Un tube qui vaut de l'or - ou du plomb ?

Le site Internet YouTube pourrait être racheté par Google pour 1,6 milliard de dollars. Sans passer par la case Bourse. A tort ou à raison?

Pourquoi s'infliger les tracasseries d'une introduction en Bourse - la paperasse, l'obligation de transparence, les réunions avec des analystes sourcilleux, une comptabilité irréprochable - alors que des milliardaires sont prêts à vous signer un gros chèque? Les propriétaires du site d'échanges de vidéo YouTube, la dernière coqueluche du monde d'Internet, qui emploie une soixantaine de personnes à San Mateo, en Californie, se sont sans doute fait cette réflexion. Mais à tort ou à raison?

Selon la dernière rumeur à Wall Street, le mastodonte Internet Google serait prêt à débourser 1,6 milliard de dollars - plus de 1,2 milliard d'euros tout de même - pour s'offrir YouTube. Un peu cher pour une société de vingt mois d'existence à peine, sortie véritablement des limbes de la Toile en décembre dernier, et que l'on dit encore déficitaire... Difficile d'estimer la valeur de ce site, devenu un véritable phénomène de société, qui attire plus de 30 millions de visiteurs uniques par mois et diffuse 100 millions de vidéo par jour, mais dont le chiffre d'affaires reste tenu secret - on l'évalue bien en deçà de 100 millions de dollars.

Si ce montant de 1,6 milliard de dollars se confirmait, il s'agirait de la plus grosse acquisition jamais réalisée par Google, après le chèque de 1 milliard signé à Time Warner pour prendre 5% d'AOL en fin d'année dernière. Ce serait presque trois fois plus que les 580 millions de dollars que NewsCorp avait accepté de débourser en juillet 2005 pour rafler le site communautaire MySpace, le numéro un de la vidéo sur le Web.

Toutefois, Google peut bien dépenser l'équivalent de 1% de sa capitalisation boursière et 40% de sa trésorerie pléthorique afin de s'assurer que cette pépite du Web nouvelle génération ne tombe dans l'escarcelle de l'un de ses rivaux. L'objectif ne serait cependant pas seulement défensif. L'enjeu véritable serait le futur eldorado que représente la publicité sur les sites de vidéo, dont les dépenses devraient être multipliées par sept dans les quatre ans à venir, pour atteindre 2,5 milliards de dollars. Un gâteau dont Google n'a aucune intention de laisser sa part...

Si d'autres géants des médias ou du Web, tels que Yahoo!, Microsoft ou Viacom, se lancent dans l'arène, le prix pourrait même grimper jusqu'à 3 voire 5 milliards de dollars, pronostiquent certains analystes. Le libre jeu des surenchères boursières, reposant sur une escalade de contre-offres, n'aurait-il pas été plus avantageux pour les propriétaires de YouTube?

Le fondateur de MySpace réclame aujourd'hui des milliards de dommages et intérêts, s'estimant floué: la valeur du site aurait triplé en un an et atteindrait 1,5 milliard de dollars selon le patron de Viacom, qui a raté ce deal. En Bourse aussi, mais moins que dans le privé, on prend toujours le risque de vendre trop tôt. Ce fut peut-être le cas de MySpace. En s'épargnant les longs préparatifs d'une introduction en Bourse, les propriétaires de YouTube se prémunissent peut-être du risque de vendre trop tard. Car YouTube n'effectue qu'une censure a posteriori des contenus illicites déposés sur son site et pourrait crouler sous les poursuites en justice pour violation de droits d'auteurs. L'urgence juridique lui commande donc de s'adosser au plus vite à un grand frère opulent et puissant. Avant de mourir, comme Napster première version...

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