Apple sous haute tension au moment de lancer son iPhone 15

La firme au logo de pomme croquée va lancer quatre nouveaux modèles d'iPhone 15, deux montres connectées Apple Watch, et de nouveaux écouteurs AirPods. L'enjeu : redresser des ventes en baisse cette année dans un contexte plus défavorable que jamais, entre inflation et menaces de la Chine, qui a lancé des mesures de rétorsion contre Apple et soutient la riposte de Huawei sur le marché des smartphones.
Sylvain Rolland
Tim Cook, le Pdg d'Apple.
Tim Cook, le Pdg d'Apple. (Crédits : Reuters)

Depuis plus d'une décennie, les analystes financiers le répètent à l'envi : aussi incroyable que cela puisse paraître, Apple résiste à tout. Même le Covid et les tensions inédites sur la chaîne d'approvisionnement n'ont pas bousculé la croissance du groupe, qui a dépassé plusieurs fois cette année le seuil des 3.000 milliards de dollars de valorisation en Bourse.

Mais le vent semble en train de tourner pour la firme américaine. 2023 apporte un lot inédit de défis, autant économiques -l'inflation et ses conséquences sur les marges et sur les dépenses d'équipement des clients-, que géopolitiques, avec une dépendance dangereuse à la Chine, qui semble reprendre l'offensive ces derniers mois dans les smartphones, au détriment d'Apple.

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Grosse pression après trois trimestres de baisse des revenus

Le groupe dirigé par Tim Cook subit donc une énorme pression à l'heure de son grand événement marketing annuel de septembre, intitulé cette année « Wonderlust » (envie d'émerveillement), et qui se tient ce mardi 12 septembre à 19h heure française.

Lors de ce grand show calibré au millimètre, Apple va tenter d'en mettre plein la vue avec le lancement des nouvelles générations de ses produits phares. Après la relative déception de l'iPhone 14 l'an dernier, Apple mise gros sur la révélation de l'iPhone 15, qui sera décliné, comme d'habitude, en quatre versions différentes (dont deux "Pro", les plus haut de gamme).

Le géant californien va également dévoiler deux nouveaux modèles de montre connectée Apple Watch, ainsi que de nouveaux écouteurs AirPods, d'après les « fuites » savamment organisées par Apple dans la presse américaine. Cette année, l'innovation résiderait principalement dans les puces et les objectifs photos toujours plus performants, la taille de l'écran, et possiblement le port de charge USB-C universel imposé par l'Union européenne à tous les fabricants de smartphones d'ici à la fin 2024, mais qu'Apple anticiperait dès cette année.

Cela suffira-t-il pour redresser les ventes ? Malgré des revenus toujours incroyablement élevés -81,8 milliards de dollars pour le seul deuxième trimestre 2023 !-, Apple marque le pas, avec un chiffre d'affaires en baisse (-1,4%) pour le troisième trimestre consécutif. La raison : le recul des ventes de son produit phare, l'iPhone (-2,4% au deuxième trimestre), qui n'est pas encore compensé par les ventes de services (Apple Music, iCloud, Apple Pay, l'offre groupée Apple One), pourtant plus rentables et en forte croissance.

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Forte augmentation des prix

Or, Apple fait face à une inconnue : l'inflation. Alors que ses produits sont déjà très chers, une augmentation des prix semble inévitable cette année, contrairement à 2022 où le constructeur avait choisi de ne pas répercuter l'explosion des coûts sur les prix de l'iPhone 14. « En raison des coûts de production plus élevés liés à l'inflation et à la saturation de la chaîne d'approvisionnement, Apple devrait augmenter considérablement le prix des modèles Pro », écrit Yory Wurmser, du cabinet Insider Intelligence.

D'après Bloomberg, les deux modèles les plus haut de gamme, l'iPhone 15 Pro et Pro Max, auront un châssis en titane et des écrans plus larges qui justifieront la hausse du prix.

Reste à savoir comment les consommateurs réagiront. Mais Apple mise sur la fidélité de ses 1,2 milliard d'utilisateurs. D'après le cabinet Wedbush Securities, 25% d'entre eux, soit 300 millions de personnes, n'ont pas renouvelé leur smartphone depuis quatre ans, ce qui signifie que l'entreprise dispose d'une « base en or » qui lui amène des revenus récurrents, malgré l'allongement de la durée de vie des appareils.

Pour réussir le dernier trimestre et en finir avec la baisse des ventes, Apple pourrait également profiter de « promotions massives de la part des opérateurs américains au cours des prochains mois », jusqu'aux fêtes de Noël, « ce qui devrait permettre d'écouler davantage d'iPhone et d'atténuer l'impact d'une légère augmentation de prix », écrit l'analyste Dan Ives.

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La menace chinoise

Mais le principal défi pour Apple est d'ordre géopolitique : sa dépendance envers la Chine, qui vient de prendre deux initiatives qui pourraient impacter son activité. Or, Apple a besoin de la Chine à tous les niveaux : l'ex-Empire du Milieu pèse 20% des ventes mondiales d'iPhone, et Apple y a installé la plus grande partie de sa chaîne de production.

Or, pour la première fois, dans un contexte d'escalade des tensions avec les Etats-Unis, les autorités chinoises ont inclus Apple dans leurs mesures de rétorsion. Depuis quelques jours, les autorités de l'ex-Empire du Milieu ont interdit aux employés d'agences gouvernementales l'usage professionnel d'iPhone, ou même, pour les détenteurs du smartphone d'Apple, de l'emmener sur leur lieu de travail. L'annonce a fait chuter la valeur du titre Apple en Bourse de 6% en deux jours.

S'il faut relativiser les conséquences de cette mesure -Wedbush estime la baisse des ventes associées à cette décision à 500.000 appareils sur 45 millions de ventes prévues en Chine dans les douze prochains mois-, la Chine envoie bel et bien le message d'une préférence nationale sur l'équipement en produits high tech. L'an dernier, Pékin avait déjà demandé à son administration centrale de changer ses équipements informatiques de marque étrangère pour des ordinateurs « made in China ».

Surtout, la Chine tente de revenir en force sur le marché des smartphones. Fin août, le géant déchu Huawei, en grande difficultés ces dernières années en raison des sanctions occidentales, a annoncé à la surprise générale son grand retour dans les smartphones avec le Mate 60 Pro. Avec, pour la première fois, un processeur 5G « made in China » spécialement développé par Huawei. Une enquête du cabinet TechInsights a, dans la foulée, révélé que cette puce, une Kirin 9.000, a été fabriquée par SMIC, le spécialiste chinois des semi-conducteurs, et dispose d'une finesse de gravure de 7 nanomètres. Une prouesse technologique, et du jamais vu pour un industriel chinois...

De quoi raviver les tensions entre les deux puissances. Les Etats-Unis réfléchissent ouvertement à de nouvelles sanctions contre Huawei. De son côté, la Chine incite les consommateurs chinois à privilégier des marques locales. Ainsi, d'après le cabinet Counterpoint, la part de marché d'Apple en Chine a baissé de six points en 2023, à 16%, au profit de Xiaomi, Oppo et Huawei. Une tendance qui pourrait s'accroître si Huawei peut à nouveau rivaliser dans le haut de gamme avec des composants maison qu'il n'avait jamais, jusqu'à présent, réussi à produire.

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Sylvain Rolland

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Commentaires 4
à écrit le 13/09/2023 à 8:18
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Apple c'est une religion pour certain, comme dit précédent, ce n'est pas rationnel un moyen moins cher que la voiture et plus portable d'afficher son statut social, avéré ou pas. J'attends l'arrivée d'harmony4 en Europe, pour l'essayer et peut être ...

à écrit le 12/09/2023 à 15:19
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Environ 1500 euros pour un I Phone 15. Vendable en masse dans un environnement économique et géopolitique dégradé ? Pari risque.

le 12/09/2023 à 18:23
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Y en a que ça ne dérangera pas, souvent ça remplace un ordinateur à la maison, ils l'ont dans la poche et font tout avec. Sans avoir pour autant besoin d'en changer chaque année. Mais d'aucuns conseillent de prendre un modèle antérieur dont le prix a...

le 12/09/2023 à 21:10
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C'est justement la force d'Apple et que nombreux n'arrivent toujours pas à intégrer après 15 ans: l'acheteur d'un iphone cherche une reconnaissance sociale, pas le meilleur téléphone et surtout pas le moins onéreux (juste bon pour les "pauvres" dont ...

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