
Depuis le 25 mars dernier, tous les réseaux bancaires de France commercialisent un prêt de trésorerie, garanti à 90% par l'État. Objectif de ce dispositif baptisé PGE (pour Prêt garanti par l'État) : inciter les banques à prêter davantage aux entreprises qui présentent des difficultés de trésorerie en raison de la crise liée à l'épidémie de coronavirus afin de limiter le nombre de faillites.
Toutefois, selon une récente enquête de la cellule investigation de France Info, les banques "traînent des pieds face aux entreprises en difficulté", certains chargés d'affaires ayant même reçu pour consigne d'attendre avant de refuser des demandes de prêt pour "des questions d'image". Ces derniers doivent ainsi "temporiser" pour "ne pas passer pour la banque qui fait couler les entreprises".
Les banques jouent le jeu, selon le patron de la FBF
Alors, les banques jouent-elles le jeu ? Oui, estime Frédéric Oudéa, le directeur général de Société Générale et patron de la Fédération bancaire française (FBF), interviewé sur France Info ce lundi 20 avril.
Selon lui, ces délais s'expliquent par le volume inédit de demandes de crédits. "Ce nouveau dispositif, c'est 55 milliards d'euros de demandes en 17 jours". Ces demandes ont été effectuées par 290.000 entreprises.
"Pour Société Générale, c'est l'équivalent de 10 mois de production normale de crédits", souligne-t-il. "Tous les réseaux bancaires sont mobilisés" face à cet "afflux de demandes", assure-t-il.
Moins de 5% de refus
Quid de la proportion de refus ?
"C'est moins de 5%. On est entre 2 et 3% [de taux refus parmi les entreprises éligibles, ndlr] ", affirme Frédéric Oudéa.
Le banquier rappelle néanmoins que le PGE ne concerne que les entreprises qui "fonctionnaient normalement avant la crise" du Covid-19. "On va donc pouvoir traiter avec ce dispositif 85% des entreprises", explique-t-il.
Les sociétés non éligibles, notamment celles qui se trouvaient en procédure collective (redressement et liquidation judiciaire) avant 2019, sont donc écartées automatiquement du PEG. "Ce n'est pas une aide en trésorerie qui va régler le problème qu'elles avaient avant", estime le banquier.
D'autres dispositifs d'aide
Quelles solutions alors pour ces entreprises exclues du Prêt garanti ? Ces dernières peuvent se tourner vers d'autres dispositifs mis en place par le gouvernement, explique Frédéric Oudéa, qui évoque le fonds de solidarité, désormais alimenté à hauteur de 7 milliards d'euros, et les 500 millions d'euros d'avances de trésorerie remboursables.
Pendant ce temps, la Médiation nationale du crédit, la structure logée au sein de la Banque de France chargée d'aider les entreprises qui font face à des refus de financement, a vu le nombre de ses saisines exploser. Au cours du mois de mars, elle a reçu 731 dossiers éligibles et 645 sur la seule semaine du 6 avril, contre un peu plus de 1.000 sur l'ensemble de l'année 2019.
Quand le recours au PGE se transforme en parcours du combattant
Ces chiffres corroborent de nombreux témoignages de terrain révélant que la mise en oeuvre de ce dispositif inédit peut se transformer en véritable parcours du combattant pour certaines entreprises dont la santé économique était pourtant bonne avant la crise. Les plus petites structures, notamment dans le secteur de l'hôtellerie-restauration et du commerce de proximité, semblent particulièrement touchées. "Des témoignages d'entreprises qui peinent à obtenir un Prêt garanti par l'État, j'en reçois par kilos", affirmait ainsi à La Tribune Alain Griset, le président de l'Union des entreprises de proximité (U2P). "Les banques considèrent que ces entreprises ne sont pas en capacité de rembourser un prêt", déplorait-il.
De multiples obstacles à l'obtention d'un prêt
Les petites entreprises ne sont pas les seules concernées par ces difficultés. "D'après les remontées de terrain, certaines ETI rencontrent des obstacles pour obtenir le PGE avec notamment des demandes de documentation excessives, y compris pour des sociétés solvables et qui sont bien notées", constatait, pour sa part, Alexandre Montay, directeur général du Mouvement des entreprises de taille intermédiaire (Meti).
Des délais d'instruction trop longs, des demandes de business plan sur plusieurs années, ou encore des garanties supplémentaires figurent parmi les principales difficultés signalées par les ETI, qui sont 48,8% à avoir engagé une demande de PGE, selon le dernier baromètre du Meti.
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