Nouvelle-Calédonie : le géant du nickel Glencore menace de cesser le financement de l'usine Koniambo

A compter de février 2024, le géant anglo-suisse de la production et du négoce des matières premières va cesser de financer l'usine de Koniambi Nickel, « si aucune nouvelle solution de financement n'était identifiée ». Pour rappel, elle est l'une des trois entreprises métallurgiques de Nouvelle-Calédonie en difficulté.
L'extraction et le raffinage du nickel, principale ressource de l'île, consomment « de 75 à 80% de l'électricité consommée sur le territoire » (Photo d'illustration).
L'extraction et le raffinage du nickel, principale ressource de l'île, consomment « de 75 à 80% de l'électricité consommée sur le territoire » (Photo d'illustration). (Crédits : Reuters)

Le géant du négoce des matières premières Glencore a annoncé son retrait fin février 2024 de Koniambi Nickel, « si aucune nouvelle solution de financement n'était identifiée », a annoncé Koniambo (KNS) ce mercredi 27 septembre. Actionnaire de KNS à hauteur de 49%, le groupe basé en Suisse en est le seul financeur.

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Pour rappel, l'usine a été mise en service en 2014 et emploie 1.350 personnes. Alors que les prix des matières premières stratégiques flambent sur les marchés mondiaux, les trois usines calédoniennes de raffinage de nickel, dont Koniambi Nickel, sont plombées et menacées dans leur survie par leurs coûts de production et leur manque de compétitivité, selon un rapport officiel publié en août.

« Bien que des progrès significatifs aient été réalisés en matière de productivité, de performance et de fiabilité, KNS continue de se débattre financièrement et de subir des pertes importantes, en grande partie en raison de facteurs indépendants de sa volonté liés à la structure des coûts et aux conditions du marché », a souligné Glencore dans un communiqué publié mercredi.

Le groupe a donc « informé le conseil d'administration de KNS qu'il ne financerait les activités de KNS que jusqu'au 29 février 2024 ». D'ici là, Glencore travaillera avec KNS et les parties prenantes concernées pour explorer des solutions pour les pertes continues" de l'usine, « y compris la recherche d'une source alternative de financement ». Dans un communiqué distinct, KNS a indiqué que, « dans les prochains jours, la direction de Koniambo Nickel rencontrera(it) ses actionnaires et toutes les parties prenantes institutionnelles avec l'objectif de pérenniser ses activités ». Son président Neil Meadows garde encore l'espoir de « convaincre Glencore de revenir sur sa décision », selon ce communiqué.

Au début du mois de septembre, une série de réunions s'est tenue au sommet de l'état, au ministère de l'Economie à Paris. Tous les acteurs de la filière, élus indépendantistes et loyalistes, industriels et administrations, ont ainsi tenté de « fabriquer une vision commune » et un « nouveau modèle » autour du nickel, avait-on indiqué de source gouvernementale. Dans le but d'éviter un crash industriel.

Une industrie très énergivore

« Le principal enjeu de l'avenir de la filière nickel calédonienne est celui de l'énergie », avait alors indiqué à l'AFP un membre du cabinet de la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, qui a participé aux réunions. Il faut faire baisser la facture énergétique exorbitante des usines. « C'est un enjeu de survie », avait renchéri une source industrielle.

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L'extraction et le raffinage du nickel, principale ressource de l'île, consomment « de 75 à 80% de l'électricité consommée sur le territoire ». Et les dépenses d'énergie des trois usines « peuvent être deux fois supérieures à celles de leurs concurrents indonésiens », précise le rapport du Conseil général de l'économie et de l'Inspection générale des finances.

Or le « caillou », surnom de l'archipel, n'a aucune infrastructure lui permettant de produire de l'énergie à bas coût. A l'exception du barrage de Yaté. Or, celui-ci représente moins de 10% de sa consommation totale. De facto, l'électricité dépend surtout du charbon ou du pétrole importé.

Une partie des discussions ministérielles ont porté sur les moyens de développer de nouvelles sources autonomes d'électricité, mais aussi sur le besoin de produire de l'électricité verte permettant à la filière de se décarboner et de s'inscrire dans les clous des objectifs climatiques européens, avait-on résumé de source gouvernementale.

Nouvelle réunion avant la fin de l'année

A terme, selon le schéma discuté, la Nouvelle-Calédonie pourrait passer à 70% de production d'énergie renouvelable « en pariant sur son potentiel extraordinaire d'ensoleillement et son potentiel foncier », et garderait 30% d'énergie issue de centrales thermiques au gaz importé, a-t-il ajouté. Mais pour que les trois usines puissent espérer devenir rentables, un investissement de 4 milliards d'euros serait encore nécessaire pour créer deux stations de transfert d'énergie par pompage (STEP), selon le gestionnaire calédonien du réseau Enercal.

Ces infrastructures ressemblant à des barrages sont destinées à stocker l'énergie photovoltaïque - intermittente - pour pouvoir l'utiliser lorsqu'on en a besoin. L'une serait construite dans le nord de l'île pour alimenter l'usine KNS Koniambo. La deuxième irait au sud, dans la vallée de la Tontouta, pour alimenter l'usine de la Société Le Nickel (SLN) à Nouméa, dont l'actionnaire majoritaire est le groupe Eramet, et celle de Prony Resources (PRNC), à la pointe sud de l'île, dont le groupe de négoce Trafigura possède 19% du capital.

Avant de signer un chèque, l'Etat français va faire expertiser dans les mois à venir ce schéma et le montant de la facture par la Commission de régulation de l'Energie (CRE), avait nuancé le cabinet de la Transition énergétique. Seule l'usine de Prony Resources produit du nickel de classe 1, adapté pour les batteries. Elle a signé un contrat très médiatisé avec Tesla.

Pour que les deux autres, qui produisent du nickel de classe 2 destiné à la fabrication d'inox, puissent entrer sur le marché des batteries, elles ont aussi besoin d'investissements, évalués à 250 millions d'euros pour l'usine du nord et à 20 millions d'euros pour celle de la SLN, selon le cabinet du ministre de l'Industrie Roland Lescure. Une nouvelle réunion du groupe de travail nickel devrait avoir lieu « avant la fin de l'année ».

(Avec AFP)

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Commentaires 3
à écrit le 29/09/2023 à 1:08
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Où en est-on du SMR (mini centrale nucléaire)... la solution passe peut-être par là ?? mais en même temps, si les Français doivent financer un tel investissement, il est évident que les indépendantistes doivent renoncer définitivement à céder le Cail...

à écrit le 27/09/2023 à 17:58
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Eh ben on n'a qu'a fabriquer ou acheter une ou plusieurs centrales nucléaires flottantes comme certains; On fait bien des porte avions et sous marins....

à écrit le 27/09/2023 à 14:02
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Faut-il faire fonctionner la Nouvelle Calédonie aux normes européennes ou aux normes indonésiennes?

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