Le gigantesque fonds norvégien KLP boycotte 12 entreprises du Golfe, dont le pétrolier Saudi aramco

Le fonds KLP, qui gère 70 milliards de dollars d'actifs a retiré ses participations à 12 entreprises des pays du Golfe pour un montant de 15 millions de dollars. En cause, les gérants de ce fonds arguent que ces Etats sont « caractérisés par des systèmes de gouvernement autoritaires qui restreignent la liberté d'expression et les droits politiques ».
Le pétrolier saoudien est exclu « principalement » en raison de l'absence d'un plan de transition énergétique.
Le pétrolier saoudien est exclu « principalement » en raison de l'absence d'un plan de transition énergétique. (Crédits : Reuters)

KLP, le principal fonds de pension de Norvège qui gère plus de 70 milliards de dollars d'actifs (près de 63 milliards d'euros) ferme la porte aux pays du Golfe. Il a, en effet, annoncé ce jeudi s'être désengagé des actions de 12 entreprises qui s'y trouvent.

La raison principale : le « risque inacceptable de violations de droits humains » lié à leurs activités. Plus précisément, les exclusions, qui ne représentent néanmoins qu'une somme totale de 15 millions de dollars, ont pour motif « que les États du Golfe restent caractérisés par des systèmes de gouvernement autoritaires qui restreignent la liberté d'expression et les droits politiques, y compris ceux des (voix) critiques et des militants des droits de l'homme », a déclaré Kiran Aziz, à la tête de l'investissement responsable chez KLP.

Lire aussiFonds durables : la gueule de bois des investisseurs

Les entreprises concernées sont surtout actives dans les secteurs des télécommunications et de l'immobilier. Le fonds de pension norvégien, distinct de l'énorme fonds souverain pétrolier du pays scandinave, relève, en effet, que dans le secteur de l'immobilier en particulier, les travailleurs migrants d'Afrique et d'Asie « ont été victimes de discriminations et de violations des droits de l'homme ».

Saudi Aramco sanctionné pour son manque d'ambition climatique

À noter, KLP a aussi revendu ses parts du géant pétrolier Saudi Aramco... mais pour une raison différente. L'entreprise du Golfe est exclue « principalement » en raison de l'absence d'un plan de transition énergétique, a expliqué Kiran Aziz, mais aussi pour ses liens avec l'Etat saoudien.

Le premier exportateur de brut au monde, détenu à 90% par l'Arabie saoudite, n'atteint pas les exigences du fonds de pension norvégien en matière de changement climatique pour les compagnies pétrolières et gazières.

Un fonds habitué des boycotts

Ce n'est pas la première fois que KLP se désengage d'entreprises pour des raisons éthiques ou politiques. En février 2022, il s'est notamment désengagé de compagnies russes en réaction à l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

En 2021 déjà, le fonds avait fait parler de lui après avoir banni plusieurs firmes d'armement de son portefeuille, dont les Français Thales et Dassault Aviation ainsi que d'autres grands noms du secteur comme le britannique Rolls-Royce, les américains Leidos, General Dynamics et Raytheon, l'Italien Leonardo ainsi que le constructeur naval chinois CSIC. À l'époque, la plupart des groupes avaient été exclus pour leurs produits liés à l'arme atomique qui « violent les principes humanitaires fondamentaux », selon le fonds. D'ailleurs, Thalès avait déjà été banni en 2005 pour cause de production d'armes à « sous-munitions » (une bombe « mère » remplie de mini-bombes explosives.) avant d'être réintroduite dans le portefeuille de KLP en 2009 car n'étant « plus impliquée dans la fabrication d'armes à sous-munitions dans aucun pays », justifiait à l'époque KLP.

Toujours en 2021, KLP a aussi cédé ses parts dans l'entreprise des télécoms Motorola, en raison de son implication dans les colonies israéliennes en Cisjordanie.

Lire aussiClimat : « La réforme du label ISR est une vraie décision politique » (Philippe Zaouati, Mirova)

En France, les pétroliers sont exclus le label ISR

Le fonds norvégien n'est pas le seul à lier éthique et investissement. En France, une nouvelle version du label ISR (Investissement socialement responsable) a été actée début novembre. Ce label de référence pour les fonds durables exclut à présent les producteurs d'énergie fossile non-conventionnelle mais aussi les entreprises investies dans de nouveaux projets fossiles conventionnels, ce qui concerne d'ailleurs le géant français TotalEnergies.

« C'est une vraie avancée pour tout le développement de l'investissement responsable », se félicite Pascale Baussant conseillère en gestion de patrimoine. « Pendant plusieurs années, Bercy n'a pas montré un intérêt très fort pour la finance durable. Avec cette réforme, les choses vont peut-être bouger », estime Ladislas Smia, responsable ESG chez MBO+, une plateforme d'investissement. Le nouveau référentiel, qui conservera son caractère généraliste, et dont tous les détails ne sont pas encore complètement arrêtés, doit entrer en vigueur au 1er mars 2024.

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 01/01/2024 à 10:42
Signaler
Il est vrai qu’en ce moment, nos gouvernements ne sont pas autoritaires et ne restreignent pas la liberté d'expression et les droits politiques, y compris ceux des (voix) critiques et des militants des droits de l'homme. Ah l’occident qui aime don...

à écrit le 29/12/2023 à 11:58
Signaler
Ces donneurs de leçon oublient seulement qu'ils continuent à tirer leur fortune du pétrole de la mer du Nord. Critiquer les pays du golfe alors qu'ils n'ont pas besoin de leur pétrole, quel courage !

à écrit le 29/12/2023 à 8:12
Signaler
C'est courageux.

à écrit le 28/12/2023 à 17:23
Signaler
il faut modifier le titre...ce ne sont pas des millions mais des milliards ;)!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.