, en aidant les restaurants à se développer, en donnant plus de travail aux livreurs et en augmentant le choix pour les clients", a déclaré une porte-parole de Deliveroo, rapporte l'AFP. Amazon, de son côté, estime que la transaction permettrait "davantage d'innovation au service du consommateur".

Anaïs Cherif

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Commentaires 2
à écrit le 31/12/2019 à 12:44
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Bonjour

à écrit le 31/12/2019 à 10:59
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Les GAFAM renversent la table parce que l'économie mondiale financiarisee n'est dorénavant plus capable de penser à long terme alors qu'elles n'investissent qu'à long ou très long terme, attention donc aux raisonnements à chaud il y même fort à pari...

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