Pétrole : l'Opep entre prolongation et durcissement des quotas

Coincés entre croissance mondiale morose, stocks de pétrole abondants et cours toujours fragiles, l'Opep et ses partenaires ont entamé des discussions délicates pour décider s'ils doivent aller un cran plus loin dans leur réduction d'offre de brut destinée à soutenir les prix.
(Crédits : Nick Oxford)

Depuis un an, les 14 membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et leurs dix partenaires, dont la Russie, s'efforcent de respecter leur engagement à baisser la production de 1,2 million de barils par jour (mbj) par rapport au niveau d'octobre 2018. Ce quota vaut jusqu'en mars 2020 et l'enjeu des réunions qui ont démarré jeudi à Vienne est de trouver une entente sur la suite de cette politique. Si une simple prolongation de l'accord jusqu'à l'été 2020, voire jusqu'à la fin d'année prochaine, a longtemps été l'option privilégiée par les analystes, des déclarations du ministre irakien du Pétrole ont ouvert la porte à une coupe plus drastique qui pourrait porter sur 400.000 barils supplémentaires par jour.

Mais le suspense est entier: les ministres de l'Opep sont restés muets à leur arrivée au siège de l'organisation. Pour son premier sommet en tant que ministre de l'Energie, le Saoudien Abdel Aziz ben Salmane, demi-frère du puissant prince héritier Mohammed ben Salmane, n'a donné aucun indice sur ses préférences. "Je m'attends à une réunion fructueuse", a-t-il déclaré à la presse.

L'Arabie saoudite, troisième producteur de brut et premier exportateur mondial, est le chef de file de l'Opep, sans lequel aucune décision n'est entérinée. Le pays porte l'essentiel des baisses de production et s'agace du non-respect de l'accord par plusieurs producteurs, comme l'Irak et le Nigeria, qui pompent au-delà de leur quota. Le royaume saoudien a aussi fort à faire avec la Russie, son principal allié hors Opep avec lequel il tente de faire  face au boom de l'offre américaine de gaz de schiste. Les groupes pétroliers russes renâclent à se voir imposer des limites supplémentaires de production.

 Militants pro-climat

Le ministre russe de l'Energie Alexandre Novak a de nouveau fait état cette semaine d'un dépassement des quotas alloués au pays, pour le huitième mois cette année. Avant une réunion officielle vendredi des quatorze membres de l'Opep avec leurs partenaires non membres de l'organisation, le ministre russe et son homologue saoudien ont eu un premier rendez-vous jeudi matin. "Nous attachons une grande importance au dialogue existant", a déclaré Alexandre Novak sans dévoiler ses intentions, cité dans un communiqué du ministère de l'Energie russe.

Lire aussi : Influence, accord et "gang bang": 5 choses à savoir sur l'Opep

L'Arabie Saoudite a également intérêt à soutenir les cours au moment où le pays ouvre une partie du capital de sa compagnie nationale Aramco. Le groupe, qui produit environ 10% du pétrole mondial, a conclu mercredi la période de souscription à ses premières actions en vue de sa prochaine introduction en Bourse. Le contexte économique mondial laisse peu de marge au cartel: la guerre commerciale pèse sur la croissance chinoise, très gourmande en pétrole, tandis que celle de l'Europe, autre zone de forte demande, reste faible.

Les militants du climat :  la "pire menace" pour l'industrie du pétrole

Les niveaux de production des pays non membres de l'Opep battent des records: les États-Unis, premier producteur mondial depuis 2018, extraient de grandes quantités de pétrole de schiste, le Brésil et le Canada ont également augmenté leur production et d'autres, comme la Norvège, projettent de le faire. Face à cette offre pléthorique, l'Opep n'a d'autre choix que de faire le dos rond afin d'assurer son objectif de maintenir "des prix équitables et stables aux producteurs" - sa mission déclarée.

Les cours sont relativement stables depuis la précédente réunion, en juillet, tournant autour des 60 dollars le baril pour le Brent - la référence européenne -, hormis un pic en septembre à la suite des attaques contre des installations pétrolières saoudiennes. Après avoir enregistré une poussée de 3,6% à la veille des réunions de Vienne, le Brent évoluait en légère hausse en cours de séance européenne jeudi.

Visages inhabituels parmi le défilé des ministres du pétrole, des militants pour le climat ont été reçus jeudi matin par le secrétaire général de l'Opep Mohammed Barkindo, après une protestation silencieuse devant le siège de l'organisation. M. Barkindo a dit être prêt au dialogue et assuré, selon le compte Twitter de l'Opep, qu'il n'y avait pas de "négationnistes du changement climatique au sein de l'Opep". Lors de la dernière réunion de juillet, il avait affirmé que les militants du climat étaient la "pire menace" pour l'industrie du pétrole.

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Commentaires 2
à écrit le 08/03/2020 à 15:57
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Je suis intéressé

à écrit le 05/12/2019 à 14:14
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"Les militants du climat : la "pire menace" pour l'industrie du pétrole" C'est faux mais c'est pour dire comme les classes dirigeantes sont complètement à l'ouest côté raisonnement et de ce fait très inquiétant quand à leur capacité et volonté d...

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