
Les lecteurs ont pu retrouver le Journal du Dimanche... ce dimanche. Alors que la première édition de l'hebdomadaire sous la direction de Geoffroy Lejeune n'avait été annoncée que pour la mi-août, elle a finalement été publiée par surprise peu après minuit sur l'application du journal, a constaté l'AFP. Il s'agit d'un numéro de 32 pages (soit 20 de moins que la dernière édition), dont la Une est consacrée à l'insécurité et à la justice après la mort d'un adolescent de 15 ans tué à coups de couteau le 22 juillet dans l'Eure. La nouvelle secrétaire d'Etat à la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, est la première membre du gouvernement à accorder un entretien au JDD sous la direction de Geoffroy Lejeune.
La parution s'est faite dans une ambiance assez « surréaliste » avec de nombreux « bénévoles » et « bonnes volontés », a commenté le nouveau directeur de la rédaction qui a décrit « un vrai baptême du feu ». Interrogé sur Europe 1 (radio du groupe Lagardère, comme le JDD), il a décrit ce nouveau journal comme étant « très engagé, [qui] défend des belles causes (...) C'est un numéro qui ne marquera peut-être pas l'histoire de la France, mais au moins l'histoire de la presse ». Les lecteurs « retrouveront les grands marqueurs de ce journal et, en même temps, il est parfaitement dans l'actualité », a-t-il estimé lors de sa première intervention publique.
Une grève de 40 jours
Pour rappel, les journalistes du JDD ont mené 40 jours de grèves, depuis le 22 juin contre la nomination de Geoffroy Lejeune, ancien rédacteur en chef de Valeurs Actuelles, comme directeur de la rédaction. Le mouvement a pris fin mardi par un accord qui prévoit notamment « la mise en place de conditions d'accompagnement pour les journalistes qui souhaiteraient quitter la rédaction », avait alors indiqué le groupe. Une grève inédite qui a surpassé par sa longueur les grèves historiques d'i-Télé en 2016 (31 jours) et de Radio France en 2015 (27 jours), selon un décompte de Reporters sans frontières. « Il nous coûte de le reconnaître, particulièrement auprès de nos lecteurs : si nous avons remis sur la place publique l'enjeu de l'indépendance des rédactions, face à notre actionnaire, nous n'avons pas gagné », a souligné la SDJ, dans ce texte au ton amer.
Après ce mouvement de grève, « abondamment commenté par les médias », « je comprends que je peux commencer à travailler et c'est ce que je voulais faire depuis plusieurs semaines » a raconté a raconté Geoffroy Lejeune. Commence alors une course contre la montre, selon lui. « Puisque c'était impossible, à quelques-uns, on a décidé de le faire », a-t-il poursuivi, qualifiant cette publication de « miracle ». « On était très peu nombreux pour relancer la machine du JDD (...) et des bonnes volontés se sont manifestées pour venir nous aider », a-t-il ajouté. Ce numéro a été réalisé essentiellement par des journalistes extérieurs, avec peu de membres de la rédaction sortante impliqués, comme pour le site internet dont l'activité avait déjà repris cette semaine, alimenté par l'agence de presse 6Médias. On retrouve les signatures de Charlotte d'Ornellas et Raphaël Stainville (anciens de Valeurs Actuelles, comme Geoffroy Lejeune), de Pascal Praud, journaliste à Europe 1 et CNews, Jacques Vendroux, pour le sport, ou encore Eric Naulleau (ex-compagnon de débat d'Eric Zemmour, que Geoffroy Lejeune a soutenu à la présidentielle de 2022).
Il y « a toutes les raisons de s'inquiéter » selon la ministre de la Culture
Les récents événements au JDD ont relancé le débat sur la concentration des médias aux mains de quelques grands groupes privés et la législation encadrant leur fonctionnement. Plusieurs pistes ont été évoquées au sujet notamment du conditionnement des aides à la presse, du renforcement du pouvoir des rédactions face aux actionnaires, mais aucune ne fait jusqu'ici consensus. Un sujet qui sera au menu en septembre des Etats généraux de l'information annoncés par l'Elysée.
De son côté, la ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, a estimé, dans un entretien à Ouest France samedi, qu'il « y a toutes les raisons de s'inquiéter au vu de ce qui s'était passé à Valeurs Actuelles qui, rappelons-le, a été condamné pour provocation à la haine raciale ». Sous la direction de Geoffroy Lejeune, le journal a, en effet, été condamné à une amende de 1.000 euros avec sursis pour injure publique à caractère raciste envers la députée LFI Danièle Obono. La ministre a néanmoins rappelé que « la presse d'opinion a le droit d'exister en France, cela fait partie du pluralisme de la presse, donc on ne peut ni contraindre la liberté de la presse, ni contraindre la liberté d'entreprendre ».
(Avec AFP)
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