TotalEnergies achètera la moitié de l’hydrogène « vert » de l’usine normande d’Air Liquide

La raffinerie de Normandie est sur le point de se convertir à l’hydrogène « vert », en vertu d’un accord signé entre TotalEnergies et Air Liquide. Un signal majeur pour cette filière émergente, mais dont l’impact en terme de décarbonation restera, somme toute modeste, au regard des émissions de la grande raffinerie d’Europe.
En échange, TotalEnergies s'engage à fournir à Air Liquide les « 700 GW d'électricité renouvelable ou bas carbone ».
En échange, TotalEnergies s'engage à fournir à Air Liquide les « 700 GW d'électricité renouvelable ou bas carbone ». (Crédits : BENOIT TESSIER)

En rugby, on appellerait cela transformer l'essai. Quelques minutes à peine après avoir annoncé le lancement d'un gigantesque appel d'offres pour l'achat d'un demi-million de tonnes d'hydrogène « vert » destiné à ses raffineries européennes, TotalEnergies a publié un autre communiqué relatif l'H2. Le géant pétrolier y indique avoir signé un protocole d'accord avec un premier fournisseur : Air Liquide. Le deal en question est à double sens.

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Dans le détail, il prévoit que le groupe gazier réservera la moitié de la production annuelle de son futur méga-électrolyseur normand, soit 15.000 tonnes, à la raffinerie toute proche de Gonfreville-l'Orcher en Seine-Maritime. De son côté, l'acheteur s'engage à fournir à Air Liquide les « 700 GW d'électricité renouvelable ou bas carbone » (incluant le nucléaire, ndlr) nécessaires à la fabrication de l'hydrogène « propre » qui alimentera ses installations.

« En alimentant l'électrolyseur avec de l'électricité renouvelable issue du solaire et d'éolien, TotalEnergies tire parti de son positionnement d'acteur intégré de l'énergie », fait valoir Bernard Pinatel, directeur raffinage et chimie du groupe.

Un (petit) pas vers la décarbonation

Chaque tonne d'hydrogène « gris » engendrant l'émission de 10 tonnes de CO2, cette conversion à l'hydrogène « vert » doit permettre à la raffinerie de Normandie de diminuer ses émissions de gaz carbonique de 150.000 tonnes par an. Bien que l'effort soit conséquent, il reste toutefois sans commune mesure avec les engagements de décarbonation pris par la France.

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 A titre de comparaison, la plateforme de Gonfreville-l'Orcher rejette aujourd'hui quelque 2,6 millions de tonnes de gaz à effet de serre dans l'atmosphère chaque année. Autant dire que la marche est haute avant d'espérer tutoyer le net zéro. Pour franchir le cap, la multinationale table sur une autre technologie autrement moins mature. Elle s'est alliée avec quatre autres gros émetteurs de la basse vallée de Seine dans l'espoir de déployer une infrastructure mutualisée de captage, de liquéfaction et de stockage de CO2. Les études se poursuivent.

Normand'Hy, le pari à 400 millions d'euros d'Air Liquide

Sur place, les engins de chantier s'activent déjà. Connue sous le nom de Normand'Hy, l'usine d'hydrogène décarboné que construit Air Liquide à quelques encablures du Havre, devrait être l'une des premières de dimension industrielle à voir le jour en France. D'une capacité de 200 MW, elle utilisera la technologie dite de la « membrane à proton » (PEM). Le gazier français a vu large. « L'électrolyseur PEM sera le plus grand jamais construit », assure-t-il .

La dépense est au diapason. Le projet, qui a obtenu une aide de 190 millions d'euros du programme France Relance après avoir été adoubé par le programme européen H2Use, va nécessiter un investissement global de 400 millions d'euros. De quoi produire un peu moins de 30.000 tonnes d'hydrogène « propre ». La moitié ira donc alimenter la raffinerie voisine de TotalEnergies. Le reste « sera destiné à des clients du bassin industriel normand ainsi qu'à la mobilité bas carbone », indique un  communiqué.

Quant au prix de vente de la molécule, difficile de l'évaluer. Il dépendra pour une bonne part du mécanisme de compensation que devrait lancer le gouvernement l'an prochain, sur le modèle des contrats pour différence en vigueur pour les énergies renouvelables. « Le diable étant dans le détail, nous attendons de voir », glisse à la Tribune un responsable d'Air Liquide. Selon nos informations, le groupe n'exclut pas de porter la capacité de son électrolyseur à 300 MW si l'Etat se montre prodigue.

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