
Ils ne décolèrent pas. Après un premier communiqué le 18 décembre et une lettre aux ministres du Logement et de la Transition écologique le 12 janvier, les professionnels de la construction ne digèrent toujours pas la réglementation environnementale 2020, dite ''RE2020'', censée s'appliquer dans le bâtiment neuf au 1er juillet 2021.
"Véritablement ambitieuse, humaine, abordable et durable"
Dans une déclaration transmise à la presse le 26 janvier, l'Union sociale pour l'habitat (USH), la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI), la Fédération française du bâtiment (FFB) et son pôle Habitat, les SCOP du BTP, la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), l'Union nationale des syndicats français d'architectes (Unsfa) et l'Union nationale des économistes de la construction (UNTEC) plaident pour une « ''RE2020'' véritablement ambitieuse, humaine, abordable et durable ».
« C'est théâtral ! » juge une source proche du dossier. « Dès les annonces de novembre, on avait clairement conscience qu'il faudrait des ajustements, mais on ne savait pas lesquels. C'est à cela que sert la consultation, à rebours d'une certaine habitude démocratique et administrative de ne plus toucher au texte », poursuit-elle.
L'USH, la FPI, la FFB et son pôle Habitat, les SCOP du BTP, la CAPEB, et l'UNSFA et l'UNTEC ont en effet participé aux débats organisés par le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), mais ont voté ce même 26 janvier contre l'avis de ce dernier sur les projets de décrets et d'arrêté relatifs à la ''RE2020''.
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Des discussions auxquelles ont pris part les professionnels
Malgré tout adopté à treize voix pour, onze contre - dont les huit des organisations professionnelles - et deux abstentions, l'avis du CSCEE était accompagné de treize amendements. Ces derniers recommandaient par exemple de reporter l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation au 1er janvier 2022, de donner une place au biogaz dans les bâtiments neufs ou de revenir à l'analyse du cycle de vie (ACV) normée, conformément à l'expérimentation E+C-.
« L'avis est le fruit de discussions auxquelles tout le monde a participé, y compris ceux qui ont voté contre », assure à La Tribune le président du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique. « Nous sommes une instance consultative et le gouvernement a son libre-arbitre. Si ce dernier a pu se dire que c'était une formalité, il a montré depuis quinze jours une vraie volonté de concertation », ajoute Christophe Caresche.
Selon nos informations, les ministres concernées, Barbara Pompili pour la Transition écologique et Emmanuelle Wargon pour le Logement, ainsi qu'Agnès Pannier-Runacher, ministre de l'Industrie, devraient s'exprimer dans les prochains jours. « Les ajustements seront sur les dates et le seuils », confie une source proche du dossier.
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Inquiétude "entendue et comprise" sur les géosourcés
En attendant, les producteurs de matériaux de construction géosourcés, c'est-à-dire origine minérale et locale, et peu transformés comme la pierre ou la terre cuite, redoutent leur exclusion de la nouvelle réglementation 2020. Lors de sa présentation, le gouvernement avait insisté sur les matériaux biosourcés, c'est-à-dire d'origine animale ou végétale comme la biomasse, le chanvre ou la paille.
« L'inquiétude est entendue et comprise. La communication de fin novembre a mis un peu trop l'accent symbolique sur les matériaux biosourcés et le bois. C'est l'histoire d'une phrase prononcée lors de la conférence de presse et dans le dossier de presse qui a résonné beaucoup plus qu'on ne l'aurait pensé », concède cette même source.
Dans un second temps, comme annoncé lors de la présentation initiale, les ministres Barbara Pompili, Emmanuelle Wargon, Agnès Pannier-Runacher et leur collègue Julien Denormandie (Agriculture, ex-Logement) feront des déclarations sur le bois dans la construction.
Aussi noble-t-il, ce matériau est largement importé de pays étrangers. « Dans la RE2020, on prend en compte les émissions liées aux transports », rappelle une source proche du dossier. Et de certifier que « beaucoup d'acteurs de la construction, de l'industrie et de la promotion immobilière sont sur le point de se transformer voire de s'étendre ». Affaire à suivre...
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