« Trick-or-Treat » : Halloween funèbre en 2023

VOTRE TRIBUNE DE LA SEMAINE. Dans ce monde imprévisible et menaçant, nous avons peu de certitudes auxquelles nous raccrocher. Petite revue avant la traversée des « Quarantièmes rugissants » qui nous attend au cours de l'hiver qui vient. « Trick-or-Treat », Halloween 2023 n'annonce rien de bon.
Philippe Mabille
(Crédits : Midjourney/LT)

1 - La France pays hôte ne sera pas ce samedi soir championne du monde de rugby cette année encore. C'est une vraie déception pour nos Bleus qui auraient bien mérité de la jouer, cette finale. Bonne chance et que le meilleur de l'hémisphère sud gagne ! Rendez-vous pour le Tournoi des Six Nations et dans quatre ans en Australie. Bye-bye, RWC 2023 et bravo à la parfaite organisation qui présage du bon pour les Jeux de 2024. Good News, la France sait recevoir !

2- Comme le « nine-eleven », le 11 septembre 2001 à New York, l'attaque subie par Israël le 7 octobre 2023 est un « game changer » pour l'ordre du monde. C'est depuis le 11 Septembre et la chute des Twin Towers que nous ne prenons plus l'avion comme avant. Sans doute pour toujours. Alors que l'armée israélienne est entrée dans Gaza pour « éliminer » le Hamas, le monde prend peur sur les répercussions que cette guerre aura non seulement dans la région, mais dans le monde entier. Et pas seulement parce qu'il pourrait y avoir un nouveau choc pétrolier. La diplomatie entre en jeu et fait pression sur Israël pour limiter les pertes civiles, mais avec quel espoir de succès ? Alors que les actes antisémites se multiplient, les Juifs du monde entier craignent de payer le prix d'une politique israélienne de colonisation en Cisjordanie que la majorité d'entre eux ne soutient pas. Une certitude, effrayante : comme après Charlie et les attentats du 13 novembre 2015 en France, nous allons devoir nous habituer à vivre longtemps encore en alerte attentat. Se déplacer, en train ou en avion, emmener ses enfants à l'école, ces actes simples de la vie quotidienne vont devenir des sujets d'inquiétude. Ne pas laisser gagner les terroristes, c'est continuer à vivre comme avant, comme le disait le slogan. Alors « tous en terrasse » pour fêter Halloween. Mais avec vigilance.

3- Nous passons à l'heure d'hiver dans la nuit de samedi (à 3 heures il sera 2 heures). La bonne nouvelle, c'est une heure de sommeil en plus. La mauvaise, c'est que sur le plan économique et financier, l'hiver est déjà en train de s'installer. La preuve par les frimas de récession en zone euro. Au troisième trimestre, la France serait en réalité tombée en croissance zéro selon la révision de l'Insee. Les résultats des entreprises confirment ce retournement des prévisions avec quelques gadins spectaculaires en Bourse, à l'image de Worldline (-40% mercredi après une révision en baisse de ses objectifs) ou de Sanofi (-19% vendredi). Certes, pour les investisseurs, une correction est nécessaire car comme le dit l'adage boursier, « les arbres ne montent pas jusqu'au ciel ». Le secteur du luxe, longtemps préservé, n'a pas échappé à la règle, avec un recul assez net des stars de la cote parisienne, les fameux Khôl (Kering, Hermès, L'Oréal et LVMH). Le grand retournement tant attendu des valorisations boursières se produit et pour beaucoup d'investisseurs avisés, ce n'est pas vraiment une surprise. La saison des résultats trimestriels n'est pas achevée : « trick-or-treats », on s'attend à d'autres profits warning pour Halloween. Même si les krachs boursiers ont généralement lieu en octobre, on entre dans une séquence de « bear market ».

4- Les taux d'intérêt sont en train de se stabiliser, comme l'ont annoncé de concert cette semaine la BCE puis la FED. Face à la contraction de l'économie, la trajectoire de désinflation est devenue plus crédible, mais il faudra encore du temps pour l'atteindre. Pas avant fin 2024 voire 2025 pour revenir à la cible de 2%, cette boussole qui guide l'économie et la finance. Deux ans donc encore à vivre avec des taux élevés et pour l'investissement : bonne nouvelle pour les banques... Mais la nouvelle ligne d'horizon, pour la finance mondiale, c'est 5%, le niveau atteint par les taux américains à dix ans. Cette référence va guider pendant les prochaines mois la marche des affaires, en changeant radicalement les modèles d'affaires. La bonne nouvelle, c'est que les investisseurs vont se ruer vers les obligations, ce qui va apporter des liquidités pour financer les énormes besoins d'investissement de la transition verte. La mauvaise nouvelle, c'est qu'à 5% et plus, ces investissements mettront plus de temps à se rentabiliser, ce qui pourrait même freiner ladite transition écologique. Problème : la rapidité du changement climatique ne souffre plus d'attente. Comment par exemple financer à 5% et plus le Fonds Vert espéré par les pays du Sud qui sera le grand enjeu de la COP 28 qui ouvrira le 30 novembre. Trick-or-treat ? En ces temps troublés, reste-t-il encore de l'argent pour le climat... A Dubaï, on constatera surtout que la demande d'énergies fossiles flambe et reste bien trop élevée pour tenir les objectifs des accords de Paris.

5- La transition énergétique pourtant accélère en Occident. Aux Etats-Unis, l'IRA fait tourner à plein régime la machine industrielle au point que le plan Biden de 400 milliards de dollars pourrait tripler la mise. En Europe aussi, l'électrification avance, avec, bonne nouvelle pour la France, enfin un accord à Bruxelles sur le nucléaire. Mais la tension reste électrique entre l'Etat et l'électricien national EDF pour trouver le bon équilibre entre pouvoir d'achat des ménages, compétitivité des entreprises et financement du programme d'investissement dans le nucléaire. Au point de voir le président d'EDF, Luc Rémont, claquer la porte... ? La rumeur a agité les esprits cette semaine, mais ce n'est pas le scénario le plus probable, à date. Le débat sur le prix futur de l'électricité intéresse aussi les acheteurs de véhicules électriques, qui devraient être de plus en plus nombreux selon le plan ambitieux présenté par le gouvernement lors d'une réunion avec l'ensemble de la filière, qui déploie ses modèles.

Alors que le gouvernement lance enfin le fameux leasing à 100 euros pour les ménages modestes achetant une voiture électrique, il va falloir s'assurer que le prix de la recharge reste compétitif. Le prix à la prise passera-t-il au-dessus du prix à la pompe ? Et qui peut dire que Bercy ne fera pas un jour payer une taxe sur l'électricité de nos voitures électriques pour remplacer les taxes sur les carburants fossiles... ? « Trick-or-Treat », à la fin, c'est toujours le fisc qui gagne !

Philippe Mabille

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Commentaire 1
à écrit le 28/10/2023 à 9:16
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C'est la fête des morts mais toujours pas celle de la vérité.

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