PSA en Iran : pourquoi la suspension des activités est une catastrophe

Le groupe automobile veut obtenir une dérogation pour être protégé contre des sanctions américaines, après la décision de Donald Trump de revenir au régime d'embargo contre l'Iran. Si PSA limite l'impact sur ses comptes financiers, le groupe pourrait toutefois tirer un trait sur quasiment 15% de ses volumes mondiaux.
Nabil Bourassi
Les ventes en Iran ont atteint 446.000 voitures en 2017, soit le premier marché étranger de PSA, devant la Chine.
Les ventes en Iran ont atteint 446.000 voitures en 2017, soit le premier marché étranger de PSA, devant la Chine. (Crédits : Pierre Albouy)

L'appel de Carlos Tavares n'a, semble-t-il, pas été entendu. Le 24 avril dernier, en pleine assemblée générale des actionnaires de PSA, groupe qu'il dirige depuis 2014, il avait déclaré :

"Nous espérons que l'Union européenne saura se singulariser de M. Trump sur l'Iran".

Cette déclaration est intervenue alors que l'annonce par le président américain du retour des sanctions américaines sur l'Iran était imminente et faisait peu de doutes. Le 8 mai, Donald Trump a ainsi annoncé le retour du régime des sanctions qui avaient contraint le groupe automobile français à quitter, en 2012, ce marché, son premier au monde à l'époque, lorsque Barack Obama avait décidé d'accentuer la pression sur le régime de Téhéran.

15% des volumes mondiaux

Alors que les pays européens n'ont pas été capables de convenir d'une stratégie permettant de protéger leurs entreprises contre des sanctions américaines, PSA a décidé d'annoncer la suspension de ses activités en Iran lundi 4 juin. Cette annonce est une véritable catastrophe industrielle puisque le groupe tire un trait sur environ 444.600 voitures immatriculées en 2017, soit quasiment 15% de ses volumes mondiaux.

"Les activités du Groupe PSA en Iran représentant moins de 1% de son chiffre d'affaires, ce contexte ne modifie ni les objectifs généraux du plan 'Push to Pass', ni les orientations financières actuelles", nuance toutefois le groupe français dans son communiqué.

Il est vrai que les activités de PSA en Iran s'effectuent à travers des coentreprises et qu'à ce titre, elles ne sont pas consolidées dans les comptes. Il n'empêche que le groupe français était parvenu à s'emparer de près du tiers d'un marché local très dynamique pouvant monter jusqu'à deux millions de voitures par an. De fait, le marché iranien est devenu le premier marché étranger de PSA devant la Chine et n'importe quel autre pays européen.

Une présence historique en Iran

D'autant que le retour du français en Iran s'est fait dans des conditions inédites puisque cette fois, le groupe commercialisait ses modèles les plus récents là où il vendait de vieilles 406... Ainsi, les Iraniens se sont jetés sur les 2008, le SUV compact de Peugeot, et s'apprêtaient à découvrir la 208. Citroën a également planté son drapeau dans un pays où il est présent depuis plusieurs décennies puisqu'il avait été à l'origine de la création de SAIPA  en 1965 (alors baptisé SAIPAC pour "Société anonyme iranienne de production des automobiles Citroën"). Même la marque premium du groupe DS, a signé un accord mais plutôt d'importations.

Car Carlos Tavares a souhaité aller plus loin que de simples usines d'assemblages pour fabriquer entièrement ses voitures sur place. Les accords de joint-ventures signés avec Iran Khodro pour Peugeot, et avec SAIPA pour Citroën, allaient dans ce sens. Il s'agissait pour lui de faire de l'Iran une base de production compétitive (avec une forte intégration locale) pour desservir toute la région du Moyen-Orient en s'appuyant sur un marché local puissant. Les investissements dans les deux coentreprises s'élèvent en tout à 700 millions d'euros que PSA a pris en charge à hauteur de 50%.

Il semblerait toutefois que PSA ne jette pas tout à fait l'éponge en Iran puisqu'il souhaite obtenir une "dérogation" à ses activités en Iran. Une manière de mettre la pression sur les pouvoirs publics français.

Nabil Bourassi

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Commentaires 16
à écrit le 06/06/2018 à 8:34
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D'accord avec vous mais avec la faiblesse diplomatique et politique de la france nous sommes incapables de nous opposer aux exigences américaines. Nos dirigeants européens sont très forts pour s'acharner sur leurs peuples, quand il faut demander ...

à écrit le 05/06/2018 à 22:56
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Dérogation ! pas la moindre chance. PSA n'y croit pas. Les pays eur, démontrent toute leur faiblesse et leur capacité à etre totalement Humiliés!!! Ils sont démunis, et petits garçons en caleçon face aux U.S.A. " LA REVELATION DE L ANNEE 2018 " un...

à écrit le 05/06/2018 à 22:42
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On attend toujours une réaction de l'Union Européenne autre que "politiquement correcte" et qui ne laisse plus manger la laine sur le dos des entreprises et des européens... Diogène cherchait un homme, autrefois...

à écrit le 05/06/2018 à 20:24
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C'est une honte pour la Commission et le Parlement Européens, qui démontrent leur inutilité !

à écrit le 05/06/2018 à 20:13
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c est la que Macron va montrer qu' il est un chef ou simplement comme son maître Hollande un faible soumis . défense les intérêts des sociétés françaises c est plus difficile que de faire le beau à new York avec paris match.

à écrit le 05/06/2018 à 19:23
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PSA n'a pas d'intérêts aux USA et ne risque donc pas de sanction en tant que tel. Mais les banques qui financent le groupe, oui, et aucune ne veut se mouiller. Pourquoi ne pas mobiliser la Banque Publique d'Investissements pour financer en euros PSA?...

le 05/06/2018 à 20:10
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Ce qu' il faut envisager au-delà des postures sémantiques des médias et des rodomontades des politiques, c' est l' appartenance géopolitique de l' UE à l' US. Voilà une documentation vidéo pédagogique qui révèle le dessous ...

le 05/06/2018 à 20:31
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@Jeff même si PSA ne vend pas de voitures aux US pour l'instant, il y est largement présent en tant que fournisseur avec FAURECIA, en particulier sur le traitement des gaz d'échappement avec le rachat de plusieurs sociétés américaines au passage, et ...

le 05/06/2018 à 20:32
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@Jeff même si PSA ne vend pas de voitures aux US pour l'instant, il y est largement présent en tant que fournisseur avec FAURECIA, en particulier sur le traitement des gaz d'échappement avec le rachat de plusieurs sociétés américaines au passage, et ...

à écrit le 05/06/2018 à 19:20
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Seule solution, le rapport de force! Taxer les entreprises américaines présentes en France pour dédommager les entreprises françaises sanctionnées par la justice américaine. Trump se marre devant notre inaction et notre incapacité à réagir. L'Eur...

à écrit le 05/06/2018 à 17:48
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Marie Nicolas Au lieu de défendre les intérêts de la France, Macron s'est aplati, exit donc PSA et Total du marché iranien. En revanche il a montré les dents pour protéger qui ? L'Allemagne qui se voit taxer sur l'acier et l'aluminium. Plus francop...

le 05/06/2018 à 18:58
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Les relations Us vs UE analysées par Michel Collon et F. Asselineau, un grand moment notamment le reporting de la position de V. Nuland sur l' UE qui laisse pantois. https://www.youtube.com/watch?v=yXC7s9cbmnY

à écrit le 05/06/2018 à 16:38
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Les gagnants dans cette affaire sont les constructeurs chinois qui en se moquant des sanctions américaines vont accaparer tout le marché iranien, et les perdants sont tout le reste du monde. Parce que les iraniens voyant que le retrait de l'Amérique ...

à écrit le 05/06/2018 à 16:15
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Macron extrêmement disert sur le sujet depuis 8 jours se plie aux injonctions américaines comme un petit garçon et parce que l' UE est incapable de se faire respecter. Pour monter dans des avions au frais du contribuable, il y...

à écrit le 05/06/2018 à 14:49
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Le commerce international est en dollar, habitude ou exigence ? Quand y en aura-t-il en euro ? Total empruntait aux banques US pour ses projets abandonnés sous la menace, par habitude, facilité ou parce que les banques européennes n'ont pas les reins...

à écrit le 05/06/2018 à 13:52
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Pourquoi pas libéller les transactions en euro, rouble ou yuan pour s'affanchir de l'extraterritorialité des US grace au dollar ? Trop simple ou trop touchy ?

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