C'est la nouvelle arme high tech, qui fait fantasmer toutes les armées du monde, le laser. Et la France a démontré qu'elle maîtrisait cette technologie, qui n'est plus aussi futuriste que cela. Loin des combats de la saga culte Star Wars, la filiale d'ArianeGroup, CILAS, a discrètement mis au point avec le soutien financier de l'Agence de l'innovation de défense (AID) et de la Région Centre-Val de Loire, un laser de moyenne puissance, HELMA-P, qui a réussi à détruire plusieurs drones en vol lors d'une campagne d'essais, qui a duré une semaine. Et cela s'est bien passé en France à la mi-octobre. Plus précisément au Centre d'Essais des Landes de la Direction générale de l'armement (DGA) à Biscarrosse où ont lieu les premiers essais concluants de l'effecteur laser HELMA-P, développé par CILAS, bien soutenu par sa maison-mère ArianeGroup.
Leader en Europe sur les lasers de moyenne puissance
La destruction d'un drone par une arme laser est une grande première en France. En Europe, MBDA Deutschland en avait déjà fait la démonstration en Allemagne en 2015. "Les résultats se sont montrés prometteurs dès la 1ère semaine, notamment en raison du temps de neutralisation qui s'est avéré très court", a de son côté souligné l'AID. Cela place la France dans le peloton de tête des nations leaders dans le monde dans le domaine des armes laser de moyenne puissance avec les Etats-Unis (High Energy Laser de Raytheon et Compact Laser Weapon System de Boeing) et Israël (Drone Dome de Rafael). Selon CILAS, il y a également des activités sur ce segment de marché en Russie, en Chine et en Australie.
"HELMA-P a, dès les premiers tirs, convaincu par sa précision, son efficacité et sa capacité à neutraliser en quelques secondes des cibles en vol situées jusqu'au kilomètre, a expliqué CILAS dans un communiqué publié mardi. Tous les tirs ont permis de détruire systématiquement les drones pouvant évoluer à des vitesses supérieures à 50 km/h et dans des conditions de poursuite de cibles difficiles".
Dans le domaine des lasers de forte puissance, CILAS, en tant que chef de file, travaille dans le cadre d'un consortium européen, baptisé TALOS (Tactical Advanced Laser Optical System). Basée à Orléans, la PME a donc pour objectif de développer une filière laser européenne dans le cadre d'un programme européen (Preparatory Action on Defence Research-PADR), en vue d'un futur programme de réalisation d'effecteur laser pour des applications de défense à l'horizon 2025. Ce segment de marché, sur lequel travaille également l'Allemagne, correspond à la neutralisation de missiles, d'obus, de drones offensifs, etc... "Le caractère éminemment stratégique de CILAS montera encore en puissance avec l'émergence des armes lasers, avait expliqué fin janvier à Orléans la ministre des Armées Florence Parly. A court terme, ces armes laser ont déjà un rôle à jouer dans le domaine de la lutte anti-drone". Ce qui est en voie d'être réalisé.
Une rupture technologique et opérationnelle
HELMA-P va apporter dès le printemps 2021 aux unités opérationnelles et aux forces de sécurité intérieures une arme nouvelle présentant une véritable rupture technologique. Ce système d'arme, qui peut être commandé dès à présent, est proposé en configuration fixe ou intégré sur véhicule ou sur un navire. Il est compatible avec un processus C2 (Command and Control) ou un système BMS (Battle Management System). Ce type d'arme peut venir en complément d'autres technologies anti-drones comme les fusils anti-drones. Outre la lutte anti-drone pour la protection de sites sensibles civils (aéroports, centrales nucléaires...) ou militaires et des convois, ce système devrait apporter un gain opérationnel considérable dans le combat aéroterrestre.
Ainsi, l'objectif avec HELMA-P est de disposer d'un système d'arme laser polyvalent, permettant la neutralisation de drone ou d'optronique, jusqu'à la neutralisation de roquette, artillerie et mortier. "L'effecteur laser est capable d'endommager le potentiel de défense et de réaction adverse avant une action", a estimé CILAS. Il peut être également utilisé contre les dispositifs explosifs improvisés en neutralisant les explosifs ou en détruisant l'électronique ou encore, dans le cadre de la préparation d'opérations, de neutralisation de capteurs de lumière, de brouillage de caméra ou encore de "dé-camouflage".
"Sa mission sera de sécuriser les opérations sur le territoire national lors d'événements et de soutenir les opérations extérieures en identifiant, poursuivant et neutralisant la menace fixe ou agile", a souligné cette PME spécialisée notamment dans les lasers et l'optronique (47 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018).
De nouveaux essais
"Ces premiers essais à Biscarrosse sont un succès et doivent se poursuivre afin de caractériser totalement les performances de l'effecteur, notamment en terme de portée et selon différents scénarios opérationnels", a précisé CILAS. Le système HELMA-P, installé sur trépied, a été expérimenté en conditions opérationnelles réelles. Après une semaine d'essais en octobre, ces derniers vont se poursuivre entre la fin 2020 et le début 2021 sur quatre semaines supplémentaires. Les prochaines semaines d'essai permettront d'évaluer l'efficacité du système sur de nouveaux modèles de drones, mais également avec la réalisation de tirs sur des drones évoluant à plusieurs centaines de mètres d'altitude.
Cette campagne d'essais permet non seulement de tester l'impact opérationnel du système mais ouvre également la voie aux procédures d'expérimentation des lasers de puissance. Ce nouveau système d'arme semble répondre efficacement à la menace que représentent les drones et plus particulièrement les mini-drones, qui posaient un vrai problème aux armées et aux forces de sécurité intérieures. Aux armées et aux forces intérieures de s'en emparer pour définir une doctrine d'emploi pour cette arme de rupture. Que la force soit avec elles...
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