Privatisation : l'Etat tenté de vendre ADP en petits blocs

Selon nos informations, l'Etat est tenté aujourd'hui de vendre les 50,6% qu'il détient dans le gestionnaire des aéroports parisiens par petits blocs d'actionnaires et non de céder le contrôle à un actionnaire dominant. Mais rien n'est encore tranché.
Fabrice Gliszczynski

Il y a 10 jours, lors de l'assemblée générale de l'Union des aéroports français, Augustin de Romanet, le Pdg d'ADP, rappelait les trois schémas possibles pour la privatisation du gestionnaire des aéroports parisiens, si l'Etat décidait de lancer le processus: "La vente contrôle à un bloc [une entreprise ou un groupe d'entreprise, Ndlr]; la vente des 50% [la part que détient encore l'État dans le capital d'ADP, Ndlr], à toute une collection de petits blocs; et la conservation par l'État d'une partie du capital", avait-il indiqué en précisant que "l'État s'est laissé jusqu'au dernier moment de la faculté de décider".

Selon nos informations, si effectivement rien n'est tranché, l'État semble aujourd'hui tenté par une vente en petits blocs, qui permettrait à la fois de récupérer une belle somme d'argent sans confier les rênes d'ADP à un groupe industriel.

"Il y a une tentation au sein de l'État de vendre en petits blocs, pour avoir en face de lui plusieurs actionnaires, plutôt qu'un actionnaire dominant. C'est comme si l'on privatisait sans privatiser", explique un connaisseur du dossier, hostile à ce schéma, que pousserait d'ailleurs l'Élisée.

Pas d'OPA

Un tel scénario éviterait en effet la prise de contrôle totale d'un actionnaire. Car il ne permettrait pas le lancement d'une OPA, que rendrait nécessaire la cession d'un bloc d'actions d'au moins 30% du capital d'ADP, le seuil à partir duquel un actionnaire doit lancer une OPA sur l'ensemble du capital.

Il risquerait de faire fuir des industriels, au premier chef Vinci. En début d'année, son Pdg, Xavier Huillard, avait déjà déclaré que son groupe serait très attentif aux conditions de vente.

"Supposez que l'État décide de vendre 10% du capital pour conserver 40% pour toujours, et que ces 10% du capital soient découpés en 5 morceaux de 2% et qu'il nous est proposé d'acheter 2% du capital, on se posera la question de savoir si cela nous intéresse. Tout dépend donc du cas de figure", avait-il dit.

L'exemple des autoroutes

La remarque n'était pas anodine. Elle faisait référence à la cession de 9,5% des parts de l'État en juillet 2013, vendus en deux blocs de 4,7%, l'un à Predica, une filiale du Crédit Agricole, l'autre à Vinci (lequel détenait déjà 3,3%), avec, comme condition, que la participation des nouveaux actionnaires soit plafonnée à 8% pendant 5 ans. Une façon de faire qui, selon un proche du dossier à l'époque, visait à empêcher Vinci de prendre une longueur d'avance si ADP était un jour privatisé. Ceci dans le but d'éviter de reproduire le scénario constaté lors de la privatisation d'ASF (Autoroutes du sud de la France) en 2005 où personne n'était venu se frotter à Vinci, qui avait raflé au cours des années précédentes plus de 21% du capital. Sans concurrence, Vinci avait très bien négocié les conditions de cette acquisition avec l'État.

Des industriels candidats mettent en garde l'État

Selon Les Échos, Vinci, mais aussi le fonds d'investissement américain spécialisé dans les infrastructures Global infrastructures Partners (GIP), notamment propriétaire de l'aéroport de Londres Gatwick, mais également ses rivaux australiens IFM et Macquarie, auraient fait savoir qu'ils ne participeraient pas à un processus de vente minoritaire.

D'autres candidats sont sur les rangs. Selon nos informations, le groupe espagnol Ferrovial travaille sur la formation d'un consortium. Le fonds d'investissement français Ardian serait sur les rangs également, en partenariat avec d'autres fonds comme Meridiam et Antin.

Il y a plusieurs consortiums, dont des industriels "qui ont exprimé leur intérêt", a dit vendredi le commissaire aux participations de l'État, Martin Vial, en se gardant de citer des noms. "L'intensité concurrentielle est bonne au jour d'aujourd'hui", a-t-il dit, ajoutant qu'il fallait "plus de deux" consortiums pour juger réussi le processus de vente de l'opérateur des aéroports Roissy-Charles-de-Gaulle et Orly.

Le projet d'ADP de lancer un nouveau terminal (le terminal 4) est un point d'insatisfaction pour certains candidats, comme Vinci, GIP ou IFM qui ont d'autres idées en tête pour ce projet.

Fabrice Gliszczynski

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Commentaires 6
à écrit le 20/11/2018 à 4:28
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Pourquoi les francais ne vendent-ils pas leurs politiques ? les enarques specialement.

le 14/03/2019 à 22:50
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+ un forfait de ski annuel, Histoire d'être sûr qu'ils se vendent tous très vite, MEME A PERTE;lol

à écrit le 19/11/2018 à 23:20
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On vends un monopole Les moutons seront tondus à perpétuité

à écrit le 19/11/2018 à 19:50
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L'Etat est échaudé par la privatisation douteuse et ratée de l'aéroport de Toulouse-Blagnac que la Cour des comptes vient de dénoncer. Lisez l'excellent "L'empreinte du Dragon" de Jean Tuan chez CLC Editions. Vous saurez tout sur les méthodes de la C...

à écrit le 19/11/2018 à 18:22
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Ça marche donc il faut vendre... Quelle logique ! l'État se désengage encore d'un secteur clé... On va douiller sur le long terme. Qu'est ce qui fait encore rentrer de l'argent dans les caisses de l'État et qui n'est pas ( ou pas encore ) privatisé ?...

à écrit le 19/11/2018 à 13:43
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Au terminal, Vinci rachète chèrement les participations. Entre-temps des entreprises, françaises et étrangères engrangent de belles plus-values, les prix grimpent et les consommateurs paient la différence. Bonne stratégie, vive la dérégulation.

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