Comment la crise de l'immobilier impacte les géants du BTP et de la ville

Plombés par la crise du logement, Vinci et Bouygues viennent d'annoncer de nouveaux modes d'organisation internes. Qu'en est-il pour Altarea et Nexity, respectivement numéro 2 et 1 du secteur du logement neuf ? Comment le numéro 3 du BTP, Eiffage, fait-il face ? Que se passe-t-il chez La Poste ou chez Saint-Gobain ? Explications
César Armand
2023 a été définitivement une annus horribilis dans l'immobilier, dans le résidentiel comme dans le tertiaire.
2023 a été définitivement une annus horribilis dans l'immobilier, dans le résidentiel comme dans le tertiaire. (Crédits : DR)

2023 a été définitivement une annus horribilis dans l'immobilier, dans le résidentiel comme dans le tertiaire. La remontée des taux de crédits a créé une crise de la demande, pendant que l'inflation a engendré une crise de l'offre, que ce soit pour les particuliers ou les professionnels.

Après Vinci qui a annoncé, la première, un plan de départs volontaires ainsi qu'un plan de sauvegarde pour l'emploi (PSE), et Bouygues qui évoque un plan de mobilité interne, Altarea, Nexity, Eiffage, La Poste et Saint-Gobain viennent de présenter leurs résultats annuels 2023.

Altarea et Nexity trinquent

Premier à ouvrir le bal hier matin: Altarea. Le promoteur et développeur de bureaux, de logements et commerces, considéré comme le deuxième groupe immobilier français, a procédé à des ajustements de valeurs sur sa verticale promotion. La major a ainsi déprécié les frais d'études et des terrains de portage pour 192,9 millions d'euros, renoncé à 119,3 millions d'actifs en cours de construction ou à l'offre ou encore fusionné ses filiales de logement neuf Pitch et Woodeum pour 14,7 millions d'euros.

Au total, Altarea a déprécié ses actifs pour un total de 348,3 millions d'euros après impôt. Pas question pour autant de se lancer dans un plan social. « Nous gelons les recrutements pour l'instant, » a affirmé le président-fondateur du groupe Alain Taravella.

Dans la soirée, c'était au tour du leader du secteur Nexity de présenter ses résultats. Le groupe présidé par Véronique Bédague a fait savoir qu'il avait pris la a décision « d'engager dans les prochaines semaines le processus d'information-consultation des Instances représentatives du personnel (IRP) préalable à la mise en œuvre d'un Plan de sauvegarde de l'Emploi (PSE) ». Les résultats du pôle « promotion résidentiel » ont en effet plongé de 50%, à 140 millions d'euros.

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Eiffage atteint à la marge

Ce contexte défavorable a aussi atteint Eiffage, troisième groupe de BTP français, mais plus à la marge. Certes son chiffre d'affaires immobilier est en baisse, mais reste à 823 millions d'euros et sa marge opérationnelle courante demeure à 7,1%. « Chaque directeur régional a son promoteur et ses entités qui font du bâtiment de même que les fonctions financières, de pilotage et RH sont communes. C'est ce qui explique une capacité de circulation et de répartition des gens excessivement résiliente », explique le pdg de la major, Benoît de Ruffray.

D'autant que sa société surfe à plein sur un contrat de concession signé avec le ministère de la Défense qui court jusqu'en 2056 pour rénover près de 8.000 logements, construire 3.000 habitats neufs et gérer ce parc immobilier. Un contrat-cadre à comparer aux 30.000 logements qui doivent sortir d'ici à 2027 dans 22 « Territoires engagés pour le logement » listés par le gouvernement le 14 février dernier.

La Poste est atteinte, mais n'a pas de choc

Outre cet acteur majeur du BTP et des concessions, le groupe La Poste est, lui, aussi touché, particulièrement dans la banque et l'assurance. « La conjoncture de l'immobilier n'est pas bonne. Cela pèse sur l'assureur CNP (filiale de La Poste, NDLR) pour qui le coût approche les 200 millions d'euros », déclare, à La Tribune, son président-directeur général Philippe Wahl.  Le ralentissement de la production de crédits immobiliers a ainsi eu un « double effet: moins de marges et moins d'assurance emprunteur » pour la Banque postale.

La crise a également eu raison du fonds d'investissement de 500 millions d'euros fléché vers les projets immobiliers logistiques. Ce projet mort dans l'oeuf aurait dû être porté à 40% par La Poste groupe (200 millions d'euros), à 40% par la Banque des territoires (200 millions du groupe Caisse des Dépôts, premier actionnaire du logisticien) et à 20% (100 millions) par une tierce partie prenante.

Lors de l'annonce en novembre 2022, La Poste Immobilier faisait part d'une négociation avec un opérateur et d'un démarrage au premier trimestre 2023. « Nous ne l'avons pas lancé à cause d'un ralentissement des affaires », a admis, sans détour, le patron. Pour autant, a poursuivi Philippe Wahl, il n'y a pas eu de « choc d'emploi » sur La Poste Immobilier en 2023. « Notre première raison d'être consiste à fournir des locaux et des fonciers. Nous n'avons pas décidé non plus de vendre des actifs », a conclu le pdg du groupe La Poste.

Saint-Gobain surfe sur la rénovation

De son côté, distributeur de matériaux de construction et de verre Saint-Gobain continue de surfer, en 2023, sur la rénovation, qui représente 50% de ses ventes dans le monde et même plus de 60% en Europe. Malgré un coup de rabot dans Ma Prime Rénov' de 1 milliard d'euros, son directeur général voit les choses « en positif ». « Nous continuons de surperformer sur ce marché », s'enthousiasme Benoit Bazin.

En partenariat avec l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), la compagnie cotée au CAC 40 a en effet remarqué que 80% des projets éligibles à Ma Prime Rénov' étaient passés par son logiciel de conseil et de devis de sa marque PointP. « Les artisans n'achètent pas à 80% chez PointP, mais cela veut dire chose », poursuit le patron de Saint-Gobain.

Sur la construction neuve, Benoit Bazin entend raison garder. Et pour cause, elle ne représente « que » 22-23% de ses ventes mondiales.

César Armand

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Commentaires 3
à écrit le 01/03/2024 à 9:42
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regardez le nombre de faillites de tpe du BTP si cela perdure cette politique de destruction de l'activite de l'immobilier par les taxes reglements et autres couches successives vous pleurez pour pouvoir avoir un toit au desus de votr...

à écrit le 01/03/2024 à 7:10
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Dès que la tendance commerciale est à la " morosité " ce sont toujours " ceux " qui se gavent le plus qui se plaignent ... le plus !

à écrit le 29/02/2024 à 19:45
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Allez donc consulter l'évolution de l'indice du prix des logements depuis janvier 2000 et vous arrêterez de pleurer ensuite (alors que le BTP n'a bien évidemment pas été reste pour fourrer ses doigts dans ce gigantesque pot de confiture).

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